Harraga algériens disparus en mer : Douche froide pour les familles en Tunisie

17/04/2022 mis à jour: 05:15
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Coup de théâtre au tribunal correctionnel du gouvernorat d’El Kef (Tunisie). Les familles algériennes qui se sont rendues jeudi en Tunisie pour assister le lendemain au procès de leurs enfants (harraga), détenus depuis plusieurs années dans les prisons tunisiennes, ont été choquées. 
 

Sur place, elles ont été informées qu’il n’y a aucune affaire de harraga disparus programmée pour vendredi. Jointe par téléphone, une des familles concernées a déclaré à El Watan, avec beaucoup d’amertume et de déception : «A notre arrivée au tribunal correctionnel d’El Kef, nous y avons pris place et attendions avec beaucoup d’impatience l’ouverture du procès de nos enfants. 

Quelques moments après, un homme en costume a surgi de nulle part. Il s’est présenté en tant que vice-consul au consulat d’Algérie à El Kef. Il était venu pour nous dire que nos enfants ne seront pas ramenés au tribunal. Il n’y aura pas de procès aussi.» Déçues, les familles des harraga disparus ont quitté le tribunal, les convocations en mains, en s’interrogeant : «Qui a décidé de nous convoquer officiellement en mentionnant le lieu et la date du procès ?»

 A cette question, le vice-consul leur aurait répondu, selon la même source : «Le consulat d’Algérie à El Kef n’a fait que transmettre les convocations aux autorités algériennes telles qu’il les a reçues de ses homologues tunisiennes.» En effet, selon l’une des convocations, notifiées aux parents des harraga algériens disparus, on peut lire : «Votre fils, qui est parti depuis la plage de Sidi Salem de Annaba, dans le cadre de l’émigration clandestine, a été arrêté par les garde-côtes tunisiens. Il sera présenté devant le tribunal correctionnel d’El Kef en Tunisie le 15/04/2022.» 
 

Comme par enchantement, rien n’a eu lieu, au grand dam des familles des disparus qui, depuis plus d’une dizaine d’années, pleurent continuellement leurs progénitures. 
 

Contacté, Kamel Benabed, le représentant des familles des harraga disparus à Annaba, a déclaré : «Pour la première fois, les autorités tunisiennes reconnaissent officiellement à travers les convocations que nos enfants disparus sont toujours vivants.» 
 

La ligue des droits de l’homme dénonce
 

Du côté tunisien, nos maintes tentatives pour joindre le nouveau consul de Tunisie à Annaba sont restées vaines. Par ailleurs, un certain Hosni El Marai, qui se déclare être un journaliste et représentant de la Ligue pour la défense des droits de l’homme, bureau de Tunis, a affirmé dans une vidéo publiée hier sur sa page : «J’ai pris attache avec la juge chargée de l’affaire des harraga disparus auprès du tribunal d’El Kef. Elle m’a expliqué que les convocations adressées aux familles algériennes des harraga disparus étaient dans le but de les auditionner puisque jusque-là nous n’avons encore aucune information sur ce dossier.» Par ailleurs, Hosni El Marai qui a assisté, deux heures durant, à l’audience de la juge à laquelle a pris part un avocat tunisien a rapporté : «La juge étaient triste d’apprendre qu’il y a eu une mésinterprétation des convocations, dont l’objet réel était d’auditionner les parents des disparus algériens et non la tenue de leur procès.» 

Qui assume la responsabilité de cette grave erreur, les autorités judiciaires tunisiennes ou algériennes ? Qui a adressé la liste nominative des harraga algériens disparus au consulat d’Algérie à El Kef pour convoquer leurs familles en Algérie à l’effet d’assister, plusieurs années après, à leur procès ? Sont-ils vraiment détenus dans les prisons tunisiennes sachant que la juge a déclaré que le dossier est actuellement vide ? S’ils sont vivants, sont-ils considérés comme étant des prisonniers de droit commun ou des terroristes ? Tant de questions et beaucoup d’autres par lesquelles les familles des disparus, éplorées, interpellent le président Abdelmadjid Tebboune et son ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, pour intervenir et mettre fin à ce drame qui n’a que trop duré. 
 

La semaine dernière, 39 familles de harraga algériens disparus depuis 2008, dont 20 originaires de Annaba, ont été convoquées par les autorités judiciaires tunisiennes et leurs homologues algériennes pour assister au procès de leurs enfants qui devait s’ouvrir, vendredi, au tribunal correctionnel d’El Kef (Tunisie). Elles ont été notifiées officiellement par l’intermédiaire du représentant d’Interpol en Algérie. Avec l’assistance des autorités algériennes, elles ont pris avant-hier un vol spécial Air Algérie vers la Tunisie, via l’aéroport international Rabah Bitat de Annaba, pour assister au procès de leurs proches.

 Portés disparus pour la plupart depuis 2008, ces jeunes candidats à l’émigration clandestine ont été arrêtés après que leurs embarcations artisanales aient chaviré dans les eaux territoriales tunisiennes. Après avoir été interceptés, ils auraient été retenus pour les besoins d’enquêtes sécuritaires avant d’être secrètement détenus dans des prisons sans que leurs familles ne soient informées. 
 

Ni les déplacements des collectifs de familles des migrants disparus en Tunisie pour réclamer leurs enfants ni les interventions des avocats algériens et tunisiens dans les instances judiciaires tunisiennes, encore moins celles des associations des harraga disparus n’ont pu avoir la moindre information. 
 

A plusieurs reprises, les mêmes familles des disparus avaient tenu des sit-in devant le consulat de Tunisie à Annaba en vain. Pour clore définitivement ce dossier qui dérange, l’intervention personnelle du Président s’impose. A suivre… 

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