Guerre au Soudan : A Khartoum, artillerie lourde et renfort de troupes

03/06/2023 mis à jour: 02:07
AFP
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Selon des observateurs, l’armée veut enregistrer des gains militaires pour être dans une meilleure position en cas de reprise des négociations

L’artillerie a continué de faire trembler Khartoum hier malgré les sanctions américaines contre l’armée et les paramilitaires, qui semblent préparer une escalade dans leur lutte pour le pouvoir. 

Les bombardements de l’artillerie se sont poursuivis toute la nuit aux abords de la télévision d’Etat, ont rapporté des habitants à l’AFP. Après sept semaines de guerre entre l’armée du général Abdel Fattah Al Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, ayant fait plus de 1800 morts et plus d’un million et demi de déplacés et réfugiés, Washington a haussé le ton. La Maison-Blanche a annoncé des sanctions à l’encontre de quatre entreprises : deux groupes d’armement de l’armée et deux sociétés, dont l’une opérant dans les mines d’or du Soudan, tenues par le général Daglo et deux de ses frères. Selon une étude de 2019, ces deux groupes ont transféré des millions de dollars aux FSR depuis et vers des comptes en dirhams aux Emirats arabes unis. 

Quelques heures après l’annonce des sanctions, l’armée a annoncé l’arrivée à Khartoum de nouvelles troupes en provenance d’autres Etats du Soudan. «L’armée devrait lancer prochainement une offensive massive, c’est pour cela qu’elle s’est retirée» des négociations en Arabie Saoudite pour un cessez-le-feu temporaire, décrypte sur Twitter la chercheuse Kholood Khair. L’isolement diplomatique, martèlent depuis des années diplomates et experts, n’est pas une réelle menace pour les deux généraux en guerre. 

Le général Daglo passe pour l’un des hommes les plus riches du Soudan – troisième producteur d’or d’Afrique – et peut facilement forger des allégeances, et le général Al Burhane, comme tous ses pairs dans l’armée, a développé sous l’embargo des stratégies pour contourner les sanctions internationales. Aujourd’hui, «l’armée veut enregistrer des gains militaires pour être dans une meilleure position en cas de reprise des négociations», assure Kholood Khair. 

Depuis près d’un mois, les deux belligérants avaient accepté d’envoyer des émissaires à Djeddah, sur la mer Rouge, sous la pression des Etats-Unis et de l’Arabie Saoudite. Ils y ont discuté deux semaines durant pour se mettre d’accord sur un engagement de principe visant à «protéger les civils». Puis ils ont signé deux trêves purement théoriques.
 

Tués sur un marché

Sur le terrain, les combats continuent de faire des victimes, les pillages se poursuivent et les déplacés sont de plus en plus nombreux. Mercredi, alors que l’armée sabordait les négociations à Djeddah, ses hommes déployaient des armes lourdes à Khartoum.

 Depuis lors, les canons n’ont cessé de tonner dans la capitale, tuant mercredi au moins 18 civils sur un marché. En face, les FSR continuent de prendre leurs quartiers dans des hôpitaux ou des maisons de civils jetés sur les routes du pays, l’un des plus pauvres au monde et qui s’apprête à entrer dans la saison des pluies, synonyme chaque année d’épidémies de paludisme et autres maladies tropicales. 

Mais cette année, les humanitaires, qui avant la guerre venaient en aide à un tiers des 45 millions de Soudanais, pourraient ne pas être là. Dix-huit d’entre eux ont été tués et aucun corridor sécurisé n’a été dégagé pour leur permettre d’apporter leur aide. 

Leurs cargaisons arrivées par les airs sont bloquées aux douanes. Et le personnel international se voit refuser les visas pour venir relever des employés locaux exténués ou terrés chez eux par peur des balles perdues. 

Car ils sont également des cibles : «57 de leurs entrepôts et 55 de leurs bureaux ont été pillés et 115 de leurs véhicules volés», rapportent Washington et Riyad. La situation est «catastrophique» à tous les niveaux, répète inlassablement l’ONU : trois quarts des hôpitaux ont cessé de fonctionner et le quart restant doit composer avec des réserves quasiment vides. 

Vingt-cinq millions de personnes ont besoin d’aide et la moitié des 350 000 réfugiés, pour beaucoup partis sans rien, se retrouve dans des pays eux-mêmes en proie à des crises et des violences. 

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