Golfe d’Aden au Yémen : Les Houthis revendiquent une nouvelle attaque contre un navire

20/02/2024 mis à jour: 16:11
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Ces attaques ont poussé de nombreux armateurs à décider en 2024 de contourner, dans la durée, l’Afrique

Les Houthis du Yémen ont indiqué hier avoir frappé un navire britannique dans le golfe d’Aden, la société de sécurité maritime Ambrey ayant signalé dans la nuit une attaque contre un navire immatriculé au Royaume-Uni. Les Houthis ont pris pour cible «un navire britannique dans le golfe d’Aden, le Rubymar, avec des missiles navals», a déclaré leur porte-parole militaire, Yahya Saree, dans un communiqué, cité par l’AFP. 

La société Ambrey a signalé l’attaque d’un «vraquier battant pavillon bélizien, immatriculé au Royaume-Uni et exploité par le Liban» dans le détroit de Bab Al Mandeb, qui relie la mer Rouge au golfe d’Aden. Le navire se dirigeait vers le nord depuis les Emirats arabes unis et a pour destination finale la ville bulgare de Varna. L’agence britannique de sécurité maritime UKMTO a indiqué qu’un navire se trouvant à 35 milles nautiques (65 kilomètres) du port yéménite de Mokha a signalé «une explosion à proximité qui a causé des dommages». L’UKMTO a confirmé plus tard que l’équipage a évacué le navire et était sain et sauf. Les Houthis ont affirmé qu’ils s’étaient assurés que «l’équipage du navire était sorti sain et sauf». 

Lundi, Ambrey a fait état d’informations selon lesquelles l’équipage du navire «a été secouru par un autre navire marchand». Le porte-parole militaire des Houthis a affirmé que le navire «risque de couler dans le golfe d’Aden» après avoir subi «d’importants dégâts» lors de l’attaque. Mais Ambrey dit avoir noté un schéma de dérive au cours des jours précédents, entre les 16 et 18 février, «compatible avec une panne de moteur», ajoutant que «les causes de l’arrêt du navire n’étaient jusque-là pas claires». 

De son côté, l’Union européenne (UE) a lancé hier sa mission de protection du trafic maritime en mer Rouge, a annoncé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. 

Plusieurs pays ont fait part de leur intention de participer à cette mission, baptisée Aspides (bouclier en grec ancien), dont la Belgique, l’Italie, l’Allemagne et la France. L’Espagne a indiqué qu’elle n’y participerait pas. «L’Europe va assurer la liberté de navigation en mer Rouge, en coordination avec nos partenaires internationaux», s’est félicitée Mme von der Leyen, sur X (ex-Twitter). 

Cette mission a été officiellement lancée par les ministres des Affaires étrangères de l’UE réunis à Bruxelles. «Nous venons d’approuver le lancement de l’opération militaire navale Aspides, dont l’Italie aura le commandement des forces», a confirmé de son côté le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, sur X. La mission est prévue pour un an, éventuellement renouvelable. 

Cela ne signifie pas qu’elle sera immédiatement opérationnelle : il appartiendra à son commandement de déterminer quand elle disposera de ressources suffisantes pour être totalement opérationnelle, ce qui devrait prendre «quelques semaines», selon un diplomate européen. La frégate allemande Hessen est partie le 8 février en direction de la mer Rouge, avec un équipage de quelque 240 personnes. Elle sera en état d’alerte permanent et pourra répondre à d’éventuelles attaques avec des missiles, drones et «bateaux kamikazes» télécommandés.

La Belgique a, elle, annoncé son intention d’envoyer sa frégate Marie-Louise. La France s’est dite prête à mettre l’une de ses frégates déjà présente en mer Rouge à disposition de la mission Aspides. Les Vingt-Sept se sont mis d’accord dès janvier sur le principe d’une mission de surveillance et de patrouille maritime en mer Rouge, à condition toutefois que son mandat soit purement défensif. 

La Grèce assurera le commandement général de cette mission et l’Italie le commandement opérationnel en mer, a-t-on expliqué vendredi de source diplomatique européenne. Elle pourra faire feu pour défendre les navires marchands ou se défendre elle-même, mais ne pourra pas viser des objectifs à terre contre des positions des Houthis au Yémen, selon des diplomates. 

Les Houthis, qui contrôlent de vastes régions du Yémen, affirment mener ces attaques en solidarité avec les Palestiniens dans la Bande de Ghaza, où Israël mène une guerre sanglante contre le Hamas palestinien en représailles à l’attaque sans précédent du 7 octobre sur le sol israélien. 

Les revenus du canal de Suez en baisse

Ces attaques ont déclenché des frappes de représailles de la part des forces américaines et britanniques au Yémen, dont la dernière a eu lieu samedi. Les Houthis ont également dit avoir abattu un avion américain MQ-9, affirmation à laquelle Washington n’a pas encore répondu. 

Par ailleurs, le président égyptien, Abdel Fattah Al Sissi, a annoncé hier que les revenus du canal de Suez, l’une des principales rentrées en devises du pays, ont «baissé de 40 à 50%» depuis le début de l’année après les attaques des Houthis. 

Ces attaques ont poussé de nombreux armateurs à décider en 2024 de contourner dans la durée l’Afrique et à suspendre les passages par la mer Rouge et le canal de Suez, par où transitent habituellement 12 à 15% du trafic mondial, selon l’UE. «Vous voyez ce qui se passe à nos frontières (...) avec Ghaza, vous voyez le canal de Suez qui rapportait à l’Egypte près de 10 milliards de dollars par an, (ces revenus) ont baissé de 40 à 50% et l’Egypte doit continuer à payer des entreprises et des partenaires», a déclaré Al Sissi lors d’une conférence aux côtés de compagnies pétrolières. 

L’immense ouvrage inauguré en 1869 a rapporté sur l’année fiscale 2022-2023 environ 8,6 milliards de dollars à l’Egypte, une manne dans un pays où importateurs et changeurs peinent désormais à trouver des dollars. Dans le pays qui traverse la pire crise économique de son histoire, les revenus du canal sont aussi surveillés que les revenus du tourisme et les envois d’argent des travailleurs égyptiens à l’étranger.

Le volume commercial transitant par le canal de Suez a diminué de 42% ces deux derniers mois, selon l’ONU, inquiète des répercussions pour l’ensemble du commerce mondial. Et le nombre hebdomadaire de transit de porte-conteneurs a baissé de 67% sur un an. La baisse du transit des pétroliers est elle de 18%, celle des cargos de vrac (grain, charbon, entre autres) de 6% et les transports de gaz sont à l’arrêt.
 

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