Francfort (Allemagne) : Procès pour crimes contre l’humanité d’un médecin syrien

20/01/2022 mis à jour: 06:59
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Alaa Moussa, un médecin syrien accusé de crimes contre l’humanité, parle avec son avocat à l’ouverture de son procès le 19 janvier 2022 à Francfort / Photo : D. R.

Le procès pour crimes contre l’humanité d’un médecin syrien, accusé d’avoir torturé des prisonniers et tué au moins un opposant, s’est ouvert mercredi à Francfort, confirmant le rôle de premier plan de la justice allemande dans la poursuite des exactions commises par le régime de Bachar al-Assad en Syrie.

Alaa Moussa, âgé de 36 ans, est arrivé à 9h00 GMT menotté dans le box des accusés. Vêtu d’un manteau vert foncé à capuche avec fourrure, tirée vers le bas pour cacher son visage, il a gardé la tête baissée pendant les prises de vue, échangeant quelques mots avec son avocat avant la lecture de l’acte d’accusation.

Le parquet fédéral le poursuit pour «crimes contre l’humanité» au nom de la compétence universelle de l’Allemagne. Ce principe juridique a permis la semaine dernière la condamnation à vie d’un ancien gradé syrien dans un autre procès, le premier de ce type en Allemagne.

Arrêté en juin 2020 dans la Hesse (ouest de l’Allemagne), Alaa Moussa est jugé devant le tribunal régional de Francfort pour 18 cas de torture d’opposants au régime syrien et pour le meurtre par injection d’un détenu. Il encourt la prison à vie.

Le médecin, qui nie fermement les faits reprochés, aurait commis ces exactions présumées dans deux hôpitaux militaires à Homs, dans le centre de la Syrie, et à Damas.

Des actes qui illustrent, selon des opposants au régime, l’utilisation de ces établissements sanitaires dans la répression. Le médecin aurait aussi sévi dans une prison des renseignements militaires syriens entre avril 2011 et fin 2012 à Homs, bastion de l’opposition au régime au début du soulèvement populaire qui avait tourné à la guerre civile.

«Violence sexuelle»

A un détenu qu’il avait frappé avec une matraque, le médecin aurait ensuite «administré une injection avec une substance létale (...) dont il est mort en quelques minutes», selon le parquet spécialisé de Karlsruhe.

Ce procès doit notamment «montrer que les hôpitaux militaires étaient, et sont probablement toujours, intégrés dans la lutte systématique contre la société civile syrienne, en complément des prisons des services secrets», explique à l’AFP un avocat des parties civiles, Me René Bahns.

L’accusé est également soupçonné, au cours de l’été 2011, année du déclenchement du soulèvement en Syrie, d’avoir aspergé d’alcool avant d’y mettre le feu les parties génitales d’un adolescent dans la salle d’urgence de l’hôpital militaire de Homs. Ces sévices prouvent, selon M. Bahns, «l’importance de l’utilisation de la violence sexuelle» dans la répression en Syrie.

Les opposants torturés ont subi, selon les cas, coups à la tête, au ventre, dans les parties génitales, sur des blessures. Le médecin aurait procédé à la correction d’une fracture osseuse sans anesthésie, arrosé une plaie avec un désinfectant contenant de l’alcool, avant d’y mettre le feu, selon des éléments recueillis par la justice.

L’accusé a quitté la Syrie mi-2015 pour rejoindre l’Allemagne grâce à un visa délivré par l’Allemagne aux Syriens exerçant certaines profession «en pénurie», dont la médecine. Chirurgien orthopédique, Alaa Moussa a exercé dans plusieurs établissements hospitaliers avant d’être reconnu par des réfugiés syriens.

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