Au moment où l’Etat déploie d’énormes efforts pour la numérisation des différents secteurs, des établissements censés former une main-d’œuvre qualifiée ne sont pas connectés au réseau d’internet.
Avec ses 46 établissements (25 publics et 21 privés) accueillant chaque année des centaines d’apprenants, le secteur de la formation et de l’enseignement professionnels dans la wilaya de Constantine se présente comme un pilier stratégique pour répondre aux besoins économiques croissants du marché algérien en main-d’œuvre qualifiée.
Cependant, malgré des avancées notables par rapport à l’année 2023, des lacunes persistantes continuent d’entraver son plein essor, comme l’a relevé la commission de l’Assemblée populaire de wilaya (APW) de Constantine. L’un des manquements cruciaux identifiés est l’accès limité, voire inexistant au réseau d’internet dans plusieurs centres, alors même que l’Etat algérien déploie d’énormes efforts pour la numérisation des différents secteurs.
Selon le rapport de la commission, «la couverture internet est insuffisante, voire absente dans certains centres». Parmi les exemples édifiants cités figure le cas de l’institut national spécialisé en formation professionnelle Zitouni Abdelmadjid à la nouvelle ville Ali Mendjeli, située à 25 km au sud de Constantine, où le service internet fait totalement défaut dans l’atelier d’informatique.
C’est la même situation pour le centre de formation professionnelle Salah Lebsir à Aïn Smara, également dépourvu de connexion. A l’institut Mohamed Ayache à El Khroub, l’absence de cette commodité très importante dans le cursus des stagiaires constitue un véritable frein dans l’apprentissage, alors que l’accès au numérique est désormais incontournable dans le cadre de la formation.
Dans son rapport, la commission de l’APW préconise des mesures concrètes : «équiper les établissements en moyens techniques et pédagogiques modernes répondant aux standards technologiques, connecter les centres à la fibre optique et leur fournir des ordinateurs intelligents, tout en exploitant les technologies de communication avancées telles que la 4G».
Par ailleurs, la généralisation de l’enseignement en ligne à l’ensemble des établissements est jugée impérative face à une formation professionnelle qui peine encore à atteindre les objectifs escomptés en termes d’intégration des nouvelles technologies.
Des infrastructures saturées et inadaptées
En matière d’équipements, des carences notables ont également été relevées. Par exemple, l’institut de l’enseignement professionnel Mohamed El Amri Mezaouri à Ali Mendjeli manque d’équipements mécaniques adéquats. Quant au centre Ahmed Boudarmine à la cité Loucif dans la ville de Constantine, il dispose d’un atelier d’électronique automobile moderne, mais inutilisé.
En outre, les infrastructures informatiques exigent une mise à jour pour intégrer des dispositifs adaptés aux évolutions technologiques. Bien que certains établissements bénéficient de projets de réhabilitation, la surcharge dans des centres reste une problématique majeure.
En termes de capacité réelle, il a été constaté que les centres et instituts de formation atteignent une capacité pédagogique effective de 6629 places, comparée à une capacité théorique de 10 120 places.
Ce chiffre est encourageant par rapport au nombre de candidats inscrits lors de la session d’octobre 2023.
«Cependant, un problème de surpopulation a été signalé dans certains centres, notamment au centre de formation professionnelle Mohamed Arfaoui, situé à Bellevue, où certaines spécialités ont connu une forte affluence de jeunes souhaitant se former», est-il mentionné dans le rapport de la commission de l’APW. Le retard dans l’achèvement de certains projets, tels que la reconstruction de chalets préfabriqués, aggrave encore la situation, forçant les ateliers à être utilisés comme des salles de classe.
La commission recommande ainsi «la reprise des projets suspendus, notamment celui de l’institut de 300 places pédagogiques et 60 lits à Ali Mendjeli, dont le taux des travaux est à 5%, et la création de nouveaux centres dans des zones de forte expansion, telle l’extension ouest de Ali Mendjeli dépendant de la commune d’Aïn Smara comptant environ 100 000 habitants, où les besoins dépassent largement les capacités existantes».
La commission a également suggéré de réorienter les équipements et les outils pédagogiques mobilisés auparavant dans les internats placés sous la tutelle de la direction de l’éducation, afin de les mettre à la disposition du secteur de la formation professionnelle.
Cette réaffectation s’inscrirait dans le cadre des accords établis entre ces deux secteurs. Elle propose, par ailleurs, la création d’espaces d’accompagnement ainsi que de structures dédiés à l’entrepreneuriat au sein de l’ensemble des centres et instituts de formation professionnelle, dans le but d’encadrer et de soutenir les diplômés de ce secteur.
Il est également envisagé de transformer l’annexe unique de formation professionnelle Touabi Mohamed, située dans la commune de Béni Hmidene, en un véritable centre de formation professionnelle doté d’équipements modernes adaptés aux spécialités telles que la couture et la pâtisserie, tout en élargissant l’offre à de nouvelles disciplines. Une démarche similaire doit être prévue pour le centre de formation professionnelle de la commune d’Ouled Rahmoune, qui, à ce jour, ne propose que deux spécialités.
Manque d’encadrement administratif
Un autre défi majeur réside dans le manque d’encadrement administratif. Si le volet pédagogique (enseignants, formateurs et conseillers) est globalement satisfaisant, des lacunes importantes subsistent en termes de personnel administratif et technique.
Une exception a été relevée à l’institut national spécialisé en formation professionnelle Hamada Ben Rajem à Zighoud Youcef, inauguré le 28 octobre, où l’absence quasi totale d’encadrement pédagogique nécessite un recrutement rapide. Selon le programme de la direction concernée, ce recrutement est prévu prochainement.
Pour remédier aux différentes insuffisances soulevées, la commission plaide pour un renforcement de la coopération entre les instituts et les entreprises, afin de répondre aux besoins locaux en compétences, tout en facilitant la transition entre l’éducation formelle et la formation professionnelle.
Elle recommande également de diversifier les spécialités offertes et de promouvoir des campagnes de sensibilisation pour mieux orienter les jeunes. Une attention particulière doit être portée à l’adaptation des spécialités aux spécificités économiques régionales et à l’implication des opérateurs économiques dans l’élaboration des programmes. Il a été jugé également impératif d’anticiper les besoins futurs de la wilaya en intégrant, de manière périodique et proactive, des offres de formation adaptées aux nouveaux métiers en émergence.
Par ailleurs, il est crucial de stimuler la participation des entreprises économiques en les incitant à accueillir des apprenants dans le cadre des stages pratiques. Ces initiatives devraient s’accompagner de programmes de formation adaptés. Enfin, il s’avère nécessaire de mettre en place «une commission de suivi placée sous l’égide de la direction de la formation professionnelle», dont la mission serait de contrôler les diverses entités telles que les centres privés, associations et académies, qui délivrent des certifications non homologuées et non reconnues pour l’emploi.