L’artiste peintre Fella Tamzali présente une exposition personnelle intitulée «Arcanes», à la galerie d’art privée Rhizome, à Alger.
Cette artiste peintre au talent invétéré expose pour la première fois des peintures réalisées entre 2022 et 2024, auxquelles s’ajoute La Course, créée en 2020 et que l’artiste considère à l’origine de la série présentée. Fella Tamzali est née en 1971 à Alger. Elle est diplômée en architecture de l’École polytechnique d’architecture d’Alger depuis 1995.
Elle travaille en tant qu’architecte jusqu’à son entrée aux Beaux-Arts d’Alger en 2008 et y obtient son diplôme en 2013. En 2014 puis en 2016, elle participe à deux éditions de l’exposition-événement collective Picturie Générale à Alger. En 2015, elle figure dans l’exposition inaugurale des Ateliers sauvages à Alger.
Elle participe à de nombreuses expositions collectives notamment à la 11e Biennale de Dakar (2014) ; à la galerie MEKIC, Montréal (2017) ; à la Biennale de Rabat commissariée par Abdelkader Damani (2019) ; à deux éditions de l’exposition Waiting for Omar Gatlato, commissariée par Natasha Marie Llorens à la Wallach Art Gallery à New York (2019) et à la Friche de la Belle de Mai à Marseille (2021) ; à l’exposition Desirerare aux Ateliers sauvages, Alger (2020) et à The Unamed à Overgarden, Copenhague (2020).
La commissaire de l’exposition en question Beya Othmani explique dans une présentation que Fella Tamzali à ses débuts peignait des intérieurs, place désormais ses figures dans des espaces ouverts, ici dans les bois. La commissaire estime que l’exposition marque un tournant créatif de l’artiste, dans la mesure où elle utilise pour la première fois le médium vidéo.
Preuve en est : l’exposition s’ouvre sur un diptyque vidéo intitulé Pistes (2024). Toujours selon la commissaire de cette exposition, l’artiste Fella Tamzali conçoit ses vidéos comme des tableaux animés. «Une figure dont on ne voit que les jambes et les pieds dénudés qui foulent mécaniquement une boue ; répétant à intervalle différent la même scène, une pierre qui plonge dans l’eau.
Ce diptyque, placé à l’entrée de l’exposition, fait partie d’un corpus d’œuvres ayant pour thème l’eau, thème qui apparaît de façon cyclique dans la création de Tamzali. Le recours à la symbolique de l’eau rappelle les rituels de purification accompagnant les rites de passage. Dans sa volonté d’évoquer la transition, le choix des gestes n’est pas le fait du hasard tant la chute du caillou que le foulage d’une terre liquide évoquent l’intention de se débarrasser d’un poids, de se dépêtrer de quelque chose qui empêche le mouvement».
Et d’ajouter : «Ses peintures intimistes, développées sur un temps long participent d’une exploration profonde de ses émotions, ne divulguant cependant jamais les tourments intimes de l’artiste.» Cette tension entre l’image fabriquée, apparente et mise en scène et une trame viscérale et cachée, traverse singulièrement Arcanes. Au préalable du geste est toujours pour l’artiste une image persistante et révélée. Ces images sont inconsciemment développées se nourrissent de vécu, d’émotions et de souvenirs.
Dans sa première peinture intitulée La Course (2020) réalisée dans le cycle de la forêt, l’artiste Fella Tamzali introduit les thèmes de la chasse et de la traque qui se déclinent au fur et mesure des peintures présentées.
Le décor est implanté : l’œil du visiteur est face à une clairière, à l’orée d’une forêt. Un personnage féminin et juvénile à la fois semble être rattrapé en pleine course par un homme. En face, retenu par des mains, un cheval tente de les rejoindre. La femme et l’animal sont capturés à main nue et arrêtés en plein élan. Dans L’œuvre Hide and Seek (2022-2023), constituée de trois huiles sur toile, est au centre de l’exposition.
Même si l’artiste choisit de rester secrète quant à la part de vécu qui infuse ces images, elle admet avoir été marquée par une série d’œuvres de Botticelli et la singulière cruauté des scènes représentées. Hide and seek emprunte à l’œuvre de Botticelli son format à une échelle monumentale ainsi que le motif de la pinède, ancrant ainsi la scène sur les bords de la Méditerranée.
Tandis que Hide and seek et La Course mettent en scène des êtres poursuivis par d’autres ou qui se cherchent, Le Chasseur (2022-2023) et Enfant au Cheval de Bois (2022) incarnent l’univers du chasseur. L’exposition se referme sur une série de sept petites aquarelles sur papier présentées pour la première fois par l’artiste.
«Cette technique lui permet de réaliser des études et d’intercepter plus rapidement les images furtives révélées par son inconscient. Cette série inaugure une nouvelle phase de création où sont représentées des figures seules, en couple ou en compagnie d’un animal et où il n’est plus question de chasse. L’artiste continue cependant à produire des scènes en extérieur quand les figures ne sont pas placées sur des fonds abstraits.
Dans ces aquarelles, la forêt s’offre maintenant en sanctuaire. De ces images évanescentes et apaisées, l’artiste en retient deux, verticales, mettant en scène des fillettes jouant en extérieur et sur lesquelles s’achève Arcanes», note la commissaire Beya Othmani.