L’indépendantiste catalan Carles Puigdemont a fixé, hier, ses conditions à un éventuel soutien de son parti à la reconduction au pouvoir, en Espagne, de Pedro Sánchez en réclamant, avant toute chose, l’«amnistie» des indépendantistes poursuivis par la justice, rapporte l’AFP.
S’exprimant devant la presse à Bruxelles, C. Puigdemont, figure centrale de la tentative de sécession de la Catalogne en 2017, a notamment exigé «l’abandon complet et effectif de la voie judiciaire contre le mouvement indépendantiste» via «une loi d’amnistie» afin d’«éviter de nouvelles élections». «Aucune de ces conditions préalables n’est contraire à la Constitution (espagnole) et ne requiert un long processus» au Parlement, a assuré l’ancien président régional catalan, qui est lui-même réclamé par la justice espagnole
et qui a fui, en 2017, en Belgique pour échapper aux poursuites. Une fois cette condition et d’autres remplies, comme l’instauration d’un «mécanisme» permettant de garantir que ces demandes soient respectées, C. Puigdemont appelle à l’ouverture de négociations, en vue de parvenir à un «accord historique» sur l’avenir de la Catalogne.
Un accord qui doit passer, selon lui, par l’organisation d’un référendum d’autodétermination que le gouvernement espagnol refuse au motif qu’il est contraire à la Constitution espagnole. «Existe-t-il un chemin différent de l’indépendance pour garantir la survie de la Catalogne comme nation ? Toutes les preuves accumulées depuis des décennies ont montré que non», a encore affirmé C. Puigdemont.
Arrivé derrière son rival conservateur Alberto Nunez Feijoo, lors des législatives du 23 juillet, Pedro Sanchez est paradoxalement celui qui a le plus de chance de parvenir à rassembler autour de lui une majorité, afin d’être reconduit au poste de Premier ministre. Mais il a besoin, pour cela, des voix des sept députés du parti de C.
Puigdemont, Ensemble pour la Catalogne (Junts per Catalunya), qui ont déjà voté mi-août pour sa candidate, la socialiste Francina Armengol, lors de l’élection à la présidence de la Chambre des députés. Propulsé dans un rôle inattendu de faiseurs de rois, C. Puigdemont est courtisé depuis le scrutin par la gauche, comme l’a prouvé, lundi dernier, la visite de la numéro trois du gouvernement Sanchez, Yolanda Diaz, à Bruxelles, pour le rencontrer.
Cette visite est la première rendue à C. Puigdemont par un membre du gouvernement depuis son départ d’Espagne en 2017. Réagissant aux conditions avancées par l’indépendantiste, la porte-parole du gouvernement, Isabel Rodriguez, a assuré qu’un «monde» le «séparait» des socialistes et promis que tout «dialogue» entrerait dans «le cadre de la Constitution».
Partisan de l’apaisement en Catalogne, Pedro Sanchez a gracié, en 2021, les indépendantistes catalans condamnés à la prison pour leur rôle dans la tentative de sécession mais s’est prononcé, par le passé, contre une amnistie. Il a toutefois insisté, lundi, sur le fait qu’il est temps de «tourner la page» par rapport aux «erreurs du passé» commises dans la gestion de la crise catalane, sans dévoiler ce qu’il était prêt à accorder aux indépendantistes.
Les possibles concessions de P. Sanchez aux séparatistes catalans ont été critiquées, hier, par l’ex-Premier ministre socialiste Felipe Gonzalez qui a jugé sur la radio Onda Cero que «l’amnistie et l’autodétermination n’étaient pas compatibles avec la Constitution». Droite et extrême droite ont tiré, pour leur part, à boulets rouges sur les conditions fixées par C.
Puigdemont. «Les exigences de Puigdemont (...) sont celles d’un délinquant et d’un fugitif», a dit, de son côté, le chef du parti d’extrême droite Vox, Santiago Abascal. Vainqueur des législatives, N. Feijoo a été chargé par le roi Felipe VI de présenter, fin septembre, sa candidature au poste de Premier ministre devant le Parlement. Mais ses chances sont infimes. Après l’échec attendu du chef du Parti populaire, P. Sanchez disposerait de deux mois pour tenter, à son tour, d’être investi. S’il n’y parvenait pas, de nouvelles élections seraient convoquées, probablement à la mi-janvier.