Inspiré du «Brexit» avec la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, les partisans de ce divorce considèrent qu’il permettrait de résoudre un afflux migratoire à la frontière avec le Mexique, au cœur d’un bras de fer avec le gouvernement fédéral de Washington.
«On sait qu’ici, au Texas, le seul moyen de sécuriser la frontière et d’avoir un système d’immigration censé est de faire comme 200 autres pays dans le monde et avoir un pays avec un gouvernement indépendant et autonome», affirme à l’AFP Daniel Miller, président du Texas Nationalist Movement. Selon lui, le mouvement, créé en 2005, n’a jamais été aussi proche d’atteindre son but.
En 1836, le Texas accédait à l’indépendance après une révolution qui opposait le Mexique, dont il dépendait, à des coalitions de colons. Neuf ans plus tard, il devenait le 28e Etat des Etats-Unis. Pour Daniel Miller, le Texas partage une histoire et des intérêts avec le reste des Etats-Unis, mais, dit-il, le gouvernement fédéral ne comprend pas leurs problèmes.
Le souhait des indépendantistes ? Que leur Etat adopte une loi autorisant un référendum pour leur indépendance, ce que la Constitution américaine ne permet pas. Et la plaie de la sanglante guerre de Sécession (1861-1865), qui a vu s’affronter les Etats du Nord et les Etats du Sud esclavagistes se battant pour leur indépendance, dont le Texas, n’est pas cicatrisée.
«Plus Texan qu’Américain»
Le mouvement sécessionniste au Texas existe depuis longtemps, mais reste marginal, selon Joshua Blank, directeur de recherche à l’université du Texas. La fronde menée par le gouverneur républicain Greg Abbott, proche de Donald Trump, contre l’administration de Joe Biden, a «créé une situation qu’ils (les indépendantistes) cherchent à exploiter afin de rendre leur position plus en vue et plus plausible qu’elle ne l’est vraiment», observe le chercheur.
Lors d’un rassemblement dans un restaurant de barbecue typique du Texas, Misty Walters, femme au foyer d’une cinquantaine d’années, lance : «On est simplement en train d’être envahis», en référence au record des 2,5 millions de personnes qui ont traversé la frontière avec le Mexique en 2023.
Un sujet brûlant de la campagne pour l’élection présidentielle, alors que Donald Trump et Joe Biden, qui, sauf surprise, s’affronteront de nouveau en novembre. «Le Texas doit hausser la voix et mieux protéger ses citoyens», fait valoir Misty Walters, persuadée qu’une majorité des habitants se sentent «plus Texans qu’Américains».
Un sondage publié ce mois-ci par le Texas Politics Project montre pourtant que seuls 26% de ses résidents se sentent avant tout Texans. Un chiffre stable : il y a dix ans, ils étaient 27%. «Et même dans ce cas, cela ne signifie pas que les 26% sont en faveur d’un divorce sanglant avec les Etats-Unis», souligne l’analyste Joshua Blank.
Le mouvement séparatiste est alimenté par «l’idée qu’il existe une culture américaine homogène liée aux Blancs», ajoute-t-il. «Et la crise à la frontière accroît les peurs des citoyens qui partagent plutôt cette vision de la culture américaine.»
«Impossible sécession pacifique»
Dans la ville d’Eagle Pass, dans le sud du Texas, le gouverneur Greg Abbott a fait installer des barbelés le long de la frontière et a pris le contrôle militaire d’une zone appelée Shelby Park, le long de la rivière Rio Grande, s’érigeant ainsi contre le gouvernement fédéral. L’administration Biden a quant à elle lancé une procédure judiciaire contre le Texas, rappelant que le contrôle aux frontières a toujours été une compétence fédérale.
Le leader du mouvement indépendantiste Daniel Miller y voit le symbole «d’une relation rompue entre le gouvernement fédéral et les Etats». Mais contrairement à la révolution contre le Mexique, les partisans de l’indépendance pensent qu’ils peuvent l’acquérir pacifiquement.
Peu probable, selon le chercheur Joshua Blank : «Le Texas ne pourra pas faire sécession pacifiquement. Les Etats-Unis ne négocieraient pas d’une manière qui lui soit favorable.»