En Californie, les ventes d’armes à feu se poursuivent sans complexe après les tueries

31/01/2023 mis à jour: 07:04
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La foire aux armes à feu est située à 30 minutes de voiture du Star Ballroom Dance Studio, le site de la fusillade de masse qui a coûté la vie à 11 personnes et en a blessé 10 autres lors du réveillon du Nouvel An lunaire à Monterey, en Californie

Entre les montagnes de munitions, les fusils soigneusement alignés et les gilets pare-balles, l’effervescence règne à la foire aux armes à feu d’Ontario, en Californie. Rien ne laisserait deviner qu’une semaine plus tôt, le Nouvel an chinois s’est terminé en bain de sang à 50 km de là. Des milliers de personnes ont défilé samedi dans le centre culturel de cette ville située en grande banlieue de Los Angeles, où l’entrée était gratuite pour les moins de 12 ans.  Parmi les dizaines de stands installés pour le week-end, des mères de famille avec poussette lorgnent des mini-pistolets, pendant que de solides gaillards reluquent des fusils semi-automatiques capables d’accueillir différents calibres. Mais malgré les lunettes de précision en vente, bien peu souhaitent s’attaquer à l’éléphant dans la pièce.  Dans une Californie en plein deuil, la plupart des visiteurs refusent d’évoquer les récentes tueries de Monterey Park, banlieue frappée lors du Nouvel an lunaire et située à 30 minutes de voiture à peine, et de Half Moon Bay près de San Francisco, qui ont fait 18 morts la semaine passée. «Personne ne parle des incidents, mais il y a une augmentation des achats cette semaine», confie à l’AFP l’une des vendeuses, Crystal Markanson. «A chaque fois que les médias parlent d’une tuerie de masse, les gens achètent des armes parce qu’ils ont peur qu’elles soient interdites.» Les deux massacres survenus en Californie ont en effet ravivé l’éternel débat autour des armes à feu aux Etats-Unis. Le président Joe Biden a remis sur la table un projet d’interdiction fédérale des fusils d’assaut, qui n’a aucune chance d’être voté à Washington. «Cibler certains types d’armes n’est pas la bonne solution», s’indigne Brett Reeves, sous son chapeau de cowboy. En Californie, où la législation est l’une des plus restrictives du pays, les fusils d’assaut sont déjà interdits depuis plus de 30 ans, observe-t-il. «Et pourtant, nous avons toujours des tueries de masses.»

Carabines, fusils à pompe, pistolets... Sur la dizaine d’armes que ce libertarien possède, aucune n’est officiellement enregistrée: il les a montées lui-même, en combinant différentes pièces achetées séparément dans des foires comme celle d’Ontario. Fort de son expérience, le trentenaire n’a pas été surpris lorsqu’il a appris que l’arme utilisée par le tueur de Monterey Park était illégale.  «Les restrictions incitent les gens à passer sous les radars», juge ce vendeur de climatisations, partisan de l’auto-défense.  «Les psychopathes vont continuer à s’en prendre à des gens innocents», soupire-t-il. Alors pour lui, «le Texas est bien plus sûr (que la Californie), parce que vous pouvez facilement porter une arme là-bas. (...) On doit pouvoir se protéger nous-mêmes contre ces dingues»«Nos lois fonctionnent, les taux de violences par arme à feu en Californie sont bien plus bas que dans le reste du pays», corrige Garen Wintemute, le directeur du centre de recherche sur la prévention de la violence de l’université UC Davis. Mais les Etats-Unis comptent 400 millions d’armes à feu, soit plus que d’habitants, rappelle-t-il, une prolifération inégalée dans le monde.  Contrairement à de nombreux endroits dans le pays, personne ne peut repartir de la foire d’Ontario avec un fusil ou un revolver prêt à l’emploi. Les acheteurs doivent prouver qu’ils ont plus de 21 ans, leur casier judiciaire doit être vérifié et en cas de feu vert, ils doivent attendre 10 jours avant d’acquérir l’arme à feu de leur choix. Grâce à ces restrictions, le risque pour un Californien de mourir dans une tuerie de masse est réduit d’un quart par rapport aux autres Américains, selon l’Institut des politiques publiques de Californie. «Ces tragédies doivent s’arrêter, les gens devraient pouvoir être en sécurité et ne pas se faire tirer dessus», lâche Adolfo Garcia au sortir de la foire, où il vient de faire le plein de munitions pour son fusil semi-automatique.  Mais pour cet ingénieur de 56 ans, passionné de tir et parfaitement en règle, légiférer ne peut pas être la seule réponse, dans un pays où le droit de porter une arme est garanti par la Constitution. «C’est triste à dire, mais d’un point de vue purement légal, je suis plus légitime pour posséder une arme que ma fille pour avorter», soupire cet électeur démocrate.  «Il y a vraiment un problème culturel, et aussi un problème de santé mentale, auxquels nous devons nous confronter», estime-t-il. «Regardez la Suisse, ils ont beaucoup d’armes et on ne voit pas ce genre de tragédies là-bas.»   

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