Elles sont disponibles dans plusieurs quartiers de la ville : A bord des voitures sans conducteur de San Francisco

29/08/2023 mis à jour: 23:09
AFP
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Des trajets autonomes accessibles au public à San Francisco - Photo : D. R.

Les robots-taxis divisent. Des militants écologiques leur reprochent de perpétuer le règne de la voiture individuelle, des associations de personnes handicapéees ne les trouvent pas suffisamment adaptées à leurs besoins, des syndicats craignent la perte d’emplois.  Mais autant de défenseurs de l’environnement, de personnes à mobilité réduite et de salariés voient au contraire cette technologie positive pour leur cause.

Cet été, les piétons de San Francisco se divisent en deux catégories : les habitants habitués, et même blasés, des voitures aux chauffeurs fantômes, et les touristes ébahis, qui cherchent à capturer cette vision de science-fiction sur leur Smartphone. «N’oubliez pas de demander la permission au conducteur», plaisante un passant à l’attention d’un autre, qui filme la voiture autonome dans laquelle vient de monter Katherine Allen, une avocate de 37 ans.

La passagère ferme la porte arrière, et la grosse Jaguar blanche manœuvre avec beaucoup de précaution dans un quartier où affluent piétons et cyclistes. L’avocate teste bénévolement les robots-taxis de Waymo depuis la fin 2021. Au début, il y avait toujours un employé de cette filiale d’Alphabet (maison mère de Google) derrière le volant, par sécurité. Et puis un soir, il y a quelques mois, l’automobile est arrivée toute seule. «J’avoue, j’ai eu peur. Mais pas au point de ne pas monter. C’était excitant aussi», se souvient-elle.

«Pas de bavardage»

«La course a duré une demi-heure. Pendant vingt minutes environ, j’ai vraiment flippé. Et puis soudain, je me suis calmée. C’était... normal. C’était devenu bizarrement normal.» Bardés de caméras et de lidars (des lasers de détection), roulant en silence, les taxis électriques autonomes de Waymo et Cruise (General Motors) ont progressivement investi San Francisco, d’abord avec un humain à l’avant, puis sans durant la nuit, et aussi sans humain désormais en journée au point de s’inscrire dans la banalité du quotidien.

«Quand j’ai commencé à les voir dans mon quartier, je me sentais comme dans un film d’action des années 80, en mode ‘’attention aux robots, écartez-vous !’’» raconte Isaac Smith, père au foyer de 50 ans.  «Et en même temps, je me suis tout de suite dit que ça serait un jour pratique pour envoyer les enfants à l’école.» Mardi, accompagné par l’AFP, il a commandé sa première course sur l’application de Cruise, de nuit. «Percussion», son petit nom, arrive rapidement.

Mais au lieu de prendre le chemin direct, qui aurait emmené ses passagers au supermarché en moins de cinq minutes, elle décide de faire un long détour, sans explication. «C’est fascinant que le volant tourne comme s’il y avait quelqu’un», s’amuse Isaac. «J’imagine qu’ils n’ont pas pris la peine de le retirer pour l’instant.» «En tout cas, je suis impressionné, elle conduit bien», continue-t-il. «Elle ne freine pas brutalement, elle n’accélère pas comme une malade. C’est agréable.»

Le passager finit même par s’ennuyer, et s’essaie au quiz de culture générale que propose l’écran devant lui. Mais il n’est pas d’accord avec la réponse sur le meilleur sandwich mexicain de San Francisco. «C’est une bonne conductrice, mais elle n’y connaît rien en burrito», tranche Isaac. Vingt minutes et une dizaine de questions plus tard, Percussion arrive enfin à destination.

Elle se gare assez loin du magasin, probablement à cause des travaux sur la route. Pas de quoi décourager Isaac : «C’était génial. J’adorerais le refaire», assure-t-il. «Pas de bavardage avec le chauffeur, pas de musique intempestive à la radio (...) Parfait pour les asociaux comme moi !» Dans sa Waymo, à l’heure de pointe, Katherine Allen n’avance plus. Elle vient de tester le bouton d’arrêt d’urgence, et la voiture s’est arrêtée au bord du trottoir, mais peine à se réinsérer dans la circulation. Les véhicules conduits par des humains la dépassent, ignorant son clignotant. L’ordinateur de bord «est très prudent, ce qui agace les autres conducteurs», constate Mme Allen, appréciant le calme d’une voiture qui «ne risque pas de s’énerver».

Jusqu’à présent, la plupart des incidents répertoriés concernent des véhicules arrêtés sur la route, bloquant la circulation. Les autorités routières ont néanmoins demandé à Cruise de réduire de moitié sa flotte à San Francisco (50 automobiles actives le jour et 150 la nuit), le temps d’enquêter sur deux collisions survenues la semaine dernière, dont une avec un camion de pompier.

Les robots-taxis divisent. Des militants écologiques leur reprochent de perpétuer le règne de la voiture individuelle, des associations de personnes handicapées ne les trouvent pas suffisamment adaptées à leurs besoins, des syndicats craignent la perte d’emplois.  Mais autant de défenseurs de l’environnement, de personnes à mobilité réduite et de salariés voient au contraire cette technologie positive pour leur cause.

Et la demande est là : Waymo dit avoir plus de 100 000 personnes sur liste d’attente. Après avoir profité de nombreuses courses gratuites, Mme Allen doit désormais payer. Va-t-elle continuer à utiliser Waymo ? «Je pense que je comparerai Uber et Waymo. Cela dépendra du prix et du temps... les voitures autonomes sont quasiment toujours plus lentes.» 

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