Éleveurs laitiers de Boumerdès : L’aide publique tarde à arriver

08/06/2022 mis à jour: 01:09
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Photo : D. R.

Considéré comme le principal bassin laitier de la région centre du pays, la région de Baghlia perd lentement de sa vocation.

Les éleveurs laitiers de la wilaya de Boumerdès changent d’activité l’un après l’autre. Le peu qui ont gardé leur cheptel et résistent encore aux aléas du temps et de la cherté de l’aliment de bétail lancent un énième cri de détresse en direction des autorités pour leur venir en aide.

Certains affirment que même la prime de 12 DA accordée par l’Etat pour chaque litre de lait vendu pour les usines de transformation tarde à arriver. «Il sont des centaines d’éleveurs à attendre le versement de cette aide. Il y a ceux qui produisent jusqu’à 120 litres par jour. L’Etat doit leur verser une moyenne de 30 millions de centimes par mois, mais ils n’ont rien perçu depuis janvier dernier», s’indigne un éleveur d’Afir.

Ce problème n’a fait qu’aggraver les difficultés de cette frange qui travaille durement pour maintenir leur activité, indique Argoub Tayeb, président de l’association des éleveurs de vaches laitières dans la région de Baghlia et ses environs. «La prime de 12 DA nous est d’un grand apport notamment après l’augmentation des prix de l’aliment qui sont passés de 2500 à 8000 DA/q.

Ces augmentations ont touché même le son, cédé à plus de 4000 DA sur le marché noir alors que son prix est plafonné à 1800 par l’Etat», déplore-t-il. M. Argoub confie que lui aussi a des créances ; elles datent de 2015 et souligne n’avoir pas été payé pour huit mois. «Après moult tracasseries, j’ai fini par abandonner. Et je ne suis pas le seul. Tout le monde sait que l’éleveur ou l’agriculteur n’aiment pas les démarches administratives.

Malgré cela, parfois on met plus de 2 mois pour lui  délivrer la carte fellah ou autre attestation», s’offusque-t-il. Interrogé, un responsable à la Chambre d’agriculture de la wilaya parle de 800 éleveurs environ sur les 1100  ayant adhéré au dispositif de la collecte qui n’ont pas encore reçu la prime en question. «Les retards de paiement sont d’ordre bureaucratique. Il  faut avouer aussi que beaucoup d’éleveurs ne déposent pas leurs dossiers administratifs à temps pour percevoir l’aide», explique-t-il.

Considéré comme le principal bassin laitier de la région centre du pays, la région de Baghlia perd lentement de sa vocation. Ce constat amer se vérifie notamment à travers la baisse continue du nombre d’éleveurs et de la production de lait.

«Il y a quatre ans, notre région comptait plus de 4000 éleveurs. Il reste à peine 1500 et la plupart trouvent des difficultés à nourrir leur cheptel. Tout cela a fait que la production a baissé de moitié en l’espace de trois ans, atteignant 13 millions de litres en 2021», a-t-il noté.

En dépit des dernières mesures du ministère de l’Agriculture visant à réduire les prix de l’aliment, les fermiers de la région restent sceptiques quant à l’avenir de la filière. «Le ministre a décidé de réserver 60% du son pour les éleveurs. Et le reste qui va le récupérer ? 

Aujourd’hui, la vache a droit à 4 kg uniquement de son subventionné, alors que les  génisses en sont totalement exclues. Pour développer la filière lait, l’Etat doit s’attaquer aux spéculateurs, réglementer le prix du son ou interdire sa vente aux grossistes», préconise un autre éleveur, obligé de contracter des dettes pour nourrir ses vaches.

Aujourd’hui, même les collecteurs de lait vivent dans l’incertitude à cause de la chute de la production et l’insuffisance de la marge bénéficiaire fixée à 5 DA/l par l’Etat. En l’absence de plan de relance de la filière, beaucoup ont changé activités.

 

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