Dr Elias Akhamouk. Infectiologue spécialiste des maladies tropicales : «Le premier cas de Mpox peut venir d’Alger ou In Guezzam»

25/08/2024 mis à jour: 01:33
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Photo : D. R.

Pour le Dr Elias Akhamouk, infectiologue, spécialiste des maladies tropicales et chef de service des maladies infectieuses à l’hôpital de Tamanrasset, le nouveau variant de la Mpox est plus contagieux que l’original et trois fois plus mortel que le virus Covid-19. Dans l’entretien qu’il nous a accordé, il avertit qu’un cas de  Mpox «peut venir d’Alger comme de In Guezzam», en signalant qu’au Niger, deux cas suspects viennent d’être signalés. Il revient aussi sur les cas de contamination d’enfants par le virus West Nile In Salah et Adrar avant de plaider pour «un organisme de veille sanitaire opérationnel à tout moment comme l’est notre ANP, en matière de sécurité. C’est-à-dire, détecter toute menace partout en Algérie et y répondre immédiatement».

  • Déclarée urgence sanitaire internationale, la flambée des contaminations au virus de la Mpox, maladie anciennement appelée la variole simienne, inquiète les experts de l’Organisation mondiale de la santé. Avec l’apparition récente de deux cas suspects au Niger et un flux migratoire important à nos frontières sud, sommes-nous suffisamment outillés pour faire face à une telle maladie ?

Il faut savoir qu’à l’origine, le virus Mpox était présent chez les animaux, particulièrement les rongeurs en Afrique, jusqu’à ce qu’il commence à circuler chez les humains. Il est responsable de la maladie qui porte son nom, plus connue sous l’appellation de variole du singe.

C’est une sorte de variole humaine, plus atténuée avec des taux de mortalité très faibles, qui a connu de petites flambées durant ces dernières années, en Afrique centrale et de l’Ouest, avant de connaître une propagation importante en 2022, y compris dans des pays où la maladie était très peu présente. L’Oms avait alors qualifié la Mpox d’urgence sanitaire.

A cette époque, j’avais alerté sur la menace. L’Algérie est un pays africains qui partage des frontières avec de nombreux voisins. Il faut savoir que les personnes contaminées peuvent arriver par la voie terrestre mais aussi par les moyens de transport aériens. Raison pour laquelle, j’avais alerté, déjà en 2022, lorsque les cas de Mpox commençaient à s’envoler en Afrique Centrale et l’Afrique de l’Ouest.

Avec l’explosion des contaminations, durant cette année, notamment en République démocratique du Congo, chez ses voisins et l’apparition d’un nouveau variant très contaminant et plus létal, l’Oms a encore une fois, déclaré la maladie urgence de santé publique et élaboré des recommandations adressées aux Etats parties, afin d’y faire face.

En ce qui concerne notre pays, je tiens à saluer les décisions du Premier ministre, relatives au contrôle aux frontières terrestres et aériennes. L’Algérie a une double porte d’entrée de ce virus ; les aéroports et surtout les frontières terrestres avec les pays du Sahel où le contrôle est très difficile. Une réunion est prévue cette semaine au niveau de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, que dirige le Professeur Sanhadji, consacrée justement au sujet.

  • Peut-on craindre une deuxième pandémie après la Covid-19, étant donné que les contaminations commencent leur envolée en dehors du continent africain ?

Une pandémie comme celle de la Covid-19, je n’y crois pas. Contrairement à la Covid, la majorité des cas infectés par la maladie samienne sont symptomatiques donc apparents.

C’est-à-dire visibles. Pour l’instant, je pense qu’il n’y a pas eu de cas en Algérie. Le variant Omicron du Sars CoV-2, faut-il le rappeler, est le deuxième virus le plus contagieux dans l’histoire de l’humanité après celui de la rougeole. Néanmoins, le nouveau variant de la Mpox est plus contagieux que l’original mais aussi trois fois plus mortel que celui de la Covid.

Donc l’état d’urgence déclaré par l’OMS est justifié. Je pense qu’on doit apprendre de notre expérience de la pandémie Covid. La première arme contre les urgences sanitaires comme la méningite cérébro-spinale, la diphtérie ou la variole du singe, c’est l’information sanitaire instantanée pour les acteurs de la santé et la sensibilisation de nos concitoyens.

L’information  est primordiale pour lutter contre toute épidémie. Rien n’empêche un Etat de déclarer une urgence sanitaire, s’il est confronté à un problème sanitaire menaçant, qu’il soit infectieux ou pas. Exemple, 100 cas de tuberculose ne sont pas une urgence sanitaire en Algérie, mais un cas d’Ebola, il l’est.

C’est pour cela, qu’il faut tout de suite partager toute information sanitaire d’une maladie qui menace la santé des Algériens, car la porte d’entrée d’une maladie peut être à Alger comme à In Guezzam. Le Niger, qui est à nos portes, vient d’enregistrer deux cas suspect de Mpox.

  • Ne pensez-vous pas que la Mpox puisse, comme cela été le cas avec la Covid-19, évoluer et devenir plus contagieuse et plus létale par rapport à sa première version ?

Justement, nous sommes dans ce cas. Cette épidémie de Mpox a commencé en 2022 dans centaine de pays, avec un taux de mortalité aux environs de 0,5%. Hélas, avec l’apparition de ce nouveau variant 1b, le taux de mortalité a grimpé à 3%.

C’est-à- dire 3 fois plus mortel que le virus de la Covid-19, bien qu’elle ne soit pas une maladie très contagieuse. Mais le nouveau variant est plus contagieux et plus dangereux d’où l’état d’urgence. D’ailleurs je ne comprends pas pourquoi, il n’y a pas eu d’alerte en Algérie, d’autant que l’équipe de football du CRB a joué un match le 18 août en République démocratique du Congo, le pays le plus touché par cette maladie. Y a-t-il eu un protocole de prévention ? Je ne le sais pas.

  • Depuis quelques jours, des informations font état de nombreux cas d’enfants  contaminés par le virus, West Nile à Adrar et à In Salah au sud du pays. Qu’en est-il au juste ?

J’ai moi-même été contacté par des confrères d’In Salah, où il n’y a pas d’infectiologues pour m’informer des cas enregistrés et confirmés à l’Institut Pasteur d’Alger. Mais aucune information n’a été donnée par ministère de la Santé, donc je n’ai pas de précisions.

  • D’où vient ce virus et quels sont les protocoles de lutte contre cette contamination ? 

Le virus du West Nile s’est installé dans le pourtour méditerranéen et en Algérie. Il est transmis par des moustiques du genre culex le plus souvent. J’ai eu des échos de ces contaminations par les confrères de différentes wilayas, mais hélas pas de chiffres officiels, alors qu’il s’agit d’une épidémie doit faire l’objet de campagne d’information destinée aux acteurs de la santé au niveau national et aux citoyens.

Il nous faut, impérativement, un organisme de veille sanitaire opérationnel a tout moment comme l’est notre armée nationale, en matière de sécurité. C’est-à-dire, détecter toute menace partout en Algérie et y répondre immédiatement. C’est ce qui nous manque.

  • Quelle analyse faites-vous de la situation épidémiologique du Sud, où vous êtes l’un des rares infectiologues, et au Nord, sachant que vous êtes connecté avec vos collègues et les institutions sanitaires ?

Hélas, le dernier rapport épidémiologique officiel date de 2022. Donc, étant un acteur du terrain, je connais plus ce qui se passe au Niger ou au Congo que ce qui se passe en Algérie. A part ma maîtrise de la situation de la wilaya où j’exerce, je ne connais pas les données épidémiologiques du Nord ni même des autres wilayas.

Mpox : le fabricant danois du vaccin «mieux préparé» qu’en 2022

Bavarian Nordic, le fabricant danois du vaccin contre le Mpox, s’est dit la semaine dernière «mieux préparé» pour approvisionner le monde en sérum contre la maladie que lors de l’épidémie précédente en 2022. «Nous sommes mieux préparés», a expliqué le PDG du laboratoire danois, Paul Chaplin, à l’occasion de la présentation de ses résultats trimestriels.

«Non seulement nous avons constitué des stocks pour répondre aux commandes prévues, mais nous avons également constitué des stocks pour nous permettre d’être en capacité de réagir en cas d’épidémie, comme c’est le cas actuellement», a-t-il dit. Une semaine auparavant, Bavarian Nordic s’est dit prêt à produire jusqu’à 10 millions de doses de vaccins d’ici 2025.

Actuellement, le laboratoire a quelque 500 000 doses en stock. Selon le groupe, «l’époque n’est sans doute pas autant à la panique qu’en 2022/2023», d’autant plus que le laboratoire ignore l’état des stocks de vaccins déjà distribués dans le monde. La forte recrudescence de la maladie en Afrique est principalement due à une nouvelle souche, le clade 1b, plus transmissible et plus dangereuse que les précédentes.

L’épidémie circule en partie par des relations sexuelles, mais le virus se transmet aussi par des contacts non sexuels, menaçant aussi les enfants chez qui la maladie apparaît plus dangereuse.

Bavarian Nordic a récemment demandé à l’Agence européenne du médicament l’extension de l’utilisation de son vaccin aux adolescents de 12 à 17 ans. Le laboratoire danois, qui a réalisé un chiffre d’affaires de 1,4 milliard de couronnes (190 millions d’euros) au deuxième trimestre, table sur des ventes de 5,3 milliards de couronnes sur l’ensemble de l’année.

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