Les Philippines ont affirmé hier qu’une «nuée» de plus de 135 bateaux chinois s’est déployée autour du récif Whitsun, qu’elles revendiquent, jugeant cette présence massive «alarmante», rapporte l’AFP. Les bateaux chinois sont «éparpillés» autour dudit récif que les Philippines appellent récif Julian Felipe, à environ 320 kilomètres à l’ouest de l’île de Palawan, selon les garde-côtes philippins.
Ce récif est situé à plus de 1000 km de la première masse terrestre chinoise notable, l’île de Hainan. Il fait partie de l’archipel des Spratleys, que revendiquent la Chine, les Philippines et plusieurs autres pays riverains de la mer de Chine méridionale. Les garde-côtes philippins, qui ont déjà repéré 111 navires de ce qu’ils appellent la «milice maritime chinoise» dans le secteur le 13 novembre, en ont compté «plus de 135» quand ils ont déployé deux navires de patrouille samedi, ont-ils indiqué. «Aucune réponse n’a été apportée aux appels radio lancés par les garde-côtes philippins» aux navires chinois, ont-ils ajouté. Des images diffusées par les garde-côtes montrent des navires alignés en formation, tandis que d’autres sont dispersés dans les eaux.
Eaux troubles
En 2021, quelque 210 navires chinois ont stationné près du récif Whitsun pendant plusieurs semaines, selon le gouvernement philippin.
Pékin a affirmé qu’il s’agit de bateaux de pêche s’abritant des intempéries, mais Manille a rejeté cette explication, affirmant qu’il n’y a eu aucune tempête au cours de la période concernée.
Pékin revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, y compris des eaux et des îles proches des côtes de ses voisins, et a ignoré la décision d’un tribunal international en 2016 selon laquelle cette affirmation est sans fondement juridique. La Chine déploie régulièrement des navires pour patrouiller dans les eaux disputées et a construit des îles artificielles militarisées pour renforcer sa position. Les Philippines, Brunei, la Malaisie, Taïwan et le Vietnam revendiquent également plusieurs récifs et îlots dans cette mer.
Vendredi, les Philippines ont annoncé la mise en place d’une station de garde-côtes sur la plus grande île qu’elles contrôlent en mer de Chine méridionale, afin de renforcer la surveillance des navires chinois. Ce poste sera équipé de «systèmes avancés», notamment de radars, de communications par satellite, de caméras côtières et de systèmes de gestion du trafic maritime, a indiqué le conseiller à la sécurité nationale, Eduardo Ano, lors d’une visite sur l’île de Thitu. La construction est déjà terminée, et la station devrait être opérationnelle au début de l’année prochaine. A son arrivée au pouvoir en juin 2022, le président philippin, Ferdinand Marcos Jr., a prévenu qu’il ne laisserait pas la Chine piétiner les droits de son pays en mer, et s’est rapproché des Etats-Unis.
Ainsi, il a œuvré à améliorer les relations avec Washington, un allié de longue date des Philippines, mises à mal par son prédécesseur Rodrigo Duterte. Début avril dernier, Manille a mis à disposition de Washington quatre nouvelles bases militaires, dont une base navale non loin de Taïwan. Le 11 du même mois, les deux pays ont entamé des manœuvres militaires conjointes qui dureront deux semaines.
Les tensions entre Manille et Pékin se sont exacerbées au début de l’année après qu’un navire des garde-côtes chinois eut prétendument utilisé un laser de qualité militaire contre un bateau des garde-côtes philippins près de l’atoll Second Thomas. Fin avril, la Chine a accusé les Philippines d’avoir «délibérément» voulu provoquer un incident dans les eaux disputées de la mer de Chine méridionale.
Accusation qui fait suite à une collision évitée de justesse entre deux vaisseaux de garde-côtes de chacun de ces pays. Fin septembre, le président Ferdinand a ordonné une opération spéciale pour démanteler une barrière flottante installée par la Chine, selon Manille, à l’entrée du récif de Scarborough, dont la Chine a pris le contrôle en 2012, aux dépens des Philippines. Ce dispositif empêchait les pêcheurs philippins d’accéder à cette zone riche en ressources halieutiques. La Chine a réagi en «conseillant aux Philippines de ne pas faire de provocations ni de créer des troubles».
Début octobre, les Philippines et les Etats-Unis ont entamé leurs manœuvres navales annuelles. Menées au large de la capitale Manille et au sud de Luzon, principale île des Philippines, elles comportent des exercices de lutte anti-sous-marine entre bâtiments de surface, et des exercices de guerre électronique.
Le même mois, les Philippines et la Chine ont échangé les accusations quant à la responsabilité des deux collisions survenues près de l’atoll Second Thomas Shoal, dans les Spratleys, où la marine philippine est stationnée, et Pékin déploie des navires pour faire valoir ses revendications territoriales.