Celui qui aura bercé notre enfance aux sons des karkabous, celui qui avait été choisi par Gillo Pontecorvo pour immortaliser la scène mythique de la pose de la bombe dans La Bataille d'Alger, l'ami des artistes, l'anticonformiste, le rebelle, la muse éternelle de Denis Martinez, son gnawi blidi Sahbi... nous a quittés pour un monde meilleur...Repose en paix Ammi Mohamed Bahaz...»
Voilà les mots et les phrases résumant une longue et particulière carrière choisis par l'artiste blidéen Farid Khodja à la suite du décès de son ami dans la nuit de samedi à hier à Blida. Celui qui est derrière les percussions musicales pour le film La Bataille d’Alger et ancien membre de la troupe du Théâtre national algérien vivait mal ces dernières années. Souffrant de maladies et sans ressources, Mohamed Bahaz est parti à l'âge de 81 ans, laissant derrière lui le son des karkabous qui résonne encore dans les esprits des vieux brisquards de la ville des Roses.
En 2019, son ami le plasticien Denis Martinez lui avait rendu un hommage à travers une exposition intitulée : «Bahaz Khouya Gnaoui Blidi, histoire d'une complicité», où le parcours du défunt a été retracé. Même s'il est natif de Blida, du quartier populaire Douirette plus précisément, Mohamed Bahaz n'hésitait surtout pas à assumer ses origines africaines en étant le petit-fils d'une Sénégalaise et d'un Malien. Percussionniste et adepte du gnawi dans l'âme et dans le sang, le dernier gardien de cet art était «plus qu'un musicien, un personnage haut en couleurs au parcours atypique. Tantôt danseur, tantôt musicien au goumbri, il a séduit par son charisme singulier, son timbre de voix aux accents "Hozzi", et par son anticonformisme. Rebelle dans une société conservatrice, il a détonné par son franc-parler», conclut Farid Khodja en guise d'hommage.