Les tensions sont fortes depuis début août et le siège de la Banque par un groupe d’hommes, dont certains étaient armés, demandant la démission du gouverneur Seddik El Kebir.
L’ONU a annoncé avoir tenu des pourparlers lundi avec les deux Exécutifs rivaux en Libye, dont les différends ont débouché sur une crise de la gouvernance de la Banque centrale et des craintes autour du secteur pétrolier, a rapporté hier l’AFP. La Mission d’appui de l’ONU en Libye (Manul) a expliqué avoir rencontré séparément les parties pour des discussions «marquées par un dialogue ouvert et honnête», selon un communiqué.
En proie au chaos depuis la mort de Mouammar El Gueddafi en 2011, la Libye est gouvernée par deux Exécutifs rivaux : celui de Abdelhamid Dbeibah installé à Tripoli (ouest) et reconnu par l’ONU, et un autre dans l’Est, soutenu par le maréchal Khalifa Haftar.
Ces «efforts pour résoudre la crise» surviennent après que les autorités de Tripoli ont évincé le gouverneur de la BCL, manœuvre condamnée par l’administration de l’Est, qui dénonce une tentative de prise de contrôle de l’institution. Le camp du maréchal Haftar a riposté en stoppant la production et les exportations pétrolières.
Les tensions sont fortes depuis début août et le siège de la Banque par un groupe d’hommes, dont certains étaient armés, demandant la démission du gouverneur Seddik El Kebir. Ce dernier a indiqué au Financial Times qu’il a fui le pays en raison de «menaces» de groupes armés. L’ONU a par ailleurs écrit sur X que les rivaux avaient accepté de soumettre un projet d’accord à leur Parlement respectif, en vue de la signature d’un accord.
Impasse
Le gouverneur El Kebir, en poste depuis 2012, est dernièrement critiqué par l’entourage de A. Dbeibah pour sa gestion de la manne pétrolière, considérée comme trop favorable au clan Haftar. Lundi 26 août, une nouvelle équipe dirigeante est entrée dans les locaux de la BCL, mais des analystes ont émis des doutes sur sa capacité à faire fonctionner cette institution, qui a stoppé toutes ses opérations au départ du gouverneur El Kebir.
La Libye tire quasiment la totalité de ses ressources de l’exploitation du pétrole, dont la production était revenue récemment à 1,2 million de barils par jour (contre à 1,5 à 1,6 million avant les révoltes de 2011).
Le conflit de la BCL, qui s’ajoute à la crise politique, est loin d’être résolu. Entre avril 2019 et juin 2020, le camp Haftar a tenté de s’emparer de Tripoli, mais il a échoué après une bataille sanglante. Après un cessez-le-feu, un accord est signé en 2021 à Genève sous l’égide de l’ONU instaurant des institutions provisoires, dans l’attente d’élections générales prévues fin 2021. Des scrutins reportés sine die en raison de divergences sur leur base juridique.
Récemment, le Parlement qui siège dans l’Est a de nouveau contesté la légitimité du GNU, affirmant, avec le soutien du camp Haftar, ne reconnaître qu’Oussama Hammad comme chef du «gouvernement légitime». Le Parlement a également déchu le Conseil présidentiel, autre organe issu de l’accord de 2021, représentant les trois régions du pays, de son rôle de «commandant suprême des armées».
En réaction, le gouvernement Dbeibah a estimé que «les décisions du Parlement ne changent en rien la réalité libyenne», car émanant d’un acteur politique qui «se bat pour rester au pouvoir le plus longtemps possible», soulignant que lui-même «tient sa légitimité de l’accord politique» de Genève.