Par Abdelmadjid Djebbab, ex-DG des Sport au MJS
Les joueurs professionnels de football sont réellement devenus des actifs soumis aux lois de l’offre et la demande. L’explosion de la bulle spéculative ne semble pas survenir et le marché des transferts frôle l’indécence et continue sa folle dérive de la marchandisation.
Pourtant, qu’est-ce qui peut justifier cette flambée des gros salaires, lorsque certains clubs professionnels érigés en sociétés sportives soumises aux règles du code de commerce ne réalisent pas ou peu de recettes pour justifier cette débauche d’argent et l’explosion des montants d’achat ou des transferts des joueurs ? Tout cela, et bien souvent, dans une opacité qui règne autour de ce marché en fureur et l’intervention de parties obscures.
Ce libre marché doit être impérativement régulé et l’intervention des intermédiaires aussi. Bien qu’ils soient des acteurs incontournables dans le sport professionnel, la loi 13/05 du 23 juillet 2013 qui prévoit en son article 66 que «les managers de joueurs» doivent obligatoirement être titulaires d’une licence délivrée par la Fédération concernée après notification du ministre chargé des Sports. Aussi, et dans le cadre du mécanisme de solidarité, il serait important de savoir si les clubs formateurs bénéficient réellement de rémunération et d’indemnité au titre du produit de formation.
Comment expliquer que certains clubs, déjà fortement endettés, (notamment les dettes CNAS) et accusant des déficits qui les rendent éligibles aux dispositions de l’article 715 bis du code de commerce continuent à gonfler de façon démesurée leur masse salariale, laquelle constitue pourtant l’un des principaux enjeux économiques auxquels sont confrontés les clubs professionnels, en plus de la nécessaire diversification de leurs recettes et la recherche de nouveaux investisseurs.
Il faut cependant garder à l’esprit que ce diagnostic n’a pas la même portée ni les mêmes implications d’un club professionnel à un autre, compte tenu de la taille des budgets et du niveau des fonds propres de chaque club.
En règle générale, ce qui se fait ailleurs, les rémunérations et les montants versés aux joueurs professionnels s’effectuent grâce aux moyens dégagés par la société sportive auprès des sponsors lesquels bénéficient en contrepartie du droit d’utiliser l’image des joueurs très chèrement acquis, tenant compte de leur âge, de leur notoriété et leur contrat.
La légitimité d’un transfert ne devrait pas tenir compte uniquement de la valeur d’un joueur sur le terrain, mais doit comprendre une valeur économique, source importante de recettes telles que l’image et l’impact commercial comme retombées financières.
Le constat est qu’il y a une disparité de situations et de moyens qui traduit une hétérogénéité d’objectifs dès lors que la majorité des clubs luttent pour leur survie financière ou sportive, bien souvent les deux à la fois, alors que le principe veut qu’une compétition intègre est une compétition par laquelle tout participant a une chance égale de gagner. Autant dire que les résultats sportifs devraient être des stratégies et des accomplissements sportifs et non pas uniquement le reflet des moyens financiers.
Face à cette situation, l’ instance faîtière du football national a pris la mesure de la nécessité d’engager une réflexion visant à instaurer le fair-play financier et à mettre en œuvre des règles, en tenant compte de l’autonomie des activités sportives des clubs professionnels, aux fins d’ organiser et de réguler le marché dans le cadre d’ un consensus pour fixer soit le plafonnement de la masse salariale, soit le plafonnement des salaires.
Toutefois, les grands clubs qui se fixent l’objectif d’accéder à la dimension continentale et peut-être mondiale, avec un risque réduit de par la capacité financière des groupes économiques qui les gèrent, se voient contraints d’acheter des joueurs de talent à des prix onéreux, mais qu’il faut juste s’assurer que leur valeur sportive serait supérieure ou égale à leur valeur économique et qu’ils soient vraiment en capacité de mener le club vers la réalisation des objectifs de résultats fixés.