Contes & histoires : Le livre des Mille et Une nuits

28/03/2024 mis à jour: 04:49
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HISTOIRE DU VIZIR DU ROI IOUNANE ET DU MÉDECIN ROUIANE
 

Le pêcheur dit : «Sache, ô toi l’éfrit, qu’il y avait, en l’antiquité du temps et le passé de l’âge et du moment, dans la ville de Fars, au pays des Roumann, un roi nommé Iounane. Il était riche et puissant, maître d’armées, de forces considérables et d’alliés de toutes les espèces d’hommes. 

Mais son corps était affligé d’une lèpre dont avaient désespéré les médecins et les savants. Ni drogues, ni pilules, ni pommades ne produisaient sur lui d’effet, et aucun des médecins ne pouvait lui trouver un remède efficace. Or, un jour, un vieux médecin renommé, appelé Rouiane, vint dans la ville du roi Iounane. Il était versé dans les livres grecs, persans, romains, arabes et syriens ; il avait étudié la médecine et l’astronomie, dont il savait fort bien les principes et les règles et les bons et mauvais effets ; il possédait les vertus des plantes et des herbes grasses et sèches, et leurs bons et mauvais effets ; il avait enfin étudié la philosophie et toutes les sciences médicales et d’autres sciences encore. Aussi, lorsque le médecin eut entré dans la ville et y eut séjourné quelques jours, il apprit l’histoire du roi et de la lèpre qui affligeait son corps par la Volonté d’Allah, et aussi l’insuccès absolu des traitements de tous les médecins et savants. 

A cette nouvelle, le médecin passa la nuit fort préoccupé. Mais quand il se réveilla le matin – et que brilla la lumière du jour et que le soleil salua le monde, ce magnifique décor du Très Bon – il s’habilla de ses plus beaux vêtements et entra chez le roi Iounane. Puis il baisa la terre entre ses mains, et fit des vœux pour la durée éternelle de sa puissance et des grâces d’Allah et de toutes les meilleures choses. Ensuite, il parla et lui apprit qui il était, et dit : «J’ai appris le mal qui t’a frappé dans ton corps ; et j’ai su que la plupart des médecins n’ont pu trouver le moyen de l’enrayer. 

Or, moi, je vais te traiter, ô roi, et je ne te ferai point boire de médicaments et je ne t’enduirai pas de pom- mades !» A ces paroles, le roi Iounane s’étonna prodigieusement, et dit : «Comment feras-tu ? Or, par Allah ! si tu me guéris, je t’enrichirai jusqu’aux fils de tes fils, et je t’accorderai tous tes souhaits et leur réalisation, et tu seras mon compagnon de boisson et mon ami !» Là-dessus le roi lui donna une belle robe et des présents, et lui dit : «Vraiment, tu me guériras de cette maladie sans médicaments ni pommades ?» Il répondit : «Oui, certes ! Je te guérirai sans fatigue ni peines dans ton corps.» Alors le roi s’étonna de la plus prodigieuse façon, et lui dit : «Ô grand médecin, quel jour et quel moment verra se réaliser ce que tu viens d’avancer ? Hâte-toi de le faire, ô mon enfant !» Il répondit : «J’écoute et j’obéis !»
 

Alors il descendit de chez le roi, et loua une maison où il mit ses livres, ses remèdes et ses plantes aromatiques. Puis il fit des extraits de ses médicaments et de ses simples, en confectionna un maillet court et recourbé dont il creusa l’extrémité, et il y adapta une canne ; et il fit aussi une boule le mieux qu’il put. Quand il eut terminé complètement son travail, il monta chez le roi, le second jour, entra chez lui, et baisa la terre. Puis il lui prescrivit d’aller au meïdane à che- val, et de jouer de la boule et du maillet.
 

Traduit par DR Joseph-charles Mardus
(A suivre)

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