Le président russe Vladimir Poutine a accusé hier les Etats-Unis de faire traîner le conflit en Ukraine, lancé par une offensive militaire de Moscou il y a presque six mois, selon des propos recueillis par l’AFP.
La guerre, qui a débuté le 24 février, a entraîné de la part des pays occidentaux de très lourdes sanctions à l’encontre de la Russie et une aide financière et militaire historique pour l’Ukraine, provoquant des tensions sans précédent, en particulier entre Washington et Moscou. Vladimir Poutine a reproché aux Etats-Unis de chercher à «déstabiliser» le monde, invoquant aussi la récente visite à Taïwan de la présidente de la Chambre américaine des représentants Nancy Pelosi. «La situation en Ukraine montre que les Etats-Unis cherchent à faire traîner ce conflit.
Et ils agissent de la même manière en cultivant la possibilité d›un conflit en Asie, en Afrique, en Amérique latine», a-t-il déclaré à la Conférence internationale sur la sécurité à Moscou. Il a dénoncé une «démonstration insolente de leur manque de respect envers la souveraineté des autres pays et leurs obligations internationales».
Cette accusation survient au moment où des bases militaires russes dans la péninsule de Crimée annexée par la Russie en 2014, qui sert de base arrière logistique aux forces russes, sont frappées par des incendies. Mardi, un incendie a provoqué une explosion de munitions dans une base du district de Djankoï (nord), selon le ministère russe de la Défense.
Deux civils ont été blessés et l’évacuation des habitants d’un village voisin a été organisée, selon le gouverneur de la Crimée, Sergueï Aksionov. L’explosion est due à un «acte de sabotage», a affirmé l’armée russe dans un communiqué, sans désigner de responsables. «Un nombre d’infrastructures civiles, parmi lesquelles une ligne de haute tension, une centrale électrique, une voie ferroviaire, ainsi que plusieurs maisons ont également été endommagés», a-t-elle détaillé. Réagissant à ces explosions, Andriï Iermak, le chef de l’administration présidentielle ukrainienne, a salué sur Telegram une «opération démilitarisation façon travail d’orfèvre par les forces armées ukrainiennes», qui continuera selon lui «jusqu’à la libération complète des territoires ukrainiens».
La Crimée joue un rôle-clé dans la stratégie russe. L’offensive sur le sud de l’Ukraine, qui a permis à Moscou de capturer de larges pans de territoire aux premières semaines de la guerre, est partie de là. Des avions russes décollent aussi quasi quotidiennement de Crimée pour frapper des cibles dans des régions sous le contrôle de Kiev ; plusieurs zones de cette presqu’île sont situées dans le rayon d’action des canons et des drones ukrainiens.
«Dissuasion nucléaire»
En parallèle, la centrale nucléaire de Zaporijjia, sous contrôle russe dans le sud de l’Ukraine, reste depuis des jours source de tensions majeures : plusieurs frappes dont s’accusent mutuellement Moscou et Kiev ont visé l’installation, la plus grande d’Europe. Si la crainte d’une catastrophe nucléaire a été brandie jusqu’au Conseil de sécurité de l’ONU, le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a tenté de rassurer mardi sur les intentions russes dans le domaine du nucléaire. «L’objectif principal des armes nucléaires russes est la dissuasion d’une attaque nucléaire», a-t-il affirmé.
De son côté, le président français Emmanuel Macron a appelé mardi au retrait des forces russes de la centrale, prise début mars par les troupes russes, en soulignant les «risques» que leur présence fait peser sur la sécurité du site. Lors d’un entretien téléphonique avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, il a souligné «sa préoccupation quant à la menace que font peser la présence, les actions des forces armées russes et le contexte de guerre avec les conflits en cours sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires ukrainiennes, et a appelé au retrait de ces forces», a indiqué le palais présidentiel de l’Elysée à Paris.
Pour sa part, le ministère ukrainien de l’Infrastructure, le premier navire de l’ONU chargé de céréales est parti mardi du port de Pivdenny, dans le sud de l’Ukraine, avec à son bord quelque 23 000 tonnes de céréales pour l’Ethiopie. Le conflit a bloqué pendant des mois de l’exportation de céréales ukrainiennes, aggravant l’insécurité alimentaire dans de nombreux pays en développement Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), un nombre record de 345 millions de personnes dans 82 pays sont aujourd’hui confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, tandis que jusqu’à 50 millions de personnes dans 45 pays risquent de sombrer dans la famine sans aide humanitaire.
Depuis l’accord sur l’exportation des céréales ukrainiennes du 22 juillet, plus d’une quinzaine de bateaux ont quitté l’Ukraine, selon le décompte de Kiev, mais aucune cargaison humanitaire de l’ONU n’avait encore pris la mer.