L’Arabie Saoudite, abrite depuis hier une réunion sur l’Ukraine. Rencontre à laquelle prendront part près d’une quarantaine de pays, selon l’AFP citant des diplomates, à l’exclusion de la Russie. Kiev étant à l’origine de ces discussions qui se tiennent à Jeddah, au bord de la mer Rouge.
A la fois proche de Moscou et de Washington, la monarchie du Golfe a annoncé vendredi la venue de «conseillers de sécurité de pays frères» pour discuter de la «crise ukrainienne», sans dévoiler les noms des Etats participants. Cette réunion de deux jours reflète, selon l’agence de presse officielle SPA, la «disposition du Royaume à exercer une mission de bons offices» pour parvenir à «une paix permanente» entre l’Ukraine et la Russie. «Les discussions ne seront pas faciles, mais la vérité est de notre côté», a reconnu Andriy Yermak, chef de l’administration présidentielle ukrainienne qui représente le pays à Jeddah.
«Nous avons de nombreux désaccords et nous avons entendu de nombreux points de vue», a-t-il ajouté le même jour dans une interview télévisée, soulignant l’importance de faire valoir la position ukrainienne : «Notre tâche est d’unir le monde entier autour de l’Ukraine.»
Selon des diplomates, Riyad a particulièrement tenu à recevoir le Brésil, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, puissances émergentes membres des Brics (avec la Russie) qui, contrairement aux Occidentaux, n’ont pas pris parti pour l’Ukraine sans toutefois soutenir l’invasion russe lancée en février 2022.
Critiquée par les Occidentaux pour son refus de condamner la Russie, la Chine a envoyé à Jeddah son émissaire pour l’Ukraine, Li Hui, et s’est dite déterminée à contribuer à «un règlement politique de la crise ukrainienne». L’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud ont aussi fait état de leur participation. Côté occidental, la Maison-Blanche a fait savoir que Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale du président Joe Biden, mènera la délégation américaine à Jeddah. Paris est représenté par Emmanuel Bonne, le conseiller diplomatique du président français Emmanuel Macron, selon l’ambassade de France à Riyad.
Selon le programme, la réunion doit comporter trois heures de discours des participants et deux heures de discussions à huis clos avant un dîner officiel. Vendredi, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a salué une réunion «très importante » en Arabie Saoudite. L’Ukraine, avec les Etats-Unis, a néanmoins reproché à Riyad de faire le jeu de la Russie, sous le coup de sanctions occidentales, en menant conjointement avec elle une politique pétrolière visant à doper les prix sur les marchés mondiaux.
Changement de cap
Egalement impliquée dans les pourparlers sur le Soudan, théâtre d’un conflit depuis la mi-avril, l’Arabie Saoudite se voit aujourd’hui en faiseur de paix après avoir prôné une politique étrangère qui a fini par l’isoler. Le Royaume a assaini ses relations avec ses propres rivaux, à commencer par le Qatar, la Turquie et, cette année, l’Iran et la Syrie. Riyad a lancé en 2015 une opération militaire au Yémen voisin pour y soutenir les forces gouvernementales combattant les rebelles houthis, proches de l’Iran. Les accusations de crimes de guerre et la crise humanitaire, l’une des pires au monde, ont terni l’image de l’Arabie Saoudite.
Et en 2018, l’assassinat du journaliste critique saoudien Jamal Khashoggi par des agents saoudiens à Istanbul a plongé le royaume, dans sa plus grande tourmente diplomatique. La volatilité des marchés de l’énergie liée à la guerre en Ukraine a toutefois donné l’occasion à l’Arabie Saoudite de se remettre en selle diplomatique. A l’ONU, l’Arabie Saoudite a soutenu les résolutions dénonçant l’intervention russe ainsi que l’annexion proclamée de territoires dans l’est de l’Ukraine. En mai, le Royaume a aussi convié à un sommet de la Ligue arabe Volodymyr Zelensky qui en a profité pour accuser certains dirigeants de la région de fermer les yeux sur l’offensive russe.