Conflit du Nagorny-Karabakh : Le président azéri refuse de rencontrer le Premier ministre arménien

05/10/2023 mis à jour: 06:16
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Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, et le Premier ministre arménien, Nilok Pachinian

Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, refuse de prendre part à une rencontre avec le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, prévue aujourd’hui, en Espagne, en raison des récentes marques de soutien européennes à Erevan. C’est ce qu’a indiqué, hier, un responsable azerbaïdjanais, relayé par l’AFP.
 

Selon ce responsable qui s’exprimait sous couvert de l’anonymat et confirmait des informations de presse, l’Azerbaïdjan «n’a pas jugé nécessaire de participer aux négociations dans ce format» à Grenade, au sud de l’Espagne, et I. Aliev ne s’y rendra pas comme prévu. Il a mis en cause une «atmosphère anti-azerbaïdjanaise qui s’est formée», après la récente victoire éclair de Bakou sur les séparatistes arméniens du Haut-Karabakh.

 Cet officiel a notamment cité les «déclarations pro-arméniennes des responsables français», la visite de la ministre des Affaires étrangères française Catherine Colonna en Arménie et ses «déclarations sur la fourniture d’armes et de munitions», ainsi que les «accusations portées hier contre l’Azerbaïdjan par le président du Conseil de l’UE, Charles Michel».
 

Un peu plus tard, le Premier ministre arménien a annoncé qu’il se rendrait en Espagne malgré l’absence du dirigeant azéri. 

«Nous avons confirmé notre participation à la réunion à Grenade», a-t-il déclaré au Parlement arménien. Mardi, Mme Colonna a annoncé que Paris a «donné son accord» pour la livraison de matériel militaire à l’Arménie qui souhaite se protéger de son voisin azerbaïdjanais. 

Elle n’a pas précisé de quels équipements il s’agit mais a assuré que Paris agirait «dans ce domaine avec un esprit de responsabilité de part et d’autre et sans aucun esprit d’escalade».De son côté, la Première ministre française Elisabeth Borne, a dit vouloir un «plan européen d’appui» à l’Arménie.

 Par ailleurs, l’Arménie a «fermement condamné», hier, les arrestations «illégales» d’anciens dirigeants ou responsables des autorités séparatistes du Haut-Karabakh, accusant l’Azerbaïdjan de procéder à des «interpellations arbitraires». «Nous condamnons fermement les arrestations par l’Azerbaïdjan des dirigeants du Haut-Karabakh», a déclaré le ministère arménien des Affaires étrangères dans un communiqué. Les autorités arméniennes ont notamment évoqué la situation de Rouben Vardanian qui a dirigé le Haut-Karabakh de novembre 2022 à février dernier et a été placé en détention provisoire fin septembre, dans le sillage de la victoire de Bakou contre les séparatistes arméniens de ce territoire. Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a, par exemple, appelé au respect des droits de Rouben Vardanian, après son arrestation. Il a été inculpé de financement du terrorisme et de la création d’une organisation armée illégale, selon l’Azerbaïdjan. Le ministère arménien n’a pas indiqué quand et où les autres dirigeants auraient été arrêtés, ni pour quel motif.
 

Après l’offensive éclair des forces azerbaïdjanaises, en septembre 2023, la quasi-totalité de la population arménienne a fui la république autoproclamée du Haut-Karabakh et celle-ci a annoncé sa dissolution à partir du 1er janvier 2024.
 

Mercredi, Erevan a indiqué que «les forces de l’ordre de l’Azerbaïdjan continuent de mener des arrestations arbitraires», malgré les promesses de «respect des droits des Arméniens» au Haut-Karabakh.
 

Autoproclamée indépendante par des séparatistes arméniens en 1991, cette enclave territoriale a été le théâtre de violents affrontements entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie qui sont entrés en guerre à deux reprises au sujet du conflit du Haut-Karabakh : la première, de 1988 à 1994, s’est soldée par la victoire de l’Arménie. La deuxième, qui a duré 44 jours, en 2020, s’est terminée par la victoire de l’Azerbaïdjan.
 

«Solution militaire»

Le 12 juillet 2020, des combats éclatent à la frontière Nord entre les deux pays, loin du Nagorny- Karabakh, peu après la menace du président azerbaïdjanais de quitter les pourparlers de paix, jugeant que Bakou a le droit de chercher «une solution militaire au conflit». La Russie se dit prête à servir de médiateur. Fin septembre, après de multiples accrochages, la guerre est déclenchée entre les deux voisins. Six semaines suffisent aux Azéris pour vaincre les forces arméniennes. Un nouveau cessez-le-feu, sur lequel doivent veiller des soldats russes, est conclu le 10 novembre. Mais les tensions sont loin d’être apaisées. Elles montent d’un cran en décembre 2022, lorsque Bakou ferme le corridor de Latchine, officiellement par mesure de sécurité. 

En juillet dernier, Erevan a appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour mettre fin au blocus, en rappelant ses craintes d’un «nettoyage ethnique» de la région. Les médiations séparées de l’Union européenne, des Etats-Unis et de la Russie ont échoué à aboutir à un traité de paix. En conséquence le 19 septembre, une offensive militaire est lancée par l’Azerbaïdjan, après la mort de quatre policiers et deux civils azerbaïdjanais dans l’explosion de mines posées, selon Bakou, par des «saboteurs» arméniens. 

Le lendemain, les autorités du territoire sécessionniste, lâchées par Erevan, ont capitulé, et un cessez-le-feu est conclu. Le dirigeant du Haut-Karabakh, Samvel Chakhramanian, a signé, le 28 septembre, un décret de dissolution du territoire à partir du 1er janvier 2024, établissant que «la République du Nagorny Karabakh (Artsakh) cessera d’exister». 

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