Cinquantenaire de l’école nationale vétérinaire d’Alger : L’épopée de la médecine vétérinaire et son parcours en Algérie

12/05/2022 mis à jour: 12:28
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Concernant cette période d’après-indépendance, il convient de signaler que le nombre de vétérinaires algériens était en deçà des besoins du pays en termes de préservation de la santé animale et d’amélioration de la productivité des ressources animales, considérées comme force économique et sociale pour le pays.

Quant au nombre de techniciens en santé animale (l’équivalent du paramédical en médecine humaine), il ne dépassait guère la vingtaine, alors que les différents cheptels avaient besoin d’une bonne couverture en soins préventifs.

D’ailleurs, plusieurs vétérinaires en retraite rappellent que, suite à l’épizootie de peste équine qui a sévi en Algérie vers la fin des années 1960 et qui a fait, à titre de rappel, des ravages notamment chez les chevaux, Tayebi Larbi, alors ministre de l’Agriculture, a dû recourir aux compétences du Dr Anwar Pacha Rahal.

Ce dernier, avec son équipe composée des premiers vétérinaires algériens (de retour au pays), est venu à bout de cette maladie. Pour cela, mais également au vu du besoin exprimé auparavant par cette pléiade de vétérinaires pour protéger la santé animale dans le pays, une école vétérinaire fut créée en Algérie, suite à un décret présidentiel (n°65-69 du 11 mars 1965).

Nommée Ecole nationale vétérinaire (ENV), cette dernière n’ouvrira ses portes qu›au début de l›année 1971, suite à l’ordonnance n°70-87 du 15 décembre 1970, signée par le Président Houari Boumediène.

Au début, plus exactement entre 1971 et 1973, c’était l’Institut national d’agronomie (INA) d’El Harrach qui parrainait les vétérinaires. La formation, qui était assurée par une dizaine de vétérinaires algériens formés à l’étranger et de quelques coopérants, se faisait dans des locaux préfabriqués. Jusqu’en 1974 où l’ENV a finalement obtenu l’autonomie de gestion. Dirigée par le Pr Anwar Pacha Rahal, la première promotion de vétérinaires formés entièrement en Algérie sortira de cette école en 1977.

L’Ordre national des vétérinaires : lien «entre le passé et le futur»

Depuis cette date, d’autres établissements vétérinaires ont vu le jour et actuellement, l’Algérie compte six autres centres de formation en médecine et sciences vétérinaires : un à l’Ouest (Tiaret), un au Centre (Blida) et quatre à l’Est (Constantine, Batna, Tarf et Souk Ahras).

Tandis que l’ENV, hissée au rang d’Ecole nationale supérieure vétérinaire (ENSV) suite au décret exécutif n° 08-214 du 14 juillet 2008, a élu domicile, en  2014, dans une nouvelle et imposante structure située à El Alia dans la commune de Oued Smar, à l’est d’Alger. Une école digne de la profession, dirions-nous, à l’instar des grandes écoles vétérinaires à travers le monde, où la formation, qui s’étend sur cinq années d’études (?), englobe deux grandes unités d’enseignement.

Une liée à la zootechnie qui comprend, entre autres, la production laitière, la nutrition animale et la bromatologie et l’autre médicale qui s’étale sur un cycle préclinique suivi d’un cycle clinique, ponctué de stages en chirurgie et en médecine rurale.

Par ailleurs, si la corporation vétérinaire algérienne s’est nettement rajeunie et féminisée, surtout ces vingt dernières années, son effectif a, pour sa part, connu une nette augmentation. Une évolution pléthorique qui est sujette à beaucoup de controverses, notamment avec le nombre de vétérinaires qui dépasse, selon certaines statistiques, les 20 000 vétérinaires actuellement.

Soit, pour certains, la quantité au détriment de la qualité. Activant principalement dans le département de l’agriculture mais également dans d’autres secteurs (intérieur et collectivités locales, pêche, commerce…), plus de 1000 vétérinaires se sont spécialisés, dont une cinquantaine est au grade de Professeur.

Et alors que certaines données avancent que plus de 60% des vétérinaires algériens exercent la profession à titre privé, d’autres ont quitté le pays pour poursuivre des études de spécialité au sein des universités et instituts vétérinaires de réputation mondiale où ils réalisent de grandes prouesses scientifiques, en particulier dans les domaines de la transplantation embryonnaire et la génétique animales.

Toutefois, le grand bémol pour la profession est que, plus d’un demi-siècle après l’institution de la médecine vétérinaire dans le pays, ses acteurs peinent à mettre en marche leur conseil de l’ordre. En effet, l’Algérie est, jusqu’à ce jour, parmi les rares pays au monde dont la profession vétérinaire est amputée de son ordre !

Un ordre dont la vocation et les missions, telles que connues dans les pays où il est bien ancré, sont la réflexion sur le système de santé animale (et de santé publique en général.

C’est aussi et surtout une entité de concertation avec l’ensemble des Ordres médicaux, sachant que durant les deux dernières décennies, deux grandes maladies animales, à savoir l’encéphalopathie spongiforme bovine (maladie de la vache folle) et la grippe aviaire (H5N1), viennent de briser définitivement la frontière entre «santé humaine» et  «santé animale». Sans compter la pandémie de Covid-19 (SARS-CoV-2) qui a tenu en haleine le monde entier durant plus de deux ans et dont l’origine du virus en cause, le coronavirus, serait imputé à l’animal ; bien entendu, jusqu’à preuve totale du contraire.

En somme, un contexte qui devrait interpeller, à l’échelle nationale, toutes les parties concernées (entre acteurs et décideurs) afin que la médecine et les nouvelles générations de  médecins vétérinaires puissent retrouver la place qui leur sied dans l’échiquier sanitaire du pays dans sa globalité mais aussi pour renforcer la prévention et la sécurité sanitaire des Algériens.

D’autant plus que, dans la sphère de la santé animale, la barrière de l’espèce vient d’être franchie et que, par ailleurs, l’Organisation mondiale de la santé animale (l’OIE), ex-Office international des épizooties, dont le slogan universel est, justement, le «One Heath»,  vient de tirer la sonnette d’alarme en révélant que  «60 % des agents pathogènes qui causent des maladies humaines proviennent des animaux domestiques et de la faune sauvage». Une alerte qui nous projette, indubitablement, du passé (et son histoire) vers l’avenir (et ses risques sanitaires) où, dit-on, les  enjeux de santé seront majeurs !  Suite et fin

Dr Salim Kebbab
Médecin vétérinaire, Master en journalisme scientifique

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ET WEBOGRAPHIQUES

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