Centre de recherche en langue et culture amazighes de Béjaïa : Le patrimoine culturel immatériel amazigh en débat

22/05/2022 mis à jour: 00:55
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Le Centre de recherche en langue et culture amazighes (CRLCA) de Béjaïa a organisé, en collaboration avec la Faculté des lettres et des langues de l’université Abderahmane Mira, mardi dernier, à l’auditorium du CRLCA, une journée d’étude sous l’intitulé «Le patrimoine culturel immatériel amazigh : richesse, préservation et défis». «patrimoine poétique», «langue, vecteur culturel », «pratiques et symbolisme» et «traditions et préservation» ont été les thématiques qui ont englobé seize communications présentées par les chercheurs.
 

Les communicants ont soulevé des préoccupations justifiées par les menaces qui pèsent sur le patrimoine culturel immatériel amazigh d’où l’impérativité de sa préservation. La menace est celle de sa disparition faute de pratique du patrimoine en question, sa déformation et sa falsification à travers, entre autres moyens, certains écrits d’auteurs coloniaux. En plus de mener des recherches scientifiques, les communicants ont fait des propositions pour la sauvegarde de ce patrimoine dont celle de créer comme pour le cas de Ideqqi, «le musée national de la poterie amazighe». 
 

La première séance est entamée par le Pr Salhi Mohand Akli, qui a présenté une communication traitant du «métadiscours poétique traditionnel, état du patrimoine et possibilité de valorisation». Ensuite, au tour du Pr Imarazen Moussa qui a parlé du «chant féminin traditionnel et statut de la femme kabyle». Le Dr Sadoudi Oumelaz qui a bouclé la première séance en communicant autour de l’expression Ay ixef-iw rfed asefru  (Oh mon cerveau ! entame le vers), et de comment, dans la poésie, «les mots surmontent les maux». Elle a clôturé sa communication en chantant tivougharin (chant spécifique des femmes) de la région de Tizi n Berbere (Aokas), en tant qu’élément culturel immatériel amazigh.
La seconde session, consacrée à la thématique de la langue, comme vecteur culturel, a été ouverte par le Pr Tidjet Mustapha, directeur du CRLCA, sur «Tutlayt d tgemmi tarangawt», soit la langue comme composante du patrimoine immatériel. 

Le Dr Halouane Hacène a communiqué sur «la dimension patrimoniale du toponyme» en insistant sur l’importance de restituer les patronymes originaux à certains lieux au risque d’être réduits à de simples coquilles. Car ceux-ci sont porteurs de toute une signification sociale et historique, explique-t-il. La communication de Malika Hamdis s’est axée sur «le rôle du fichier de documentation berbère (FDB) dans la constitution de la banque de données des corpus écrits en berbère (kabyle), cas de la région de Mekla (Tizi Ouzou)». Dr Yahiaoui Mahdi s’est employé quant à lui à décrire et expliquer le fonctionnement de certaines expressions kabyles.
 

La troisième et dernière session de la journée du mardi s’est penchée sur «les pratiques et le symbolisme dans la culture amazighe». La thématique a été inaugurée par le Dr Kamel Medjdoub qui s’est penché, à travers sa communication intitulée «Ideqqi ou le langage symbolique de la poterie amazighe», sur le décodage des signes et symboliques des décors que les femmes amazighes exécutent sur la poterie. Le communicant a expliqué qu’à ce niveau des signes, il y a lieu d’extrapoler sur d’autres arts traditionnels amazighs, comme le métier à tisser (azetta), les tatouages, les dessins sur les murs des maisons traditionnelles et les bijoux. 

Dr  Aissou Ourida est revenue sur certaines pratiques coutumières dans la relation mère-bébé dans la région d’Aokas. Quant à Bellal Nourdine, il a abordé la fonction, dans la société kabyle, du rite de «timechret» ou «lewziâa» (sacrifice de bœufs et partage équitable de la viande sur les foyers du village). Le Dr Zoreli Mohamed-Amokrane a porté son intérêt sur le fonctionnement et la raison du Souk et de la zaouïa en tant que «faits sociaux totaux». 

La consistance des communications et des débats qu’elles ont suscités ont amené les organisateurs à prolonger la rencontre d’une demi-journée. Le lendemain donc, mercredi, Bilak Hamid est revenu sur la voie tracée par Mouloud Mammeri dans la sauvegarde de l’âme amazighe, tandis que Dr Iggui Saliha a suggéré, à travers sa communication sur «les savoirs traditionnels», des possibilités de breveter les œuvres ancestrales. Dr Belhadi Aïssa est revenu sur la vie et l’apport de Si El-Bachir Amellah, «l’imam-poète-chanteur de la basse Kabylie» et sur certains de ses poèmes inédits. Saidani Massinissa et Boussekar Abdelwahab ont soutenu, sous leur double origine, kabyle et chaouie, la place de tamazight, langue et culture, dans le patrimoine algérien. 

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