Le président de la Republika Srpska, Milorad Dodik, a promulgué hier une loi rejetant l’autorité du haut représentant international dans cette entité serbe de Bosnie, rapporte l’AFP. Cette décision représente un défi de taille pour le haut représentant Christian Schmidt.
Depuis la nomination en 2021 à ce poste de cet homme politique allemand, les dirigeants des Serbes de Bosnie, et notamment Milorad Dodik, rejettent son autorité et affirment régulièrement qu’il s’agit d’un haut représentant «illégal» ou «faux», car il n’a pas été approuvé par le Conseil de sécurité de l’ONU, comme ses prédécesseurs. «Le président de le Republika Srpska (RS), Milorad Dodik, a signé le décret sur la promulgation» de cette loi, adoptée le 21 juin par le Parlement de l’entité serbe, indique son cabinet dans un communiqué. Dans une lettre adressée parallèlement au bureau du haut représentant (OHR), Milorad Dodik réaffirme sa position à son égard.
«Le haut représentant en Bosnie-Herzégovine n’existe pas et c’est dégoûtant et illégal de vous représenter faussement, par quoi vous êtes en train de commettre un acte criminel», a écrit le chef politique des Serbes de Bosnie, selon le contenu de cette lettre publié par son cabinet. Proche du Kremlin, Milorad Dodik est visé par des sanctions américaines et britanniques après avoir multiplié, ces dernières années, les menaces séparatistes. La loi qu’il a promulguée stipule que les décisions prises par le haut représentant international ne seront plus publiées dans le Journal officiel de l’entité serbe, ce qui signifie de facto le rejet de son autorité.
Le haut représentant, qui veille au respect de l’accord de paix de Dayton (Etats-Unis, 1995), dispose de pouvoirs discrétionnaires lui permettant d’annuler ou d’imposer des lois et aussi de limoger des élus. Principal allié international des Serbes de Bosnie, la Russie a proposé en juillet 2021 au Conseil de sécurité de l’ONU un projet de résolution, co-parrainée par la Chine, prévoyant la fermeture de l’OHR en juillet 2022. Ce texte a été rejeté, des diplomates occidentaux ayant alors accusé Moscou de vouloir décrédibiliser le haut représentant.
En signant le décret, Milorad Dodik a ignoré aussi la dernière décision de Christian Schmidt qui a annulé, samedi dernier, avec le soutien des principales puissances occidentales, cette même loi, avant son entrée en vigueur. Le diplomate allemand a alors annulé aussi une autre loi adoptée fin juin par les députés serbes bosniens, refusant la mise en œuvre en RS des décisions de la Cour constitutionnelle de Bosnie, un texte vivement dénoncé par Washington, Paris et Londres.
Ce texte, dont la promulgation a également été annoncée par Dodik, a été qualifié par Christian Schmidt de «violation directe de l’ordre constitutionnel (...) et de l’accord de paix». «Je dois défendre ce peuple (serbe, ndlr). Je suis prêt au sacrifice et à aller jusqu’au bout parce que je n’ai pas le choix», a déclaré Milorad Dodik dimanche à la presse. Par sa dernière décision, le haut représentant a aussi modifié le code pénal bosnien, permettant à la justice locale de poursuivre des responsables politiques s’opposant à ses propres décisions et à celles de la Cour constitutionnelle, prévoyant des peines jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.
Depuis la guerre intercommunautaire des années 1990, la Bosnie est divisée en deux entités, une serbe et l’autre croato-bosniaque, unies par de faibles institutions centrales.