Beaucoup ont gelé leur activité à cause des pics de chaleur et des risques d’incendies : Les aviculteurs dans le désarroi

07/08/2023 mis à jour: 01:02
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La prise de charge des éleveurs en détresse garantit la durabilité des exploitations avicoles

Tout le monde le sait, le poulet est une espèce qui résiste peu à la chaleur. En Algérie, pays très chaud où les risques d’incendies de forêt sont élevés, chaque été apporte son lot de pertes et de dégâts pour les aviculteurs. Si les gros producteurs ont les moyens et s’adaptent malgré tout aux mauvaises conditions climatiques, les petits éleveurs ne sont pas bien «armés» pour le faire.

 La semaine passée, un aviculteur de Bouira avait perdu 4000 poussins de dinde à cause des pics de température. Accablé par ce qui lui venait d’arriver, le malheureux lance un appel à l’aide sur les réseaux sociaux. «Le monsieur a perdu 4 milliards de centimes minimum. Il lui faut des années pour pouvoir reprendre l’activité», estime Saïd, un aviculteur de Boudouaou El Bahri. Pour se prémunir face à tels risques, les aviculteurs doivent disposer obligatoirement d’un groupe électrogène et d’un  système de refroidissement performant, souligne-t-il. «Celui qui n’a pas ces équipements ne peut pas exercer l’activité en été, sinon, que faire quand il y a une coupure d’électricité. On peut tout perdre en 15 minutes. 

On doit savoir que lorsque la température affiche 50° à l’extérieur, à l’intérieur d’un poulailler, elle dépasse 70°», explique-t-il. Saïd a 5 poulaillers d’une capacité de 3500 poussins chacun. 

«Heureusement que mes installations sont à 300m du littoral, sinon, il me sera très difficile de tenir en cette période de forte chaleur», confia-t-il. Chawki (35 ans) est employé dans un complexe avicole à Taouarga, à l’extrême est de Boumerdès. «70% du poulet qui se vend sur le marché national sort de chez nous. Il y a des dizaines de complexes accouveurs et de reproductions ici. La localité produit une moyenne de 2 millions de poussins par semaine.

 Nous avons des clients qui viennent des quatre coins du pays. Si on arrête de travailler, tout s’arrête. Et Dieu merci, cette année, nous n’avons pas enregistré de pertes», dit-il. Grâce au programme d’électrification agricole mis en œuvre par les pouvoirs publics, beaucoup d’installations et d’exploitations agricoles sont raccordées aux réseaux de Sonelgaz, ce qui a réduit considérablement les coupures de courant.  
 

Le programme d’électrification agricole à la rescousse…

Le programme a connu un franc succès dans plusieurs wilayas du pays, y compris dans les hauts plateaux et les régions du Grand Sud. Il n’y a pas longtemps, le ministre de l’Energie, Mohamed Arkab, avait fait état 30 000 exploitations agricoles qui ont été raccordées à l’électricité à travers le pays. 

Ce programme se poursuit et devrait toucher, selon lui, 20 000 autres exploitations d’ici la fin de l’année. «C’est le plus grand service qui nous a été rendu par l’Etat. L’électricité était et reste la plus grande préoccupation de beaucoup de fellahs», fulmine un autre aviculteur qui s’attend à une hausse des prix des viandes blanches dans les semaines à venir.  «Le poulet se vend entre 280 et 300 DA en gros et entre 42 et 470 DA sur le marché de détail. 

L’éleveur ne gagne rien puisque le prix de revient d’un kg de poulet est de 280 DA. Mais les prix risquent d’augmenter incessamment, car les fortes chaleurs ont contraint beaucoup d’aviculteurs à suspendre leur activité de crainte de subir des pertes. Cela sans oublier les ravages causés par les derniers incendies», explique-t-il. Dans la wilaya de Boumerdès, une vingtaine de poulaillers ont pris feu. «J’avais deux poulaillers avec près de 2200 sujets dont 1000 étaient prêts à la vente. Tout a été réduit à néant par les flammes et j’espère que l’Etat viendra à mon secours», martèle avec tristesse Ali B, viticulteur à Timezrit. A Bouira et Béjaia, les dégâts causés aux éleveurs et aux agriculteurs sont énormes. 

Outre la chaleur, la cherté de l’aliment constitue l’autre hantise des éleveurs. L’exonération des  opérations de vente des produits destinés à l’alimentation de bétail et de volaille de la TVA semble n’a pas profité aux petits éleveurs, d’autant que 70% exercent dans l’informel. C’est là, peut-être, le grand problème de la filiale avicole en Algérie.
 

 

 

La filière en chiffres  

Dans une publication parue en 2022, Kaci Ahcène, enseignant à l’ENSA, fournit plusieurs statistiques sur «la filière avicole en Algérie, les acquis, les contraintes et les enjeux». Selon lui, l’aviculture emploie 22 000 personnes et fait vivre 1,400 millions de personnes (ces chiffres sont loin d’être exhaustifs). Il évalue le nombre d’intervenants dans ce secteur à 60 000 environ soulignant que 70% des opérateurs privés exercent dans l’informel et contrôlent 70% du marché interne. Les éleveurs de poulet de chair sont au nombre de 22 000,  les éleveurs reproducteurs chair  577, les reproducteurs dinde 5, les accouveurs chair 158, les accouveurs dinde 02, les élevages de poulets de chair 22 000, les élevages de poules pondeuses 6000, les élevages de dinde chair 3000, les abattoirs et tueries particulières 539, les marché de gros 3151 et de détails de poulet et d’œufs 8252. La filière dégage, selon lui, une valeur de la production de 74,192 milliards de dinars, mais reste dépendante des marchés extérieurs notamment en ce qui concerne les intrants avicoles dont la facture d’importation était de 1,5 milliards en 2001, écrit-il. S’agissant des contraintes, il met en avant «l’instabilité des prix, l’absence de mécanismes de régulation des marchés par les agents collectifs et l’indisponibilité d’un système d’information viable». Il n’y a pas longtemps, un membre du Conseil national interprofessionnel de la filière avait  annoncé que 80% des aviculteurs exercent hors du cadre légal et seulement 20% d’entre eux sont inscrits au registre de commerce.

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