Bangladesh : Le départ de Rohingyas vers l’Indonésie bloqué

26/11/2023 mis à jour: 20:06
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La police est intervenue au Bangladesh pour empêcher des départs de réfugiés rohingyas par la mer vers l’Indonésie, un phénomène en pleine recrudescence, ont annoncé hier des responsables policiers, rapporte l’AFP.

L’Indonésie a, pour sa part, renforcé ses patrouilles en mer dans la région d’Aceh (ouest)pour empêcher l’arrivée de nouveaux bateaux de réfugiés rohingyas. Plus d’un millier de réfugiés rohingyas sont arrivés dans la province d’Aceh depuis le 14 novembre après un voyage de quelque 1800 km. Il s’agit du nombre le plus élevé d’arrivées depuis 2017.

Au Bangladesh, des réfugiés rohingyas ont indiqué avoir payé à des passeurs 1000 dollars (environ 915 euros) la place sur un bateau. Le Bangladesh accueille environ un million de Rohingyas, minorité majoritairement musulmane de Birmanie, dont quelque 750 000 ayant fui en 2017 une campagne de répression militaire qui fait l’objet d’une enquête pour «actes de génocide» devant la Cour internationale de justice (CIJ). Leurs conditions de vie sont très difficiles, ils s’entassent dans des camps surpeuplés où l’insécurité est omniprésente. Alors que la mer se calme après les pluies de mousson dans le golfe du Bengale, des passeurs proposent aux Rohingyas d’embarquer vers la Malaisie ou l’Indonésie, ont expliqué à l’AFP des responsables policiers au Bangladesh.

Hier, la police bangladaise a indiqué avoir «empêché de partir 58 Rohingyas» vendredi soir, neuf hommes, 16 femmes et 33 enfants alors qu’ils quittaient les camps pour embarquer à Teknaf, port fluvial à la frontière avec la Birmanie. «Nous avons arrêté deux passeurs présumés bangladais», a précisé le responsable de la police de Teknaf, Osman Goni. «Ils étaient prêts à partir dans un bateau depuis Teknaf pour aller en Indonésie et en Malaisie.»

En Indonésie, la police a ordonné «dans les zones côtières d’intensifier la surveillance, à la fois sur la côte et dans le détroit de Malacca, afin d’empêcher l’arrivée de Rohingyas», a déclaré le chef de la police, l’AKBP, Andy Rahmansyah, dans un communiqué. «La police patrouille 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour empêcher des réfugiés rohingyas d’arriver à l’est d’Aceh», selon lui. 

Des villageois ont tenté la semaine dernière de repousser vers la mer des bateaux de migrants, mais les autorités les ont finalement accueillis et transportés dans un centre d’hébergement temporaire. Dans le nord d’Aceh, les patrouilles ont été renforcées vendredi alors que des pêcheurs ont dit avoir localisé un bateau de Rohingyas à 2 milles nautiques des côtes (3,6 km), a indiqué Amirudin Ismail, chef du village de Tanoh Anoe. Depuis, le bateau n’a plus été aperçu. Des pêcheurs ont également participé à ces patrouilles, a affirmé Naharuddin, chef des pêcheurs du district de Dewantara, dans le nord d’Aceh, qui comme beaucoup d’Indonésiens ne porte qu’un seul nom.

De nombreux habitants d’Aceh ont longtemps été sensibles au sort de cette minorité musulmane. Mais certains montrent désormais de l’hostilité à l’égard des Rohingyas. Des experts s’inquiètent de voir l’Indonésie devenir le prochain pays à durcir le contrôle à ses frontières pour empêcher le débarquement des réfugiés rohingyas alors que les pays voisins, que sont la Malaisie, la Thaïlande et l’Inde, leur ont fermé leurs portes.

L’Indonésie n’est pas signataire de la Convention des Nations unies sur les réfugiés et affirme qu’elle n’est pas obligée d’accueillir ces réfugiés. Le Bangladesh abrite environ un million de membres de cette minorité musulmane apatride. En 2018, l’Onu a accusé dans un rapport les militaires birmans de «crimes contre l’humanité» et de «crimes de guerre», en référence à la répression menée contre les musulmans rohingyas. En 2019, ils sont classés par l’Onu comme «la minorité la plus persécutée au monde».
 

La loi birmane sur la nationalité de 1982 a laissé les Rohingyas apatrides. Estimant qu’ils ne pouvaient fournir la preuve de leur présence sur le territoire avant 1823 (soit avant la première guerre anglo-birmane), la nationalité birmane leur a été retirée. Aussi, la libre circulation dans le pays, l’accès à des services publics, comme l’éducation, et les droits élémentaires, tels que le mariage ou le vote, leur sont notamment refusés. Les bouddhistes de la région les appellent «métèques». Le pouvoir birman, quant à lui, les appelle «Bengalis», les considérant comme des étrangers venus «des Indes».

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