Avis de la CIJ sur l’occupation par Israël des territoires palestiniens : Une autre défaite majeure pour l’état hébreu

21/07/2024 mis à jour: 02:47
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L'avis de la CIJ ne souffre d'aucune ambiguïté - Photo : D. R.

Certes pas contraignant, l’avis juridique de la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction de l’Onu, risque d’isoler davantage Israël sur la scène internationale et de le réduire à un Etat paria.

Historique pour les Palestiniens ! L’avis de la Cour internationale de justice (CIJ) réaffirme le droit à l’autodétermination du peuple palestinien, isolant encore plus Israël, la force occupante, sur le plan international, qui apparaît aujourd’hui comme un Etat paria. Dans son exposé de vendredi dernier, la CIJ, la plus haute juridiction de l’Onu, a non seulement réaffirmé l’illégalité de la présence israélienne dans les Territoires palestiniens, mais aussi appelé à la fin de cette occupation, et exhorté les Etats et l’Onu de s’interdire toute reconnaissance de cette situation illicite ou d’aider à son maintien.

A travers les 82 pages de cet avis consultatif, la CIJ ne s’est pas contentée de répondre aux questions de l’Assemblée générale de l’Onu sur «les conséquences juridiques découlant de certaines politiques et pratiques d’Israël en tant que puissance occupante dans une situation d’occupation de guerre depuis 1967» et sur «l’incidence de ces politiques et pratiques sur le statut juridique de l’occupation au regard de certaines règles et de certains principes du droit international ainsi que les conséquences juridiques qui découlent de ce statut», elle a présenté de nombreux arguments sur lesquels elle s’est basée pour rendre ses conclusions.

Ainsi, la Cour commence par affirmer que les Territoires palestiniens occupés (depuis 1967) englobent la Cisjordanie, Jérusalem-Est et la bande de Ghaza, dans lesquels Israël a un statut de force occupante.

Du point de vue juridique, souligne la Cour, ces territoires constituent «une seule et même entité territoriale» et «rien n’empêche la Cour internationale de justice de tenir compte de faits antérieurs à l’occupation», précisant au passage que les politiques et pratiques visées dans la demande de l’Assemblée générale de l’Onu «n’incluent pas le comportement adopté par Israël dans la bande de Ghaza en réaction à l’attaque menée le 7 octobre 2023».

Pour la Cour, les Accords d’Oslo «ne peuvent être interprétés comme limitant d’une quelconque manière les obligations incombant à Israël au regard des règles du droit international pertinentes applicables dans les Territoires palestiniens occupés (…)».

La CIJ note qu’Israël, depuis le retrait de ses colonies de Ghaza en 2005, «a poursuivi sa politique de colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est (…), à travers le transfert de colons, dont le maintien de leur présence viole l’article 49 de la quatrième convention de Genève, l’expansion des colonies reposant sur la confiscation ou la réquisition de vastes étendues de terre non conformes aux articles 46, 52 et 55 du règlement de La Haye, l’exploitation des ressources naturelles, alors que son rôle en tant que puissance occupante se limite à celui d’administrateur tenu de sauvegarder le fonds de ces ressources et de veiller à ce que la population locale dispose d’un accès adéquat à la nourriture, y compris l’approvisionnement en eau».

Annexion, déportation et ségrégation : les ingrédients de la colonisation

La politique de colonisation, c’est aussi, indique la CIJ, «l’extension de la législation israélienne à la Cisjordanie et à Jérusalem-Est, non justifiée au regard de la disposition pertinente de la quatrième convention de Genève», en précisant que «l’autorité réglementaire étant exercée par Israël d’une manière non conforme à la règle reflétée à l’article 43 du règlement de La Haye et à l’article 64 de la quatrième convention de Genève».

En plus de ces pratiques d’extension, la CIJ cite aussi les déplacements forcés de la population palestinienne, la confiscation à grande échelle des terres et de l’accès aux ressources naturelles et les mesures prises par les forces armées israéliennes entraînant «le déplacement de la population palestinienne», ce qui est, estime la Cour, «contraire à l’interdiction du transfert forcé de la population protégée au regard du premier alinéa de l’article 49 de la quatrième convention de Genève».

Autre pratique de colonisation : «le fait qu’Israël manque systématiquement de prévenir ou de punir les attaques des colons portant atteinte à la vie ou à l’intégrité physique des Palestiniens  et l’usage excessif de la force auquel ils se livrent contre ces derniers», ce qui est incompatible avec les obligations que lui imposent l’article 46 du Règlement de La Haye, le premier alinéa de l’article 27 de la quatrième convention de Genève, ainsi que les articles 6 et 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

«Les colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est et le régime qui leur est associé ayant été établis et étant maintenus en violation du droit international.»

Pour la Cour, le comportement de la puissance occupante, qui traduit une intention d’exercer un contrôle permanent sur les Territoires occupés pouvant constituer un acte d’annexion, notamment à Jérusalem-Est et dans la zone C de la Cisjordanie, étant destiné à rester en place indéfiniment et à créer sur le terrain des effets irréversibles, équivalant à une annexion de vastes parties des Territoires palestiniens occupés. Les lois et les mesures discriminatoires soulevées par les juges.

Pour la Cour internationale de justice, la politique d’Israël relative aux permis de résidence «constitue une discrimination prohibée au regard des articles 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et des articles 2 et 10 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels».

Restrictions imposées par Israël à la liberté de circulation des Palestiniens dans les Territoires palestiniens occupés, ajoute la CIJ, constituent «une discrimination prohibée, consistant à détruire des biens palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, y compris les démolitions punitives et celles pour défaut de permis de construire, constituant une discrimination prohibée, ainsi que les lois et mesures d’Israël imposant et permettant de maintenir en Cisjordanie et à Jérusalem-Est une séparation quasi complète entre les communautés de colons et les communautés palestiniennes». Sur la question du droit à l’autodétermination du peuple palestinien, la Cour souligne qu’Israël est dans l’obligation, en tant que puissance occupante, de ne pas entraver l’exercice par le peuple palestinien de son droit à l’autodétermination.

Israël n’a pas droit à la souveraineté sur les Territoires palestiniens occupés

«La politique de colonisation d’Israël» à travers «l’annexion par lui de vastes portions des Territoires palestiniens occupés», en faisant «obstacle au droit du peuple palestinien de déterminer librement son statut politique et d’assurer librement son développement économique, social et culturel, le caractère prolongé des politiques et pratiques illicites d’Israël aggravant la violation du droit du peuple palestinien à l’autodétermination».

Pour ce qui est de l’influence des politiques et pratiques d’Israël sur le statut juridique de l’occupation et la licéité de la présence continue d’Israël, en tant que puissance occupante, dans les Territoires palestiniens occupés, la Cour estime que «l’affirmation par Israël de sa souveraineté sur certaines parties des Territoires palestiniens occupés et l’annexion de celles-ci constituent», à ce titre, «une violation de l’interdiction de l’acquisition de territoire par la force ; Israël n’ayant pas droit à la souveraineté sur quelque partie des Territoires palestiniens occupés et n’étant pas fondé à y exercer des pouvoirs souverains», précisant en outre que «les préoccupations d’Israël en matière de sécurité ne pouvant l’emporter sur le principe de l’interdiction de l’acquisition de territoire par la force».

Israël, ajoutent les magistrats de la CIJ, «entrave l’exercice, par le peuple palestinien, de son droit à l’autodétermination», violant ainsi «les principes fondamentaux du droit international». Sa «présence dans les Territoires palestiniens occupés étant illicite».

Cette illicéité s’applique, selon la Cour, à l’intégralité des Territoires palestiniens occupés par Israël en 1967. «Il n’y a pas d’exception en raison des Accords d’Oslo (…) L’illicéité d’Israël ne le libère de ses obligations et responsabilités que le droit international lui impose.»

Israël est, pour la CIJ, dans «l’obligation de mettre fin à sa présence dans les Territoires palestiniens occupés dans les plus brefs délais et de cesser immédiatement toute nouvelle activité de colonisation : abroger toutes les lois et mesures créant ou maintenant la situation illicite, y compris celles qui sont discriminatoires à l’égard du peuple palestinien dans les Territoires palestiniens occupés, ainsi que toutes les mesures destinées à modifier la composition démographique de quelque partie de ces territoires, de réparer intégralement les dommages causés par les faits internationalement illicites d’Israël à toutes les personnes physiques ou morales concernées». Israël est tenu, selon la Cour, «d’observer l’obligation qui lui incombe de respecter le droit du peuple palestinien à l’autodétermination ainsi que les obligations que lui imposent le droit international humanitaire et le droit international relatif aux droits de l’homme».

La CIJ indique que «tous les Etats» sont tenus de «coopérer avec l’Onu en vue de donner effet aux modalités requises pour veiller à ce qu’il soit mis fin à la présence illicite d’Israël dans les Territoires palestiniens occupés et à ce que le peuple palestinien exerce pleinement son droit à l’autodétermination».

Ils sont également dans l’obligation «de ne pas reconnaître comme licite la situation découlant de la présence illicite d’Israël dans les Territoires palestiniens occupés, de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de la situation créée par la présence illicite d’Israël dans les Territoires palestiniens occupés et de distinguer, dans les rapports avec Israël, entre le territoire de celui-ci et les Territoires palestiniens occupés».

La même obligation est faite aussi à l’Onu, appelée à trouver «les modalités pour qu’il soit mis fin à cette présence illicite d’Israël dans les Territoires palestiniens occupés». 
 

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