Nouvelle pépite belge sur la planète rap : dans le sillage de Damso, Roméo Elvis ou Hamza, Youssef Swatt's, 26 ans, a crevé l'écran en gagnant en juillet le télécrochet «Nouvelle école» sur Netflix et multiplie les projets.
Quand l'AFP le rencontre, mi-septembre au festival de rap Golden Coast près de Dijon, dans l'est de la France, Youssef Rezeki, de son vrai nom, semble aussi à l'aise sur scène qu'en coulisses, où des caméras de la plateforme de streaming le suivent en partie. «Je fais un million de trucs en même temps», sourit le jeune artiste, pour qui le cru 2024 est en passe de se transformer en millésime tant des portes s'ouvrent, après une dizaine d'années à persévérer.
Ce qui a tout changé ? Sa victoire dans la saison 3 de «Nouvelle école». Avec son morceau Générique de fin, rap sensible et incisif, il se démarque en finale devant le jury composé des artistes SDM, Aya Nakamura et SCH. «Il y a un avant et un après», constate le jeune homme, qui se décrit comme très sociable bien qu'un peu timide et vit très bien cette soudaine notoriété. Natif d'un quartier populaire de Tournai, en Belgique, ce fils d'immigrés algériens commence à écrire "assez spontanément" vers douze ans et gratte le papier en rêvant de ses modèles: Kery James, Keny Arkana, Youssoupha... Tous des rappeurs qui décochent les mots comme des flèches. «C'était compulsif, passionnant», se remémore-t-il. «Je voulais trop être comme eux. Quand tu vois Diam's à la télé, tu te dis : ''c'est ça que je veux faire''. Mes potes, c'était le foot, le cinéma. Moi, c'était le rap.» Dans Générique de fin, sa plume ciselée parle autant de ses forces – le soutien de sa mère jusqu'à la finale – que de ses objectifs : «J'suis pas là pour gagner, j'suis là pour devenir/Celui que je dois devenir/Tu sens qu'on se ressemble/ Ca fait dix ans que j'essaie de trouver les mots pour raconter ce que les gens ressentent».
«Vecteur d'émancipation»
«Il y a beaucoup d'artistes qui aiment dire ''j'écris pour moi''. A la base, j'avais un discours comme ça, jusqu'à me rendre compte qu'en fait non, faut pas se mentir, j'écris pour être lu et entendu», assume Youssef Swatt's, pour qui l'écriture permet «d'extérioriser des choses». En 2007, il sort un premier album auto-produit, fruit d'une campagne de financement participatif. Puis suivent les opus Poussière d'espoir (2020) et Pour que les étoiles brillent (2022), dont Le poids des mots avec Oxmo Puccino. A ses yeux, les mots agissent comme «un vecteur d'émancipation», «un super-pouvoir» qui peut être utilisé à bon ou mauvais escient.
«C'est aussi un privilège social de pouvoir bien s'exprimer, convaincre avec les mots, les arguments, la rhétorique. Ce n'est pas donné à tout le monde. Il y a beaucoup de gens qui ont plein de choses en tête mais qui n'arrivent pas à mettre des mots dessus», pointe-t-il, porté par l'idée que ses écrits personnels peuvent faire écho aux émotions d'autrui. Mais n'allez pas non plus lui coller «l'étiquette» d'un rappeur à texte uniquement. «Je ne veux surtout pas intellectualiser l'art, ce serait absurde», dit-il, assurant qu'une bonne musique ne se résume pas à des paroles bien écrites. Porté par son morceau victorieux dans «Nouvelle école», sur une production de Voluptyk - compositeur notamment pour le rappeur français Jul ou la star algérienne Soolking -, Youssef Swatt's enchaîne les concerts, dont le 24 novembre à La Cigale, à Paris. Il participe également à la bande originale de «La Haine. Jusqu'ici rien n'a changé», spectacle musical inspiré du film de Mathieu Kassovitz et joué à partir du 10 octobre. Avant la sortie d'un «projet» - comprendre, de nouveaux titres - espéré d'ici à la fin de l'année.