Au Nicaragua, une fête centenaire mêle danses et foi pour célébrer l’histoire du pays

23/01/2023 mis à jour: 05:29
AFP
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Les danseurs du «Güegüense» virevoltent au rythme du violon de Marlen Gutiérrez, lors de la fête annuelle de Saint-Sébastien au Nicaragua, une tradition culturelle religieuse issue de l’époque coloniale de l’Amérique latine. Oubliant un instant les tracas de la vie quotidienne, des centaines de fidèles se livrent à des danses populaires, remerciant les miracles de la vie ou conjurant celle-ci d’être plus clémente, au cours d’une procession religieuse à travers les rues de la petite ville agricole de Diriamba, à 40 km au sud de la capitale Managua.

Cette fête «est lourde de sens, parce que nous y voyons du syncrétisme. L’indigénisme fusionne avec la culture espagnole (...) C’est l’expression de l’identité nicaraguayenne», détaille Marlen Gutiérrez, violoniste de 47 ans, pour qui la danse du «Güegüense» représente «la voix du peuple» à toutes les époques. Lors de cette célébration, qui a lieu tous les 19 et 20 janvier, de jeunes Nicaragueyens se couvrent le visage avec des masques en bois, incarnant les rapports entre colons espagnols et peuples indigènes colonisés. Le message: certes, les Indiens dominés acceptent en apparence leur assujettissement à l’autorité, mais derrière les masques, ils ne cessent de faire preuve de ruse pour la saper. Le nom de «Güegüense» dérive du nahuatl, la langue dans laquelle la fête était à l’époque présentée aux autorités coloniales. La danse du «Güegüense» est «une expression virulente de protestation contre la domination coloniale», précise l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), qui l’a inscrite sur la liste du patrimoine immatériel de l’humanité en 2005. La fête commence le matin à l’église de Saint-Sébastien, un monument séculaire aux murs blancs, où résonne la voix du prêtre César Castillo qui donne la messe. Puis se succèdent des groupes de danse lors d’un défilé, sur un fond sonore mêlant percussions, marimba et détonations de pétards artisanaux. Tout au long de la procession, une image de Saint-Sébastien, le saint patron de Diriamba, est érigée au-dessus de la foule. «Les peuples indigènes se moquent de la domination espagnole. L’idée est reprise ici dans un registre religieux et nous maintenons cette tradition», explique à l’AFP le prêtre. Vêtue d’une robe et d’un chapeau paré de fleurs, le visage caché sous un masque en bois représentant le visage d’une vieille femme, Kelle Arcia se déhanche au rythme des percussions et du marimba. Son partenaire de danse, lui, porte un masque incarnant l’expression d’un homme âgé. Cette nicaraguayenne de 24 ans pratique la danse du «Viejo y la Vieja» (le vieux et la vielle) depuis six ans, pour remercier Saint-Sébastien «des faveurs reçues» au cours de l’année. Il «veille sur nous et nous donne son amour, son soutien et sa foi», assure la jeune femme. Carlos Gonzalez, lui, s’est tourné vers Saint-Sébastian pour avoir des enfants, après que les médecins lui avaient annoncé que lui et sa femme ne pourraient devenir parents. «Il y a quatorze ans, j’ai demandé au Seigneur d’agir pour que nous puissions en avoir», confie l’homme de 42 ans à l’AFP, qui ajoute, tout sourire, être désormais le père de trois enfants.

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