La Russie a cessé hier de fournir du gaz naturel à la Finlande voisine, qui a refusé de payer le fournisseur Gazprom en roubles, rapporte l’AFP. N’ayant pas reçu de paiement en roubles de la compagnie énergétique publique finlandaise Gasum à la date butoir du 20 mai, Gazprom a «complètement arrêté ses livraisons de gaz», a indiqué le groupe russe de l’énergie dans un communiqué.
Après le déclenchement de l’opération militaire russe en Ukraine le 24 février et l’imposition de sanctions occidentales, le président russe, Vladimir Poutine, a réclamé le 31 mars aux acheteurs de gaz russe de pays «inamicaux» de payer en roubles depuis des comptes en Russie sous peine d’être privés d’approvisionnements.
La liste des «pays inamicaux», publiée début mars, comprend notamment les Etats-Unis, les membres de l’Union européenne (UE), le Royaume-Uni, le Canada, le Japon, la Suisse, Taïwan, la Corée du Sud, la Norvège et l’Australie. «A compter du 1er avril, les paiements pour le gaz doivent être effectués en roubles en utilisant de nouvelles coordonnées bancaires, ce dont les partenaires ont été informés en temps voulu», a justifié Gazprom. Fin avril, le géant russe a déjà suspendu ses livraisons de gaz à la Bulgarie et la Pologne en expliquant que ces deux pays de l’UE n’ont pas effectué de paiement en roubles. Mesure qualifiée de «chantage» par Bruxelles.
Gazprom a indiqué avoir fourni 1,49 milliard de mètres cubes de gaz naturel à la Finlande en 2021, soit les deux tiers de la consommation du voisin nordique. La compagnie finlandaise Gasum a expliqué qu’elle comblerait le manque à partir d’autres sources par le biais du gazoduc Balticconnector, qui relie la Finlande à l’Estonie. «Il est très regrettable que la livraison contractuelle en gaz naturel soit suspendue. Nous avons cependant veillé soigneusement à nous préparer à cette situation», a indiqué le directeur général de Gasum, Mika Wiljanen, dans un communiqué publié vendredi soir annonçant la mesure russe imminente. «Il n’y aura pas de coupures dans le réseau de distribution de gaz», a-t-il assuré. Gasum, qui rejette l’exigence d’un paiement en roubles, a annoncé mardi qu’il demande un arbitrage en justice. Gazprom Export s’est dit prêt à défendre ses intérêts devant les tribunaux par tous les «moyens disponibles». Interrogé vendredi par la presse, le porte-parole de la présidence russe, Dimitri Peskov, a jugé «évident que personne ne va livrer quoi que ce soit gratuitement».
Une «grave erreur»
La Finlande a déjà dévoilé des plans pour se passer de gaz russe l’hiver prochain en annonçant, notamment, la location sur dix ans, conjointement avec l’Estonie voisine, d’un terminal flottant de regazéification du gaz naturel liquéfié (GNL).
La semaine passée, la Russie a déjà suspendu les livraisons d’électricité à la Finlande après que son entreprise énergétique RAO Nordic ait réclamé à Helsinki des arriérés de paiement. La Finlande, qui partage quelque 1300 km de frontières avec la Russie, et la Suède voisine ont soumis mercredi une demande d’adhésion à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan), alors que durant des décennies, notamment pendant toute la guerre froide, les deux pays ont fait le choix du non-alignement. Ce revirement est le résultat de l’offensive russe en Ukraine, Moscou étant perçue comme une menace.
La Russie a soutenu avoir lancé son offensive contre l’Ukraine pour y empêcher l’expansion de l’Otan, que Moscou considère comme une menace existentielle. Le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, a estimé que les candidatures suédoise et finlandaise constituent «une grave erreur». En réaction, Moscou a déjà annoncé qu’elle compte créer douze nouvelles bases militaires dans l’ouest du pays.
De son côté, le président américain, Joe Biden, a signé hier, pendant son voyage en Corée du Sud, la loi adoptée jeudi par le Congrès apportant une enveloppe de 40 milliards de dollars pour l’effort de guerre ukrainien contre la Russie. Vendredi, les pays du G7 (Etats-Unis, Japon, Canada, France, Italie, Royaume-Uni, Allemagne) réunis en Allemagne ont également promis de mobiliser 19,8 milliards de dollars (18,7 milliards d’euros) afin d’aider l’Ukraine à «combler son déficit financier».