Afrique de l’Ouest : Une poussée terroriste se déplace du Sahel vers les Etats côtiers

17/08/2022 mis à jour: 04:10
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Il y a d’abord eu le nord du Mali, puis le Niger et le Burkina. Et désormais, les pays côtiers ? En Afrique de l’Ouest, la menace terroriste qui déchire le cœur du Sahel progresse vers le Sud, du Bénin à la Côte d’Ivoire.

 Face à la récente multiplication des incursions – et parfois des attaques meurtrières – dans leurs régions les plus septentrionales, ces Etats du golfe de Guinée affinent leurs réponses sécuritaire et politique. Mais comment ne pas reproduire les mêmes erreurs que leurs voisins sahéliens ? C’est la question qui plane au moment où la France, poussée dehors par la junte de Bamako, a achevé lundi le retrait de ses troupes du Mali, où la situation sécuritaire continue de se dégrader, comme au Niger et au Burkina Faso. 
 

Parmi les États côtiers, le nord du Bénin a payé le plus lourd tribut, avec une vingtaine d’attaques ciblant ses forces de sécurité depuis fin 2021 où l’armée a été déployée. Fin juillet, le président béninois, Patrice Talon, a exhorté son homologue français, Emmanuel Macron, en visite à Cotonou, à l’aider à acquérir davantage d’équipements, notamment des drones.

Le Cameroun a, pour sa part, sollicité l’aide de l’Algérie, pays ayant une expertise avérée en matière de lutte contre le terrorisme. Etat d’Afrique Centrale, le Cameroun a enregistré également de nombreuses attaques terroristes. «La dégradation de la situation sécuritaire au Burkina Faso et au Mali fait du nord des pays côtiers la nouvelle ligne de front contre les groupes armés opérant au Sahel», note la fondation allemande Konrad Adenauer. 
 

Au Togo, qui a connu sa première attaque meurtrière en mai 2021, et au Ghana, épargné jusqu’ici en dépit d’incursions et de centaines de recrutements locaux – selon un rapport de la fondation allemande –, les armées sont déployées dans le Nord depuis plusieurs années. 

Tout comme en Côte d’Ivoire, qui a été la cible d’attaques entre 2020-2021, mais n’en a plus connues depuis un an. Militariser les frontières «sera inefficace, comme ce fut le cas au Sahel», prévient toutefois le groupe de réflexion marocain Policy Center for the New South dans un rapport publié en août. Car les groupes djihadistes du Sahel «ne sont pas des armées traditionnelles», soulignent les auteurs du rapport : ils se propagent «en diffusant leurs idées et en exploitant les griefs des populations» dans ces régions souvent délaissées. 
 

Les attaques ne sont que «la partie visible de l’iceberg», note Jeannine Ella Abatan, chercheuse à l’Institut d’études de sécurité (ISS). «Depuis 2019, des études menées au Sahel ont montré que les groupes extrémistes violents s’approvisionnaient déjà dans les pays côtiers, non seulement en moyens logistiques et opérationnels, mais aussi à des fins de financement», précise-t-elle. Ces groupes n’occupent pas de territoires dans les pays côtiers, mais y mènent «des incursions» et des «attaques sophistiquées», seulement réalisables avec de bons renseignements et «la complicité» d’acteurs locaux, ajoute la chercheuse.

 Car la véritable menace est bien celle des recrutements locaux. La semaine passée, une vidéo de deux djihadistes parlant le bariba, langue du nord du Bénin, incitant les populations à les rejoindre et les menaçant en cas de collaboration avec l’Etat, a largement circulé sur les réseaux sociaux. 

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