Affaire Pegasus : La justice française rejette une plainte déposée par Rabat

05/10/2024 mis à jour: 00:08
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Photo : D. R.

Impliqué dans l’affaire Pegasus, le royaume du Maroc, qui avait porté plainte en diffamation contre Mediapart et son fondateur Edwy Plenel pour avoir affirmé qu’il avait espionné le journal français en ligne, a été définitivement débouté et même condamné à verser des frais de procédure, a rapporté Mediapart. «Pour faire diversion à l’affaire Pegasus, dans laquelle il est impliqué, le Royaume du Maroc avait porté plainte en diffamation contre Mediapart et son fondateur Edwy Plenel, alors directeur de la publication. Il reprochait au journal électronique d’avoir affirmé qu’il avait espionné celui-ci.

La manœuvre a échoué : la Cour de cassation vient de le débouter définitivement et de le condamner à nous verser la somme de 2500 euros», a écrit Mediapart.  Ce faisant, la juridiction la plus élevée de l’ordre judiciaire français confirme la décision de la cour d’appel de Paris, datée du 12 avril 2023, ainsi que celle de la 17e chambre du tribunal correctionnel, prononcée le 25 mars 2022.

Celle-ci avait déclaré la plainte irrecevable en ce qu’elle méconnaissait l’une des règles les plus élémentaires du droit de la presse en France, qui interdit à un Etat de poursuivre en diffamation. «Un Etat étranger est irrecevable à agir en diffamation publique envers un particulier, que ce soit en son nom propre ou pour le compte de ses administrations publiques dépourvues de la personnalité morale», rappelle la Cour de cassation dans son arrêt du 10 septembre 2024.

«En droit interne comme au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la liberté d’expression est une liberté fondamentale qui garantit le respect des autres droits et libertés, et les atteintes portées à son exercice doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi», insistait, pour sa part, le tribunal correctionnel.

Et de poursuivre : «Le royaume chérifien envisagerait une saisine devant la Cour européenne des droits de l’homme, ce qui peut paraître cocasse de la part d’un pays classé au 129e rang du classement sur la liberté de la presse réalisé par Reporters sans frontières (RSF).»

Cette plainte attentatoire à la liberté de la presse n’a eu d’autre but que de faire taire pas seulement Mediapart, mais l’ensemble de la profession puisque plusieurs titres ont été poursuivis, ajoute la même source. «En nous attaquant devant la justice, l’objectif du Royaume du Maroc était de faire contre-feu à ce que révélait l’affaire Pegasus : dans un article du 19 juillet 2021, Mediapart apprenait à ses lectrices et ses lecteurs que les numéros des téléphones portables de Lénaïg Bredoux (aujourd’hui codirectrice éditoriale) et d’Edwy Plenel figuraient parmi les dix mille numéros que les services secrets du Maroc avaient infectés, en 2019 et 2020», en utilisant le logiciel espion fourni par la société sioniste NSO.

«Pendant plusieurs mois, l’appareil répressif du royaume chérifien a ainsi violé l’intimité privée de deux journalistes, porté atteinte au métier d’informer et à la liberté de la presse, volé et exploité des données personnelles et professionnelles», avait écrit Mediapart, tout en annonçant son intention de saisir la justice.

Dans ce scandale d’espionnage d’envergure internationale, révélé le 18 juillet 2021 par Forbidden Stories, Amnesty International et seize médias, le Royaume du Maroc était fortement impliqué et mis en cause pour avoir utilisé, sans le moindre contrôle, le logiciel espion commercialisé par NSO pour obtenir des renseignements sur des membres de la société civile: des journalistes, des opposants ou des activistes.

Et, parfois, des diplomates, des magistrats, des avocats, voire des hommes et femmes politiques de premier rang. «La plainte que nous avons déposée le 19 juillet 2021 auprès du procureur de la République de Paris, au nom de notre journal, de Lénaïg Bredoux et d’Edwy Plenel, a donné lieu à l’ouverture d’une enquête judiciaire confiée à un juge d’instruction», rappelle Mediapart.  

 

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