Les récentes révélations sur l'abbé Pierre, une figure emblématique de la résistance et fondateur du mouvement Emmaüs, dévoilent un sombre chapitre de son histoire. Des archives de l'Église catholique, ouvertes en septembre, montrent que la hiérarchie ecclésiastique était informée dès la fin des années 1950 de son « comportement problématique » envers des femmes, sans pour autant prendre des mesures publiques. Ce silence, motivé par la crainte d'un scandale, a persisté malgré des allégations d'abus sexuels et des inquiétudes sur sa santé mentale.
Le dossier d'archives contient 216 pièces, qui incluent des courriers décrivant des « accidents » et un « état anormal », mais sans jamais préciser la nature exacte des actes commis. Les termes utilisés laissent planer le doute sur la gravité des faits, avec des mentions d'agressions sexuelles présumées sur une vingtaine de femmes, dont certaines mineures.
Les documents révèlent que plusieurs évêques et cardinaux, dont Jean-Marie Villot et André-Jacques Fougerat, étaient au courant de ces comportements. Cependant, la stature médiatique de l'abbé Pierre, héros de la résistance et militant social, a conduit la hiérarchie à maintenir sa confiance en lui, tout en cherchant à limiter les risques d'exposition publique.
Interné dans une clinique psychiatrique en 1957 pour un « traitement de choc », l'abbé Pierre a repris ses activités peu après, malgré les préoccupations exprimées par certains responsables ecclésiastiques. Cette gestion discrète et les tentatives de surveillance ont finalement permis à l'abbé de continuer à exercer une influence publique pendant de nombreuses années.
Le pape François a récemment confirmé que le Vatican était informé de ces accusations au moins depuis la mort de l'abbé Pierre en 2007. L'ouverture des archives pourrait conduire à une réévaluation de l'héritage de cette figure vénérée en France.