A la veille d’un scrutin décisif pour la Turquie et son avenir, le président sortant, Recep Tayyip Erdogan, menacé comme jamais, a mobilisé hier ses partisans toute la journée à travers Istanbul, avec un final en prière à Sainte-Sophie, rapporte l’AFP.
C’est dans cette basilique byzantine rose du IVe siècle, qu’il a convertie en mosquée en 2020, que le chef de l’Etat clôture sa campagne. «Tout l’Occident est devenu fou ! Mais je l’ai fait ! » a-t-il déclaré hier devant ses partisans à propos de la conversion de Sainte-Sophie.
Le Président, régulièrement reconduit par les urnes depuis 2003, a promis vendredi de respecter le résultat des élections présidentielle et législatives auxquelles sont appelés 64 millions d’électeurs, non sans juger la question sur ce point «complètement idiote». «Nous sommes arrivés au pouvoir par la voie démocratique, avec le soutien de notre peuple : si notre nation prend une décision différente, nous ferons ce que la démocratie exige. Il n’y a rien d’autre à faire», a-t-il assuré.
Néanmoins, la crainte de dérapages violents demeure dans les grandes villes, après une série d’incidents survenus dans la dernière ligne droite d’une campagne ultra-polarisée, obligeant son adversaire à porter un gilet pare-balles sous son costume lors de ses derniers meetings de campagne.
Le bus du maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, star du parti CHP (social-démocrate) dirigé par K. Kiliçdaroglu et puissant atout de sa campagne, a été caillassé dimanche dernier à Erzurum, en Anatolie orientale. Ce dernier, rentré à Ankara, a conclu sa campagne hier par une visite symbolique au mausolée de Mustafa Kemal Atatürk, fondateur de la Turquie moderne et laïque.
Au contraire du pouvoir autocratique «d’un seul homme», Erdogan, dénoncé par l’opposition, son principal adversaire de 74 ans propose, en cas de victoire, une direction collégiale, entouré de vice-présidents représentant les six partis de la coalition qu’il emmène, de la droite nationaliste à la gauche libérale.
La dérive autoritaire de la dernière décennie et plus encore depuis le coup d’Etat avorté de 2016, une économie en berne avec une dévaluation de la livre turque de moitié en deux ans et une inflation autour de 40% sur un an, selon les chiffres officiels contestés, ont entamé le crédit et la popularité du chef de l’Etat, qui fait valoir les grandes réalisations et le développement, réel, de son pays depuis 2003.
Mais il a reconnu avoir du mal à séduire les jeunes, dont plus de 5,2 millions voteront pour la première fois. Autre inconnue, l’impact du puissant séisme qui a ravagé un quart du sud du pays, faisant au moins 50 000 morts et 3 millions de disparus.