Dans cet entretien accordé à El Watan, la présidente de la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG), Wassila Betata Atimene, explique les missions de l’instance qu’elle dirige, chargée notamment «de veiller au fonctionnement concurrentiel et transparent du marché de l’électricité et du marché national du gaz, dans l’intérêt des consommateurs et de celui des opérateurs». Cette dirigeante donne aussi des pistes de réflexion sur les réformes nécessaires visant à renforcer le rôle de la CREG. La CREG, qui a participé au Salon Napec, qui vient de se tenir à Oran, formule aussi «des avis motivés et soumet au ministre de l’Energie des propositions d’ajustement en conformité avec le cadre réglementaire et législatif en vigueur, instruit les recours des consommateurs et développe des actions de sensibilisation et d’information».
- En matière de protection des consommateurs, quelles sont les mesures que prend la CREG pour inciter les opérateurs exerçant dans le secteur de l’électricité et du gaz à respecter leurs obligations ?
Tout d’abord, je vous remercie de l’intérêt que vous portez aux activités de la Commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG). En effet, nous sommes une autorité de régulation indépendante, instituée par la loi 02-01 du 5 février 2002, relative à l’électricité et à la distribution du gaz par canalisations.
La CREG a pour mission de veiller au fonctionnement concurrentiel et transparent du marché de l’électricité et du marché national du gaz, dans l’intérêt des consommateurs et de celui des opérateurs.
La CREG est investie de missions d’évaluation de l’exécution du service public par les opérateurs concernés et assure son contrôle, de conseil auprès des autorités publiques et d’une mission générale de surveillance et de contrôle du respect des lois et règlements y afférents.
Dans ce cadre, elle formule des avis motivés et soumet au ministre de l’Energie des propositions d’ajustement en conformité avec le cadre réglementaire et législatif en vigueur, instruit les recours des consommateurs, publie les informations utiles pour la défense de leurs intérêts et développe des actions de sensibilisation et d’information en direction des parties concernées par ses activités.
La CREG intervient aussi dans la validation des procédures internes en rapport avec les relations clients-distributeur et vérifie leur application sur le terrain par le biais des audits menés dans ce sens.
- Sur le plan de la coopération avec les associations de protection des consommateurs, quelles sont les préoccupations qui sont régulièrement recueillies par la CREG ?
Depuis son installation, la CREG s’est attelée à instaurer une relation de proximité avec les consommateurs et leurs représentants, en organisant des rencontres périodiques qui constituent un espace privilégié d’échanges et en diffusant de l’information sur les dispositions réglementaires et des conseils les concernant directement (choix du tarif, efficacité énergétique, sécurité,…).
Les associations de protection des consommateurs sont nos partenaires du fait qu’elles représentent les consommateurs au niveau du territoire national par le biais de leurs démembrements au niveau local et portent leurs voix et leurs préoccupations.
Un travail collaboratif est mené avec ces dernières de façon régulière, visant à améliorer la relation distributeur-clients en liaison avec les procédures internes de gestion de la clientèle, notamment en ce qui concerne le raccordement en énergie, la facture et le traitement des doléances, qui représentent les préoccupations les plus récurrentes.
- A l’ère du digital, la CREG mène-t-elle des campagnes d’information, notamment sur la Toile, plus particulièrement sur les réseaux sociaux, pour sensibiliser les consommateurs sur leurs droits et les bonnes pratiques d’utilisation des différentes énergies domestiques ?
L’intérêt des consommateurs est au centre des préoccupations de la CREG, qui veille, dans le cadre des missions qui lui sont dévolues par la loi n°02-01 et ses différents textes d’application, à la préservation de leurs intérêts et assure la protection de leurs droits en ce qui concerne la fourniture de l’électricité et du gaz, la qualité et la continuité du service rendu par le distributeur.
La CREG dispose de comptes Facebook et LinkedIn, à travers lesquels elle communique en direction du grand public, notamment en ce qui concerne l’information sur les droits et obligations du consommateur, la sensibilisation sur les risques liés à l’utilisation des deux énergies électrique et gazière, en particulier sur le danger des émissions de monoxyde de carbone, gaz très dangereux et souvent mortel, sans oublier la rationalisation dans la consommation de l’énergie.
En plus de ces canaux de communication, la CREG dispose d’un site web animé par une rubrique dédiée aux consommateurs, où l’on trouve le cadre réglementaire, l’ensemble des supports de communication (livret conseils de sécurité, conseils d’économie d’énergie, etc.), un formulaire en ligne offrant aux consommateurs la possibilité d’introduire auprès de la CREG leurs éventuels recours et/ou demandes d’information. Aussi, des simulateurs de factures d’énergie sont mis en ligne à la disposition des différentes catégories de clients résidentiels et industriels.
- Quelles sont les mesures institutionnelles qui peuvent être envisagées pour améliorer la protection des consommateurs de gaz et d’électricité en Algérie ? Faut-il, par exemple, accroître les ressources humaines de la CREG pour mieux traiter les réclamations des consommateurs à travers notre vaste pays ?
La loi 02-01 et ses textes d’application sont venus cadrer les différents aspects liés à la protection du consommateur en identifiant clairement ses droits et obligations. La CREG, en collaboration avec les opérateurs concernés, travaille de façon continue à la mise à niveau de la réglementation, de sorte à lever les ambiguïtés rencontrées dans son application.
Quant à la prise en charge des réclamations, l’organisation actuelle de la CREG ne répond pas de façon efficace au nombre de plaintes de plus en plus croissant. Les effectifs doivent être renforcés de sorte à minimiser les délais de leur traitement, et cela ne pourra être concrétisé qu’une fois que la CREG aura acquis son siège administratif.
- Que préconise la CREG pour intégrer davantage d’énergies renouvelables dans le réseau d’électricité national ?
La CREG a participé à l’élaboration du programme national de développement des énergies renouvelables et son actualisation, ayant abouti à l’adoption, par le gouvernement, du programme des 15 000 MW à l’horizon 2035.
La CREG travaille actuellement à la mise en place de la réglementation liée au développement des EnR, notamment le décentralisé, qui constitue l’un des facteurs favorisant le déploiement des énergies renouvelables.
Des réflexions sont aussi menées pour permettre l’intégration d’autres filières renouvelables, telles que la valorisation des déchets, sans oublier la participation aux travaux en cours, menés en parallèle au niveau du secteur, pour le développement de l’hydrogène vert.
- Dans un cadre de débat national constructif, quelles sont, selon vous, les réformes nécessaires que vous souhaitez pour renforcer le rôle de la Commission de régulation de l’électricité et du gaz en Algérie dans l’exercice de ses missions ?
A l’instar des régulateurs à l’international, en plus de la mission de conseil, on pourrait envisager de donner plus de pouvoir à la CREG sur le plan fonctionnel et, peut-être, instaurer la régulation incitative qui constitue un des leviers devant amener concrètement les opérateurs régulés du secteur à améliorer l’exercice de leurs missions de service public de l’électricité et de la distribution du gaz et se conformer aux lois et règlements en vigueur de façon générale.