Une ouverture serait vue de manière positive à New Delhi : Après l’élection de Sharif, l’espoir d’une éclaircie entre Inde et Pakistan

13/04/2022 mis à jour: 18:00
AFP
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Le nouveau Premier ministre pakistanais, Shehbaz Sharif, a une relation particulière avec l’Inde / Photo : D. R.

Fait inhabituel pour un homme politique pakistanais de haut rang, M. Sharif s’est déjà rendu en Inde, en 2003, en tant que ministre en chef du Pendjab, un Etat qui a été divisé entre les deux pays lors de la partition de 1947.

L’Inde espère que le nouveau Premier ministre pakistanais, Shehbaz Sharif, enclenchera un dégel diplomatique entre les deux rivaux dotés de l’arme nucléaire, après des années de tensions, selon les analystes.

Elu lundi, M. Sharif, réputé pragmatique et favorable aux affaires, a face à lui plusieurs défis de taille, dont les épineuses relations avec le voisin indien, issu comme son pays de la partition de l’empire britannique des Indes en 1947, et contre lequel le Pakistan a livré trois guerres depuis.

Mais le nouvel homme fort d’Islamabad est issu d’une famille politique de l’élite considérée en Inde comme conciliante envers New Delhi, et prête à régler les différends par le dialogue plutôt que par la confrontation – contrairement à son prédécesseur immédiat, Imran Khan. «Ce n’est pas quelqu’un qui ira jusqu’à se mettre l’Inde à dos», déclare à l’AFP Ajay Darshan Behera, professeur d’études internationales à l’université Jamia Milia Islamia de Delhi.

Fait inhabituel pour un homme politique pakistanais de haut rang, M. Sharif s’est déjà rendu en Inde, en 2003, en tant que ministre en chef du Pendjab, un Etat qui a été divisé entre les deux pays lors de la partition de 1947.

Il y avait visité le village ancestral de sa famille du côté indien de la frontière et rencontré le Premier ministre de l’époque, Manmohan Singh, à New Delhi, ainsi que d’autres responsables. Son homologue indien, Narendra Modi, a pour sa part assisté à un mariage de la famille Sharif.

Le leader nationaliste hindou a fait un voyage surprise au Pakistan en 2015, un an après sa prise de fonction, où il a été accueilli par le frère aîné de M. Sharif, Nawaz, lui-même Premier ministre à l’époque.

Les deux frères ont généralement eu des «relations cordiales» avec les dirigeants indiens, note Imtiaz Gul, du Centre de recherche et d’études sur la sécurité d’Islamabad. «C’est un bon point de départ pour que l’Inde reprenne le dialogue», a-t-il ajouté.

Le voyage de M. Modi a été suivi de plusieurs séries de pourparlers visant à restaurer la confiance, tombée au plus bas après les attentats terroristes de Bombay en 2008, que l’Inde a accusé le Pakistan d’avoir parrainés. Mais l’embellie s’est brutalement interrompue l’année suivante avec la reprise du conflit au Cachemire, un territoire âprement disputé par les deux pays et à l’origine de deux de leurs trois guerres.

Une série de raids aériens sur la région frontalière en 2019, de fortes tensions et le silence entre les deux gouvernements ont fait craindre un nouveau conflit ouvert. Sous le gouvernement du Premier ministre Imran Khan, réputé proche de l’armée pakistanaise où l’hostilité à l’Inde reste très présente, les relations diplomatiques se sont encore dégradées.

Difficultés économiques

Le commerce bilatéral a été suspendu après une tentative de l’Inde de renforcer son pouvoir sur la partie du Cachemire qu’elle contrôle. M. Khan a fortement critiqué son homologue indien, Narendra Modi, et a appelé à une action internationale pour mettre fin à ce qu’il qualifie de «génocide» dans la région contestée.

Après le départ de M. Khan, l’analyste politique Sujit Dutta, basé à Delhi, estime que M. Sharif a l’opportunité de dépasser la rancœur accumulée ces dernières années, ajoutant que toute ouverture serait «vue de manière très positive» par l’Inde.

«Nous avons besoin d’une nouvelle relation avec le Pakistan», fondée sur la «coexistence pacifique» et la «résolution des différends par le dialogue», a déclaré M. Dutta à l’AFP. «Cela aidera sûrement le Pakistan, et certainement l’Inde aussi», selon lui.

Dans son premier discours après son élection, M. Sharif s’est montré ouvert en ce sens, déclarant que son pays souhaitait une «meilleure relation avec l’Inde». Mais il a également averti qu’aucune paix durable ne serait possible sans une résolution du statut du Cachemire.

Et suggéré «au Premier ministre Modi de nous laisser résoudre la question du Cachemire et de consacrer toutes nos énergies à apporter la prospérité dans nos pays». M. Sharif devra composer avec la difficile situation économique du Pakistan, avec une inflation galopante, une roupie en dépréciation constante et une dette qui se creuse.

Selon M. Behera, de l’université Jamia, ces sombres perspectives financières pourront pousser M. Sharif à rétablir les liens commerciaux avec l’Inde. «Le Pakistan traverse une période très difficile. Ils n’ont pas vraiment le choix.»

Mais le gouvernement indien, après des décennies de méfiance et d’hostilité bien ancrées, reste sur ses gardes. «Si les signaux sont globalement positifs, les relations avec le Pakistan sont très imprévisibles et il suffit d’une seule attaque terroriste (...) pour changer le discours», note le journal Indian Express, citant un haut fonctionnaire anonyme. «Nous allons attendre et surveiller de près chaque mouvement», ajoute-t-il.

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