Un village de l’Atlas pleure ses morts

11/09/2023 mis à jour: 12:44
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Au village de Moulay Brahim, dans le Haut Atlas du Maroc, la tragédie de Lahcen est sur toutes les lèvres. L’homme a perdu sa femme et ses quatre enfants dans le puissant séisme qui a frappé le royaume.

Dans le minuscule dispensaire de ce douar – niché dans une zone montagneuse enclavée à plus d’une heure de la cité touristique de Marrakech –, Lahcen est assis dans un coin, mutique, la tête baissée et le corps comme recroquevillé par la douleur. «J’ai tout perdu», souffle ce quadragénaire d’une voix à peine audible.

Ce samedi après-midi, les secours n’avaient toujours pas extrait les corps de sa femme et son fils ensevelis sous les décombres de sa maison rasée par le séisme. Les corps sans vie de ses trois filles ont, en revanche, pu être retirés. «Je n’y peux rien maintenant, je veux juste m’éloigner du monde, faire mon deuil», confie Lahcen, qui se trouvait à l’extérieur de la maison, quand le séisme a frappé dans la nuit de vendredi à samedi.

Ce tremblement de terre de magnitude 6,8, le plus puissant à frapper le Maroc à ce jour, a fait 1037 morts et 1204 blessés, a indiqué le ministère de l’Intérieur dans son dernier bilan provisoire publié, hier à 13h GMT. Plus de la moitié des morts (542) ont été recensés dans la province d’Al Haouz, épicentre du séisme, dont fait partie le village de Moulay Ibrahim, qui déplore une dizaine de victimes mais craint un bilan plus lourd.

Des secouristes, à l’aide d’engins de chantier, étaient, en effet, à l’œuvre en milieu de journée à la recherche de survivants et d’éventuels corps parmi les décombres de maisons effondrées. Des habitants creusent déjà des tombes sur une colline pour enterrer leurs morts. Postée devant la porte d’entrée de sa modeste maison, très inquiète, Hasna est encore sous le choc.

«C’est un drame terrible, nous sommes sidérés par ce malheur», lâche cette femme volubile, la quarantaine.   «Même si ma famille a été épargnée, le village entier pleure ses enfants. Beaucoup de voisins ont perdu leurs proches, c’est une douleur indescriptible», raconte-t-elle. Sur les hauteurs de ce village de quelque 3000 habitants, Bouchra essuie ses larmes avec son foulard en regardant des hommes creuser des tombes pour enterrer les morts.

«Les petits enfants de ma cousine sont morts», dit-elle, avant d’ajouter d’une voix nouée : «J’ai vu en direct les ravages du séisme, J’en tremble encore. C’est comme une boule de feu qui a tout englouti sur son chemin.» «Tout le monde ici a perdu de la famille, que ce soit dans notre village ou ailleurs dans la région», poursuit-elle.

Des proches, Lahcen Aït Tagaddirt en a perdu également. Deux de ses neveux de 6 et 3 ans, qui résidaient dans un village voisin, ont péri.  «C’est la Volonté de Dieu», répète cet homme vêtu en gandoura, tunique traditionnelle, qui déplore l’enclavement de sa région. «Nous n’avons rien ici. Les zones montagneuses sont extrêmement difficiles d’accès», se désole-t-il.

Une jeune voisine, qui préfère taire son nom, affirme qu’un de ses oncles «a échappé de peu à la mort». «Il faisait sa prière quand le toit lui est tombé dessus, mais ils ont réussi à le sauver par miracle, bien que la maison se soit effondrée», dit-elle. «C’est assez impressionnant de voir comment une secousse de quelques instants peut causer autant de malheurs.»

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