C’est un jeune berger qui l’a découvert derrière la forêt de Stitten, une énorme excavation qui, selon les habitants, n’était pas là avant, du moins pas depuis l’élimination de l’Algérie à la Coupe du monde.
Parfaitement circulaire, le trou a intrigué la population qui a tout de suite accouru pour faire des selfies, rejointe plus tard par les services de sécurité qui ont d’abord pensé à une cache pour terroristes. Mais étant d’une profondeur inconnue (on a jeté une vieille femme qui ne servait plus sans réussir à l’entendre arriver au fond), la piste a été écartée et une équipe de géologues a été dépêchée d’Oran en urgence par car.
Après avoir déjeuné puis dîné et dormi, ils se sont immédiatement mis à la tâche et ont mesuré le diamètre du trou, 300 mètres exactement, et sa composition, essentiellement constitué de vide. Ils se sont ensuite demandés qui l’a creusé, mais aucun engin ne pouvant faire un trou de cette taille en si peu de temps, les géologues ont conclu à un affaissement du sol par un système de failles inverses en escaliers, puis sont retournés à l’hôtel.
Mais sur place, le mystère est resté entier, pourquoi un affaissement aussi régulier et pourquoi dans les alentours, tout est resté intact ? Comme c’était un vendredi, l’imam de Stitten a conclu dans son prêche à un signe de Dieu, en créant un ascenseur pour l’enfer il s’agirait d’un message sur le délitement des mœurs, à l’exemple des femmes qui mangent des glaces en public. Puis le wali est arrivé et a demandé si on pouvait construire des logements AADL à l’intérieur du trou dans le cadre du programme présidentiel. Puis le ministre de l’Agriculture est venu et une délégation de chômeurs a été envoyée au fond, d’où elle n’est jamais revenue, jugée plus tard par contumace pour tentative de quitter le territoire national sans autorisation.
Enfin, sur instruction ministérielle, le trou a été recouvert d’une grande bâche en plastique et le jeune berger qui l’a découvert a été condamné pour «trouble à l’ordre public».