L’alliance de l’opposition au président turc, Recep Tayyip Erdogan, s’est engagée hier à revenir à un régime parlementaire, avec un président au rôle honorifique élu pour un mandat unique de 7 ans, si elle arrive au pouvoir en mai. Dans le programme qu’ils ont présenté hier à Ankara, un document de 240 pages contenant plus de 2300 objectifs, les six partis d’opposition entendent limiter fortement les pouvoirs de l’exécutif en supprimant notamment les décrets présidentiels, avec un Premier ministre élu par le Parlement. Les six partis, dont le principal, le CHP (social-démocrate), se sont rassemblés en un front uni - l’Alliance nationale, communément appelée «Table des Six» - pour mettre un terme au règne sans partage du chef de l’Etat lors du scrutin présidentiel du 14 mai. L’élection présidentielle à laquelle le président Erdogan, au pouvoir depuis 20 ans, est candidat à sa succession, se tiendra en même temps que les législatives. M. Erdogan, d’abord Premier ministre de 2003 à 2014, est devenu président en août 2014, élu pour la première fois au suffrage universel direct, puis réélu en 2018. En 2017, une révision constitutionnelle a élargi considérablement ses pouvoirs. L’opposition promet, si elle est élue, que les amendements à la Constitution seront soumis au Parlement qui devra les approuver par une majorité des deux tiers - 400 voix sur 600 députés. L’opposition dit aussi vouloir supprimer les décrets présidentiels, dont M. Erdogan s’est régulièrement servi pour limoger de hauts responsables, dont le gouverneur de la Banque centrale, ou pour dénoncer en 2021 la Convention d’Istanbul, qui impose de poursuivre les auteurs de violences contre les femmes. Le président ne pourra pas non plus opposer son veto à une loi débattue par le Parlement mais pourra renvoyer ce texte devant les députés s’il entend le contester. L’Alliance nationale promet également que toute poursuite engagée contre un parti politique en vue de son interdiction devra obtenir le feu vert du Parlement. Enfin, décision symbolique, l’Alliance nationale promet le retour de la présidence au palais présidentiel historique de Cankaya : M. Erdogan s’est fait construire sur une colline à l’extérieur d’Ankara un palais décrié de plus de 1100 pièces, inauguré en 2014, comprenant mosquée, bibliothèque et jardin d’hiver.