Turquie-Iran : Le président iranien Ebrahim Raïssi depuis hier à Ankara

25/01/2024 mis à jour: 19:00
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Le président Erdogan recevant son homologue iranien Ebrahim Raïssi

Le président iranien, Ebrahim Raïssi, a entamé hier sa visite  en Turquie, après deux reports de sa visite, pour s’entretenir avec son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan. Les deux dirigeants s’entretiendront de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien et des moyens d’empêcher son extension, alors que les tensions vont croissant au Moyen-Orient. 

Accusant Israël, le président Raïssi a ainsi juré samedi de venger la mort de cinq membres des Gardiens de la révolution iraniens tués dans une frappe en Syrie. Israël a déjà été accusé d’avoir tué, ces dernières semaines, un haut responsable iranien en Syrie et le numéro deux du Hamas au  Liban, faisant craindre une extension de sa guerre contre le Hamas. Les Gardiens de la révolution ont mené le 15 janvier une attaque au Kurdistan irakien contre «un quartier général», d’où opéraient, selon eux, les services de renseignement extérieur israéliens. 

En parallèle, les rebelles yéménites houthis  continuent d’attaquer des navires marchands en mer Rouge et dans le golfe d’Aden, disant agir en solidarité avec les Palestiniens, malgré les frappes américano-britanniques contre leurs positions au Yémen.  D’autres sujets bilatéraux, parmi lesquels les relations commerciales turco-iraniennes et l’ouverture d’un nouveau poste-frontière entre les deux pays voisins, devraient également être abordés. Pour sa première visite en Turquie, E. Raïssi sera accompagné d’une «délégation politique et économique de haut rang», selon l’agence Irna. 

L’Iran et la Turquie (deux anciens empires) partagent une frontière de plus de   500 km. Après la Seconde Guerre mondiale, et jusqu’à la révolution islamique de 1979, les deux pays ont pris leurs distances avec l’Union soviétique. Le Pacte de Baghdad, dont le nom officiel est : «Traité d’organisation du Moyen-Orient», a été fondé le 24 février 1955 entre l’Irak, la Turquie, le Pakistan, l’Iran et le Royaume-Uni, rejoints par les Etats-Unis en 1958. Il sera rebaptisé Organisation du Traité central (Cento), après le retrait irakien le 24 mars 1959. Le Pacte de Baghdad, et le Cento après lui, fait partie des alliances internationales du camp occidental dans le contexte de la Guerre froide. Son but était de «contenir» le communisme et l’Union soviétique en ayant une ligne d’Etats alliés à sa frontière sud et sud-ouest.
 

Différends

Aujourd’hui, les deux pays ont connu des désaccords fondamentaux comme en 2011, lors de la guerre en Syrie : Ankara soutient les rebelles syriens contre Bachar Al Assad, tandis que Téhéran appuie Damas. En tournée dans le Golfe et en Arabie Saoudite, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a fustigé l’Iran lors d’une conférence donnée le 13 février 2017 à Bahreïn : «Certains sont à l’œuvre pour diviser l’Irak. 

Le sectarisme et les luttes ethniques qui s’y déroulent sont à mettre sur le compte du nationalisme persan.» Quelques jours plus tard, le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Çavusoglu, a accusé Téhéran de vouloir transformer la Syrie et l’Irak «en territoires chiites». «Notre patience a des limites», a rétorqué le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Bahram Ghassemi. Dans la foulée, l’ambassadeur de Turquie à Téhéran, Riza Hakan Tekin, est convoqué. Le soutien d’Ankara à l’Azerbaïdjan à propos du territoire disputé du Haut-Karabakh, dont Bakou s’est emparé en septembre dernier lors d’une offensive éclair, a aussi irrité l’Iran. Ankara a joué un rôle déterminant dans la victoire militaire de 2020, vendant des drones Bayraktar à Bakou et lui fournissant une assistance technique militaire. 

En septembre 2021, l’Azerbaïdjan a tenu, conjointement avec ses alliés turc et pakistanais, des exercices militaires pendant deux semaines dans la région de Bakou et en mer Caspienne. 
 

Ces manœuvres ont suscité la protestation de Téhéran qui a jugé la présence militaire de la Turquie et du Pakistan en cette mer illégale, étant réservée aux pays riverains, évoquant en ce sens la Convention sur le statut de la Caspienne de 2018. En octobre de la même année, Téhéran organise des exercices militaires sur sa frontière nord-ouest, ce qui provoqua l’ire des officiels de Bakou. Aussi, la République islamique n’apprécie pas l’ambition de l’Azerbaïdjan de se ménager un couloir en territoire arménien vers l’enclave du Nakhitchevan, le long de la frontière nord de l’Iran, qui pourrait compliquer son propre accès à l’Arménie. 

Ce projet est soutenu par la Turquie vu qu’il constituerait pour Ankara une voie d’accès vers l’Azerbaïdjan les autres pays turcophones d’Asie centrale, à travers la mer Caspienne. Aussi, Téhéran voit d’un mauvais œil la coopération militaire entre Tel-Aviv et Bakou. 

Selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, environ 60% des importations de défense de l’Azerbaïdjan sur la période 2015-2019 provenaient de l’Etat hébreu, tandis qu’en 2020, ce volume est passé à près de 70%.
 

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