Thwaites : Le «glacier de l’apocalypse»

16/01/2022 mis à jour: 03:51
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Le glacier de Thwaites, en Antarctique, est grand comme la Grande-Bretagne. Sa disparition pourrait entraîner une hausse de plusieurs mètres du niveau de la mer / Photo : D. R.

D’aucuns le surnomment le «glacier de l’apocalypse». Thwaites, le gigantesque bloc de glace de l’Antarctique inquiète de plus en plus la communauté scientifique. La plateforme de glace qui maintient le glacier se fissure à vitesse grand V. Il y a un consensus dans le discours des expert(e)s, glaciologues et directeur(ice)s de recherche que National Geographic a interrogé(e)s: afin d’éviter une élévation drastique du niveau de la mer à l’échelle planétaire, il faut immédiatement réduire nos émissions de gaz à effet de serre.

Thwaites est l’un des plus gros glaciers de l’Antarctique de l’Ouest, d’une taille comparable à celle de la Grande-Bretagne. Cette zone de l’Antarctique pourrait, à terme, si elle venait à fondre entièrement, élever le niveau de la mer de 3 mètres. Les modélisations scientifiques tendent à prouver que la ligne de fond, qui est le point où le glacier repose sur le substratum rocheux, recule au fur et à mesure que les courants chauds font fondre la plateforme de glace.

« Le réchauffement climatique modifie la circulation de courants d’air au-dessus de l’Antarctique et cela a des effets sur les courants océaniques. Cela fait remonter beaucoup plus de courants chauds à la surface», explique Atshuiro Muto, professeur associé au département Sciences de la terre et de l’environnement au Collège des sciences et des technologies à l’Université Temple, à Philadelphie.

«Cela fait déjà quelques années que toute cette région de l’Antarctique s’affaisse. C’est très nettement observé par les données satellites. Cela fait au moins trente ou quarante ans que les théoriciens ont souligné que ce glacier était vraiment le talon d’Achille de l’Antarctique de l’Ouest», souligne la glaciologue Catherine Ritz.

Atshuiro Muto, géophysicien de l’équipe d’Erin Pettit, principale coordinatrice du projet d’étude du glacier, explique qu’il y a deux ans, cette fameuse ligne de fond sur laquelle repose le glacier inquiétait déjà. «On voyait cette zone poreuse s’affaisser et des fissures se développer, de plus en plus vite. Nous n’avons pas de chiffres précis mais on peut imaginer que ce plateau de glace va disparaître dans la décennie. Si on [le] retire, [...] une grande partie de ce glacier pourrait descendre très vite.»

Anna Crawford, également experte dans l’équipe d’Erin Pettit, réalise des modélisations 3D pour comprendre le comportement du glacier et de cette zone géographique. «Si nous perdons ce plateau de glace, nous sommes vulnérables à un écoulement plus rapide du glacier, ce qui accélérerait la montée mondiale du niveau de la mer. Ce réchauffement de l’océan fait fondre le front du glacier mais également la plateforme de glace qui flotte en-dessous ». Avec pour conséquence une montée des eaux spectaculaire et inarrêtable. «Ce glacier est devenu le plus gros enjeu de l’Antarctique à l’échelle de quelques siècles», alarme la glaciologue Catherine Ritz.

Le réchauffement climatique en cause

Sans grande surprise, les émissions de gaz à effet de serre restent l’un des facteurs principaux de la catastrophe en devenir. Elles provoquent, année après année, l’aggravation du réchauffement climatique. Mais ces courants chauds et cette fonte pourraient-ils être en partie naturels ? « Ce n’est pas si facile que cela à déterminer. Il ne faut pas oublier que l’océan austral est le premier piège de chaleur et de CO2 de la planète», explique Catherine Ritz.

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