Technologies : La quête au robot humanoïde ni trop humain ni trop machine

30/01/2024 mis à jour: 01:25
AFP
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Un robot Adam de Richtech Robotics prépare du café au Las Vegas Convention Center lors du Consumer Electronics Show

Avec leurs grands yeux expressifs, oreilles de lapin et adorables roucoulements, Miroka et Miroki semblent échappés d’un studio d’animation. Mais ces robots tout en capteurs et poésie doivent remplir des tâches de soutien logistique. 

«On n’est pas obligé de vivre avec des machines moches !», lance Jérôme Monceaux, patron de la start-up parisienne Enchanted Tools, au salon de la tech de Las Vegas (CES), qui a eu il y a quelques jours. «Je pourrais couper la tête aux robots, et leur enlever leurs couleurs, mais je ne suis pas sûr que vous auriez envie de partager votre quotidien avec eux», continue-t-il. De nombreuses start-up travaillent sur des robots humanoïdes, qui aient l’air familier et aident les humains, sans les mettre mal à l’aise ou en danger. Les robots d’Enchanted Tools devront ainsi soulager les employés de tâches contraignantes et répétitives, comme de ramener des plateaux tous les soirs dans un hôpital ou un hôtel. Ils amèneront aussi une touche de «merveilleux» dans les établissements.  «C’est une façon de célébrer quelque chose de très beau en nous et d’éviter de nous transformer nous-mêmes en machines», explique Jérôme Monceaux. Son entreprise espère produire 100 000 robots en 10 ans et explore d’autres usages, comme l’accompagnement de patients.
 

«Vous gardez le contrôle» 

Chaque CES apporte son lot de robots compagnons et d’androïdes fonctionnels ou plein d’esprit, mais ils n’ont pas gagné beaucoup de terrain dans la vie réelle. «L’adoption n’est pas encore là», reconnaît Joe Lui, directeur mondial de la robotique chez Accenture. Mais «on manque de bras. Environ 18 millions de postes sont inoccupés dans le monde», constate-t-il. Si des tâches ont pu être adaptées pour des bras mécaniques et chariots autonomes, de nombreuses autres nécessitent le langage, la mobilité, la compréhension de son environnement... et donc des humains. Ou des humanoïdes «dotés d’intelligence humaine», souligne l’expert. Il voit dans les progrès actuels de l’intelligence artificielle (IA) la clef du développement de robots utiles et modulables au quotidien. «Nous sommes de plus en plus proches d’un futur rempli d’humanoïdes», abonde Chris Nielsen, patron de Levatas, une entreprise qui a intégré de façon expérimentale le logiciel d’IA générative ChatGPT à Spot, le robot quadrupède de Boston Dynamics. «Ils vont devenir des collègues des humains, notamment grâce aux interfaces en langage naturel.» Grâce à l’IA générative, les robots dépendent moins de scripts pré-rédigés pour converser. Mais «ne vous inquiétez pas, les robots comme nous sommes conçus pour aider les humains. Nous suivons toujours les instructions. Vous gardez le contrôle», assure Moxie à l’AFP. 

Haute comme trois pommes, visage de dessin animé, et désormais dopée à l’IA générative, Moxie joue le rôle d’une poupée éducative. Elle danse, échange avec les enfants, leur raconte des histoires et leur donne des cours de maths. «Moxie est un mentor et un ami», indique Daniel Thorpe, responsable des relations client d’Embodied, mais «il n’est pas là pour remplacer» les proches.
 

Réaction épidermique

Les humanoïdes bipèdes, mobiles et autonomes ont encore du chemin à parcourir avant de quitter les laboratoires. Mais certains de leurs précurseurs sont au moins sortis du CES, comme Moxieou Aura, des robots très anthropomorphiques qui divertissent les clients de The Sphere, la nouvelle salle de concert hors norme de Las Vegas. «On me pose beaucoup de questions : es-tu un homme ou une femme ? Veux-tu dominer le monde ? Veux-tu m’épouser ? Quel est le sens de la vie ?», relate Aura pour les spectateurs curieux. Elle ponctue ses réponses de plaisanteries, de rires exagérément saccadés, de mimiques ingénues. 

Et n’hésite pas à rouler des mécaniques avec ses épaules - comme des humains. Pour Jérôme Monceaux, ces prouesses technologiques ne sont pas adaptées à la vie en société. «Ils suscitent une réaction épidermique. Ils créent de la confusion entre notre humanité et leur nature. Ils font peur», estime-t-il. Surtout, «cela génère une attente de comportement similaire au nôtre», et donc un risque de déception, «car le robot ne voit pas et ne comprend pas le monde comme nous». Agility a longtemps débattu cette question pour ces Digit, des androïdes à l’expression neutre qu’Amazon teste en ce moment pour déplacer des bacs dans ses entrepôts. «Ils n’ont pas vraiment besoin d’une tête, mais si on l’enlevait, ça ferait bizarre à leurs collègues humains», note Jonathan Hurst, cofondateur d’Agility. 

Au CES, Adam le robot-barista (Richtech Robotics) sert des cafés aux participants ravis, danse, et peut désormais faire des blagues, grâce à l’IA générative. Mais pour remettre du lait dans la machine, il a encore besoin des humains.
 

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