Le groupe pharmaceutique saoudien, Jamjoom Pharma, qui vient d’investir en Algérie par le rachat avec Vital Care d’une usine Sandoz, veut, par la voix de son CEO Tarek Hosni, envoyer des messages positifs de ses projets en Algérie. Il évoque dans cet entretien exclusif les grandes lignes des projets et analyse la situation du secteur pharmaceutique.
En 2022, Jamjoon Pharma a enregistré un chiffre d’affaires de 244 millions de dollars, ce qui en fait un leader du marché en Arabie Saoudite, en Egypte, en Irak et aux Emirats arabes unis. Aujourd’hui, sa principale installation de production opérationnelle est une usine de fabrication ultramoderne de 46 500 m2 à Djeddah, avec une capacité de production de 113 millions d’unités par an. Elle est présente directement et indirectement dans 36 pays du Moyen-Orient et d’Afrique. Les principaux marchés de l’entreprise sont appelés à croître. Jamjoom Pharma compte plus de 90 scientifiques et titulaires de doctorats et diplômés dans son équipe R&D.
Entre janvier 2019 et mai 2023, plus de 400 nouveaux produits ont été approuvés avec un taux de réussite de bioéquivalence de 94%. Elle a lancé 17 nouveaux produits en 2021 et compte 72 nouveaux produits en préparation, dont 64% ont été soumis pour approbation à l’Autorité saoudienne des produits alimentaires et pharmaceutiques (SFDA) ou sont sur le point de l’être.
Les nouveaux produits ont contribué respectivement à hauteur de 4, 8 et 18% au chiffre d’affaires total de l’entreprise en 2019, 2020 et 2021.
Pour l’avenir, Hosni prévoit désormais de faire de Jamjoon Pharma le principal fabricant pharmaceutique au Moyen-Orient et en Afrique d’ici 2026.
Entretien réalisé par Kamel Benelkadi
-Présentez-nous avec plus de détails le groupe pharmaceutique saoudien Jamjoom Pharma...
Jamjoom Pharma a débuté son activité au royaume d’Arabie Saoudite en 1999, mais avant cette date, le fondateur de l’entreprise, Yousef Jamjoom, était déjà actif dans le domaine de la distribution de produits pharmaceutiques depuis 1960. Jamjoom Pharma a, de ce fait, une longue histoire dans la distribution, la production et la promotion de produits pharmaceutiques de haute qualité couvrant une vaste proportion des besoins en médicaments essentiels, que ce soit dans l’ophtalmologie, la dermatologie, les maladies cardiovasculaires, les maladies intestinales et beaucoup d’autres médicaments avec le souci qu’ils soient, encore une fois, de haute qualité et à des prix abordables. Nous couvrons actuellement plus de 30 pays, à travers la région, et nous sommes très heureux de notre investissement récent en Algérie, en partenariat avec Vital Care.
-Jamjoom Pharma vient d’investir en Algérie par le rachat avec Vital Care d’une usine Sandoz. Peut-on avoir plus de détails sur ce projet et vos ambitions sur le marché algérien ?
Nos ambitions reposent sur trois principaux leviers, et notre joint-venture avec Vital Care sera déterminante quant aux voies et moyens par lesquels nous comptons soutenir le marché algérien. Tout d’abord, nous avons racheté à Sandoz des produits pharmaceutiques très efficaces, et aujourd’hui, nous avons transféré leur autorisation de mise sur le marché au nom de Jamjoom Algeria Lil Dawa et ces produits seront donc désormais disponibles sous la marque Jamjoom Pharma. Il s’agit de sept des plus éminents produits de Sandoz. En deuxième lieu, nous fabriquerons tous les produits établis de Novartis fabriqués jusque-là à travers Sandoz. Cela nous permettra de garantir leur disponibilité et accessibilité aux patients algériens.
En troisième lieu, nous apportons nos produits innovants comme notre ligne de produits ophtalmiques et nos produits de soins dermatologiques sur le marché algérien le plus tôt possible. A travers ces trois dispositions, nous comptons véritablement apporter notre contribution, en matière de médicaments accessibles plus rapidement sur le marché algérien.
-Quels sont les délais pour le lancement de la production des médicaments ?
Les produits que nous avons achetés auprès de Sandoz sont déjà sur le marché. Quant aux produits que nous comptons manufacturer pour Novartis, nous attendons de finaliser le transfert de leur unité de fabrication de Sandoz à Jamjoom Algeria Lil Dawa, ce qui arrivera dans les prochaines semaines. Nous passerons ensuite à l’étape suivante, à savoir celle où nous apporterons nos propres produits innovants, ce qui prendra entre 18 et 22 mois pour les mettre à disposition des patients.
-Selon vos communiqués de presse, cet investissement contribuera à l’autosuffisance en matière de produits pharmaceutiques, mais vise aussi à assurer l’exportation vers d’autres pays, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Confirmez-vous ces objectifs ?
En effet, nos objectifs demeurent les mêmes, et le caractère imminent de l’arrivée de nos produits pharmaceutiques sur le marché algérien sont au cœur de ce que nous voudrions faire. Par exemple, nous allons avoir une unité de production en Egypte. Le bon sens voudrait que j’expédie mes produits vers des pays, comme le Soudan, la Libye, l’Ethiopie et la Somalie. De la même manière, en nous implantant industriellement en Algérie, nous pourrons exporter nos produits en Afrique francophone.
-Quelle analyse faites-vous de la nouvelle dynamique de réforme initiée par les autorités algériennes visant à améliorer le climat des affaires et favoriser l’investissement dans l’industrie pharmaceutique ?
Très enthousiasmante ! Franchement, nous sommes impressionnés d’avoir pu concrétiser notre investissement dans ces délais. Je veux dire par-là que tous ceux que nous avons rencontrés, nous ont réellement facilité le parcours de sorte que nous avons pu rapidement concrétiser notre investissement. Les ministres, les walis, tous les responsables, les instances de régulation, ainsi que les officiels du gouvernement ne nous ont vraiment rien montré d’autre que leur soutien et leur disponibilité pour qu’on arrive à ce résultat. Franchement, c’était réellement de bon augure pour nous de nous rendre compte que nous partagions avec chacun de nos interlocuteurs la préoccupation du bien-être du patient. Nous sommes donc ravis de partager avec les autorités les mêmes objectifs.
Je pense que ces réformes ne bénéficieront pas seulement aux investisseurs, comme nous, et le marché algérien dans sa globalité, mais elles bénéficieront également aux marchés voisins, et dans le cas de notre industrie, aux patients de la région.
-Vous avez auparavant travaillé chez Pfizer, GSK et Integrated Pharma Solutions, ce qui vous a permis d’acquérir de l’expérience et d’avoir une vision large sur le marché des médicaments. Dans ce contexte, comment évaluez-vous sa performance et son évolution dans le monde et plus particulièrement dans la région MENA ?
Ce qui rend notre région intéressante et stimulante en même temps, c’est le niveau de croissance que vous pouvez encore obtenir de chacun de ses marchés. Je commencerai par le marché d’origine, celui de l’Arabie Saoudite : toutes les grandes choses qui se passent dans ce pays, le boom économique et la relance émettent beaucoup de signes positifs dans de nombreuses industries, et le secteur des soins de santé en fait partie. Lorsque vous regardez des marchés comme ceux de l’Egypte, l’Algérie et bien d’autres, et même ceux qui connaissent des difficultés économiques, vous vous rendez compte qu’ils continuent à porter beaucoup de croissance à travers la consommation de médicaments accessibles.
Ce qui met un acteur comme Jamjoom Pharma au premier plan de ce tableau ; parce que, vous savez, plus vous éprouvez de difficultés dans certains segments du marché, plus le besoin se fait sentir d’avoir des médicaments disponibles qui soient au même niveau de qualité que ceux des grands acteurs du pharmaceutique, mais à des prix abordables.
Et c’est là que nous jouons notre rôle, parce qu’il est dans notre ADN de fournir des médicaments de qualité supérieure à des prix raisonnables. Je crois donc absolument que notre région va conduire à la croissance du secteur pharmaceutique en comparaison avec le reste du monde. C’est pour cette raison que nous sommes enthousiastes dans nos investissements à travers le Moyen-Orient et l’Afrique.