Il est des activités qui ne peuvent connaître une véritable relance qu’à une échelle multisectorielle, faisant concourir les moyens et les actions à différents niveaux de la vie nationale.
C’est le cas du tourisme, qui constitue l’une des deux options, avec l’agriculture, pour asseoir un développement économique et social d’envergure.
A l’occasion de l’inauguration de nouvelles structures hôtelières, souvent après moult reports des délais dus à des contingences internes multiples, il a été possible de constater les lacunes qui demeurent posées dans des domaines tout aussi cruciaux, compromettant la finalisation du projet initial et la concrétisation des objectifs globaux.
Pendant longtemps, il a été difficile de faire admettre aux responsables l’importance de la rénovation de l’infrastructure routière comme préalable à tout programme de développement au bénéfice de la population et en soutien aux projets d’investissements publics et privés. La route a souvent été le parent pauvre dans la gestion des collectivités, le chapitre le plus allègrement oublié, alors qu’elle constitue la première voie de communication, avant le téléphone et l’internet.
«La structure est belle, le site est attrayant, mais comment y avoir accès et par quel chemin carrossable ?» a demandé ce week-end un journaliste à un élu local, lors de l’inauguration d’un hôtel de standing en montagne. L’élu rétorquera que le projet d’un tronçon routier d’une dizaine de kilomètres a été inscrit et sera réalisé dans les prochains mois, avec quelque chance de le mettre en service avant l’été.
A l’échelle de l’industrie touristique, le plan de réhabilitation des routes doit se mesurer en centaines de kilomètres, et ce n’est que la phase élémentaire avant d’entrevoir un début d’activité et pouvoir «vendre» l’image des sites naturels, où il sera par la suite possible d’envisager la remise en service ou la réalisation des installations annexes, comme les remontées mécaniques et autres activités de loisirs.
Lors des visites d’inspection sur les chantiers, l’on entend rarement le directeur des travaux publics à propos de la cadence des opérations inscrites dans son secteur, ou l’élu local au sujet de l’assainissement et l’aménagement des cours d’eau autour des structures hôtelières, cédant la parole à des intervenants relatant les difficultés d’importation des matériaux et du mobilier de luxe usinés à l’étranger.
Une synergie des secteurs, des administrations, des assemblées élues ainsi que des organisations de la société civile est nécessaire pour garantir la mise en œuvre des programmes de développement au profit des populations, dont l’amélioration des conditions de vie ne pourra réellement dépendre que de l’efficience des dynamiques de création de richesse et d’emplois.
L’apport citoyen est indispensable pour dépasser certaines tares qui grèvent les espoirs d’un renouveau social. Le propriétaire d’un hôtel ayant engagé un lourd investissement sur fonds propres nous a indiqué ces dernières années qu’il n’est pas aisé de concevoir un afflux touristique sur des voies défigurées par le commerce informel.
La réglementation ne suffit pas pour enrayer ce phénomène, lequel peut aussi secréter d’autres fléaux et des sources d’insécurité. Chaque ville chef-lieu compte, à sa périphérie ou en son sein, un marché informel, et c’est le seul avatar d’un bidonville dont l’éradication est problématique, car nécessitant la redirection des marchands vers des structures aménagées et réglementées, tout en mettant un terme au vœu d’appropriation urbaine qui s’était «démocratisé» dans l’anarchie des années 1990.
C’est peut-être le moment, trente ans plus tard, de refermer cette boucle infernale, et c’est, du reste, le temps qu’il aura fallu pour remettre en service l’hôtel El Arz de Tala Guilef, détruit par la horde terroriste en janvier 1995.