Les Suds à Arles débutent demain, au lendemain du second tour des législatives, hasard du calendrier. Ce festival très coloré fait vibrer les musiques du monde. Son directeur Stéphane Krasniewski parle de «métissage» dans une rencontre qui célèbre «la diversité et l’altérité». A la veille d’une élection cruciale, il s’est livré à nous sur une manifestation culturelle arlésienne sur le signe de la concorde humaine, à l’opposé des thèses d’exclusion portées par l’extrême-droite.
- Comment avez-vous vécu les derniers préparatifs de la 29e édition des Suds dans une période incertaine au plan politique avec la montée du vote d’extrême-droite en fond sonore et visuel ? Est-ce plus compliqué ou parvenez-vous à vous abstraire de cette ambiance délétère ?
On n’arrive pas à s’en débarrasser, au contraire, on ne peut pas oublier ce contexte. On doit faire avec, l’intégrer à notre réflexion et notre préparation. Avec les idées d’extrême-droite et toute la xénophobie que ce courant transporte, cela nous questionne. Notre festival est un festival de musiques du monde et c’est aussi un festival où on organise des temps de débats, des temps d’échanges et de réflexion. Nécessairement, ces temps d’échanges vont être influencés par cette situation.
- Vous appréhendez le résultat ?
Les Suds démarrent le 8 juillet, lendemain du second tour. Quel que soit le résultat, on sait déjà qu’on a changé de société. Même si le Rassemblement national n’arrive pas à la majorité absolue, on sait qu’ils vont avoir plus de députés que leur précédent record avec une tendance assez incroyable où les idées racistes de ce parti progressent. On doit en tenir compte aux Suds.
- Quels sont donc les moments particuliers où vous aborderez dans votre festival, ce moment particulier de l’histoire française ?
On aura particulièrement le rendez-vous que l’on organise chaque année avec le journaliste fondateur de Mediapart Edwy Plenel. Il sera là mardi avec Johann Soufi, avocat international qui a travaillé du Rwanda à Ghaza, en passant par le Liban, la Sierra Leone, le Mali, la Côte d’Ivoire, l’Ukraine et Ghaza.
L’actualité nous impose une interrogation : quel est le rempart du droit international pour protéger les populations dans ces moments tragiques ou compliqués de l’histoire. On aura une autre rencontre au cœur de l’actualité brûlante en France, avec plusieurs entrées : géopolitique et écologie, medias et hospitalité. Sur ces thèmes, on laissera circuler la parole.
On y parlera bien évidemment de ce défi démocratique qui nous concerne tous. Toutes les crises sont liées en une seule, systémique ! Comment on fait collectivement pour y répondre ? Moi ce qui me fait un peu peur, c’est qu’on soit tous tétanisés.
- A Arles, durant quelques jours la ville se métamorphose en haut lieu culturel et de diversité. Le reste de l’année, les Suds ont-elles un rôle à jouer ?
Toute l’année les Suds existent en ville sous une autre forme. On a l’édition de l’hiver qui s’adresse à un public local dans des lieux plus petits pour les habitants du territoire. Il est important d’avoir une offre culturelle pour eux.
Une manière de retisser du lien et donner du sens. Toute l’année, nous activons vers les quartiers, les écoles, vers les maisons de personnes âgées, des villages alentour. Nous vivons le lien social que les musiques du monde permettent. Ce sont des pratiques inclusives qui permettent de rassembler les communautés, avec des modes de transmission et de partage.