Sommet du G7 au Japon : Front uni face à Moscou et Pékin

21/05/2023 mis à jour: 01:09
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Réunis à Hiroshima, au Japon, les dirigeants du G7 (les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie et le Canada) ont appelé hier la Chine à «faire pression sur la Russie pour qu’elle cesse son agression» contre l’Ukraine, rapporte l’AFP, citant un communiqué. 

«Nous sommes prêts à bâtir des relations constructives et stables avec la Chine», ont affirmé dans leur communiqué les chefs d’Etat et de gouvernement de ces pays, réunis depuis vendredi, évoquant «l’importance de dialoguer franchement» avec les autorités chinoises. «Il est nécessaire de coopérer avec la Chine, étant donné son rôle dans la communauté internationale et la taille de son économie, sur les défis mondiaux ainsi que dans les domaines d’intérêt commun», a estimé le G7. «Nous appelons la Chine à dialoguer avec nous, y compris au sein de forums internationaux, sur des sujets comme la crise climatique et la biodiversité», a ajouté le G7. 

En parallèle, ces grandes puissances mettent en garde les autorités chinoises sur plusieurs points. «Nous appelons la Chine à faire pression sur la Russie pour qu’elle cesse son agression militaire et retire immédiatement, totalement et sans conditions ses troupes d’Ukraine», ont indiqué les dirigeants du G7, dont la rencontre se termine aujourd’hui. «Nous encourageons la Chine à soutenir une paix globale, juste et durable sur la base de l’intégrité territoriale», «y compris à travers son dialogue direct avec l’Ukraine», ont-ils poursuivi. 

Les pays du G7 ont aussi réaffirmé leur «opposition» à toute «militarisation» chinoise en Asie-Pacifique, assurant qu’il n’existe «pas de fondement légal» pour «les revendications maritimes expansives» du pays en mer de Chine du Sud. Sur Taïwan, ils ont réitéré leur appel à «une résolution pacifique» des différends avec Pékin, qui considère cette île comme une de ses provinces, sans avoir encore réussi à la réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. La position des membres du G7 sur Taïwan n’a pas changé, ont-ils observé.

«Coercition économique»

Plus tôt dans la journée, les dirigeants des pays du G7 ont prévenu que toute tentative de «coercition économique» aurait «des conséquences», visant implicitement les pratiques de la Chine mais sans la nommer. «Nous travaillerons ensemble pour veiller à ce que les tentatives d’utiliser les dépendances économiques comme une arme» soient «vouées à l’échec» et aient «des conséquences», ont indiqué les responsables du G7 dans un communiqué. 

Et d’ajouter : «Nous exprimons notre vive inquiétude au sujet de la coercition économique» qui nuit non seulement au commerce international mais «porte également atteinte à l’ordre international fondé sur le respect de la souveraineté et de l’Etat de droit et, en fin de compte, compromet la sécurité et la stabilité mondiales». 
Le G7 est particulièrement préoccupé par sa vulnérabilité dans des secteurs stratégiques, tels que les minerais essentiels, les semi-conducteurs et les batteries électriques. Ses dirigeants veulent renforcer les chaînes d’approvisionnement pour éviter leur perturbation et veiller à ce que les technologies ayant des applications en matière de sécurité nationale soient «contrôlées de manière appropriée». 

Washington a mené, ces derniers mois, une intense campagne visant à restreindre l’accès de la Chine aux outils avancés de fabrication de semi-conducteurs, en invoquant des préoccupations de sécurité nationale et en poussant le Japon et les Pays-Bas à prendre des mesures similaires. 

Et Bruxelles a récemment irrité Pékin en proposant de restreindre ses exportations de technologies sensibles à huit entreprises chinoises soupçonnées de réexpédier ensuite ces produits vers la Russie. Des responsables européen et américain ont évoqué, dans la matinée, des éléments de langage vis-à-vis de Pékin qui devraient être présents dans le communiqué final du G7 attendu aujourd’hui. Cette déclaration commune ne contiendra rien d’«hostile» ou de «gratuit», mais plutôt un appel à des «relations stables avec la Chine et à travailler ensemble sur des questions d’intérêt mutuel», selon le conseiller à la sécurité nationale des Etats-Unis, Jake Sullivan. Il a assuré que les divergences passées entre les Etats-Unis et les pays de l’Union européenne (UE) sur la position à adopter face à la Chine se sont estompées, et que la stratégie commune mettrait l’accent sur la nécessité de se protéger tout en évitant une confrontation directe avec Pékin. Un responsable de l’UE a également estimé que le G7 est «prêt à coopérer» et à évaluer les risques sur les questions stratégiques liées à la Chine. 
 

«Mécontentement»

En réaction, la Chine a exprimé son «vif mécontentement» quant à la vision de l’Occident sur l’Empire du Milieu. «Le G7 s’obstine à manipuler les questions liées à la Chine, à discréditer et attaquer la Chine», a affirmé, hier soir dans un communiqué, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. «La Chine exprime son vif mécontentement et sa ferme opposition et a déposé une protestation officielle auprès du Japon, pays hôte du sommet, ainsi qu’auprès des autres parties concernées.» Sur Taïwan, il reproche notamment aux pays du G7 de ne pas manifester d’opposition claire au mouvement indépendantiste taiwanais. «Le G7 claironne qu’il entend aller vers un monde pacifique, stable et prospère. 

Mais dans les faits, il entrave la paix dans le monde, nuit à la stabilité régionale et inhibe le développement d’autres pays», a indiqué le porte-parole chinois. «Cette approche n’a pas la moindre crédibilité internationale». Plus tôt, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré que les décisions qui sont prises au sommet du G7 visent à «contenir» la Russie et la Chine. «Regardez les décisions discutées et prises aujourd’hui au sommet du G7 à Hiroshima, qui visent à contenir doublement la Russie et la Chine», a-t-il observé lors d’une réunion retransmise à la télévision.

Vendredi, dans une déclaration commune publiée après une réunion consacrée à l’Ukraine, les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie et le Canada ont annoncé des mesures pour «priver la Russie des technologies, des équipements industriels et des services du G7 qui soutiennent son entreprise guerrière». Le Royaume-Uni et l’UE, qui participe aux discussions du G7, ont auparavant annoncé des restrictions à leurs importations de diamants russes, qui rapportent chaque année plusieurs milliards de dollars à Moscou. Et à l’issue de discussions sur le désarmement nucléaire, les dirigeants du G7 ont estimé que l’extension rapide de l’arsenal nucléaire chinois constitue une «préoccupation pour la stabilité mondiale et régionale». 

Le même jour, les Etats-Unis ont annoncé de nouvelles sanctions contre la Russie. «Les mesures prises aujourd’hui permettront de limiter la capacité» de Moscou «de poursuivre son invasion barbare (...) et à contourner les sanctions» déjà en place, a déclaré la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, citée dans un communiqué. «Nos efforts collectifs ont permis de priver la Russie d’éléments cruciaux dont elle a besoin pour équiper son armée, et de réduire de façon drastique les revenus dont dispose le Kremlin pour financer sa machine de guerre», a-t-elle ajouté. De par ces mesures, «plus de 300» personnes, entreprises, navires et avions, à travers l’Europe, le Moyen-Orient et l’Asie, sont placées sur la liste noire des Etats-Unis, selon des communiqués du département du Trésor et du département d’Etat. 

Elles interdisent ainsi les exportations américaines vers 70 entités en Russie et dans d’autres pays. Washington se dit déterminé aussi à peser sur le secteur financier russe ainsi que sur la capacité de la Russie à produire de l’énergie à moyen et long terme, selon les communiqués. Les nouvelles mesures incluent des restrictions sur les exportations de biens essentiels pour la Russie sur le champ de bataille, comme les composants utilisés dans la fabrication des drones de reconnaissance russes, Orlan. Elles visent aussi des réseaux en Inde, en Finlande, en Estonie, au Liechtenstein et aux Pays-Bas. 

Dans le secteur énergétique, les Etats-Unis frappent 18 entités, y compris dans la construction navale et la recherche et l’exploration énergétique dans l’Arctique russe. Les Etats-Unis ciblent aussi les «liens de plus en plus étroits entre la Russie et l’Iran», sanctionnant par exemple la compagnie maritime Khazar Sea Shipping Lines. Selon Washington, la KSSL a effectué 60 passages dans des ports russes au cours de l’année écoulée. Les sanctions américaines ont pour effet de geler les éventuels avoirs aux Etats-Unis et interdisent en principe à toute personne ou entreprise de mener des échanges commerciaux avec les entités désignées.

Simultanément, les Etats-Unis se sont déclarés prêts à autoriser la livraison d’avions de combat américains F-16 à Kiev, un tournant dans leur aide militaire à l’Ukraine. Le président américain a assuré ses interlocuteurs de son «soutien à une initiative commune visant à entraîner des pilotes ukrainiens sur des avions de combat de quatrième génération, y compris des F-16», selon un haut responsable de la Maison-Blanche. Les Etats-Unis, qui évitent un affrontement direct avec Moscou, ne souhaitent pas les livrer eux-mêmes, mais ils autoriseraient d’autres pays qui en possèdent à le faire.

 
 
 

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