Les joueurs de football de haut niveau, à l’exception des gardiens de but, ont depuis un siècle un risque accru de développer une démence par rapport à la population générale, selon une étude suédoise d’envergure publiée ce vendredi 17 mars.
En effet, des experts ont estimé que l’étude apportait «une preuve convaincante» du lien entre le sport le plus populaire au monde et un risque accru de troubles dégénératifs du cerveau.
Un lien déjà mis en lumière par la mort en 2020 de Nobby Stiles, champion du monde en 1966 avec l’Angleterre. Il était atteint de démence. D’autres cas concernant des sports comme le rugby, le football américain ou le hockey sur glace sont uen preuve en plus pour cette étude.
Les experts évoquent comme cause les chocs subis à la tête par les joueurs. Publiée dans la revue scientifique The Lancet Public Health, cette étude a analysé les dossiers médicaux de plus de 6000 joueurs du Championnat de Suède de 1ère division entre 1924 et 2019.
Elle a ensuite comparé le taux de survenue de troubles dégénératifs du cerveau à celui d’un échantillon de 56 000 Suédois. Les joueurs de football avaient un risque 1,5 fois plus élevé que le groupe de contrôle de développer des maladies comme Alzheimer et d’autres types de démence. Les gardiens de but font exception dans l’étude, car ils ne font pas de tête.
«Cette recherche conforte l’hypothèse selon laquelle le jeu de tête explique ce lien entre football et maladies cérébrales», a dit à l’AFP le principal auteur de l’étude Peter Ueda, du Karolinska Institutet suédois. C’est la plus vaste étude conduite sur le sujet depuis une étude écossaise de 2019 qui suggérait que les footballeurs avaient 3,5 fois plus de risques que la population générale de développer des troubles dégénératifs du cerveau.
Solution : Protéger la tête
En revanche, l’étude suédoise a établi que les joueurs professionnels avaient une espérance de vie légèrement supérieure à la moyenne des hommes.
Ce qui s’expliquerait selon M. Ueda par une meilleure forme physique et un statut socioéconomique plus élevé. L’étude n’a pas identifié de risque accru de développer des maladies neuromotrices, comme la maladie de Charcot (ALS), et a même noté une plus faible incidence de la maladie de Parkinson.
M. Ueda a prévenu que l’étude, basée sur l’observation, n’était pas en mesure de montrer que jouer au football était la cause directe de l’apparition de démence. Et que ses conclusions ne s’étendaient pas aux femmes et aux joueurs amateurs ou juniors.
Le délai d’occurrence théorique entre la carrière du joueur et la survenue de symptômes de maladies dégénératives est très long. Selon M. Ueda, de meilleurs équipements, formations et entraînements pourraient rendre le football plus sûr pour les joueurs professionnels modernes. «Mais on peut aussi imaginer que les joueurs actuels sont exposés à un football intense dès le plus jeune âge, et qu’ainsi le risque est encore plus élevé pour eux», a-t-il relevé.
Pour Gill Livingston, professeur en psychiatrie pour les personnes âgées au University College de Londres, cette étude de «grande qualité» apporte une «preuve convaincante» que les footballeurs dont la tête vient au contact du ballon courent un plus grand risque de démence que la moyenne.
«Nous devons agir pour protéger la tête et le cerveau des joueurs afin que le jeu se poursuive», a conclu le Pr Livingston, qui n’a pas participé à l’étude.