Séisme en Turquie et en Syrie : Des ONG racontent le «chaos» des premiers jours

09/03/2023 mis à jour: 14:44
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Présent dans le nord-ouest de la Syrie en guerre, Handicap International n’a pu compter, dans les heures qui ont suivi le séisme de magnitude 7,8 survenu le 6 février, «que sur elle-même», explique Myriam Abord-Hugon, directrice du programme Syrie de l’ONG. D’abord parce que son équipe locale, composée d’une centaine de personnes vivant en Syrie, a elle-même subi le tremblement de terre et ses nombreuses répliques. «On a passé les premières heures à multiplier les appels pour faire le compte de nos effectifs. Quand on a vu qu’une personne manquait à l’appel et que sa maison avait été détruite, ça a été l’effroi», raconte Myriam Abord-Hugon, soulagée d’avoir pu la retrouver vivante sous les décombres trois jours plus tard. Les groupes de secouristes déployés sur place se sont cependant plus d’une fois retrouvés dans l’incapacité d’intervenir dans les débris des bâtiments sous lesquels se trouvaient des victimes. Autant en raison de «l’immensité de la catastrophe», qui a généré, selon les estimations de l’ONU, jusqu’à 210 millions de tonnes de gravats dans les deux pays, note la responsable, que par manque d’équipement, notamment de bulldozers. L’impossibilité de recevoir du renfort et du matériel de l’extérieur du pays a considérablement «limité les choses» pour les équipes humanitaires dans cette zone rebelle enclavée de la Syrie, dont le seul poste-frontière alors ouvert avec la Turquie, Bab Al Hawa, a été endommagé pendant le séisme. «Même si les hôpitaux étaient habitués, avec la guerre, à prendre en charge des patients polytraumatisés à la suite d’un effondrement, ils ont été débordés par le nombre de blessés du séisme», note Myriam Abord-Hugon. En Turquie, où l’aide internationale a commencé à arriver dès le lendemain du séisme, certains bénévoles se sont retrouvés immobilisés par les autorités locales. Ce fut notamment le cas pendant une douzaine d’heures particulièrement cruciales à l’aéroport de Kahramanmaras, dans le sud-est du pays, relate Ezgi Karakus, une bénévole d’ONG présente sur place.

Retour précipité

«Il a fallu que notre chef d’équipe réquisitionne un autobus municipal pour qu’on puisse se rendre à Islahiye au bout de 24 heures», se souvient-elle. La bénévole déplore que les ONG aient été contraintes d’agir uniquement dans les zones désignées par l’Afad, l’autorité gouvernementale turque en charge des situations d’urgence. Président de l’association d’aide d’urgence SOS Attitude, John Diksa a pu distribuer, grâce à l’Afad, du matériel d’urgence (tentes, sacs de couchage, couvertures...) aux villages de la région d’Elbistan, près de l’épicentre du deuxième séisme qui a frappé la Turquie le 6 février. Mais son équipe a initialement été confrontée à des conditions météorologiques compliquées. «Il faisait entre -15 et -20 degrés la nuit, et il fallait compter près de cinq heures pour parcourir seulement cinq kilomètres à cause de la neige», détaille le bénévole. Ce n’est que lors de sa deuxième semaine sur le terrain, dans la région agricole de Pazarcik, que les choses sont «devenues plus compliquées» pour SOS Attitude, après la réquisition soudaine par l’armée, la gendarmerie et la police turques du centre de distribution d’aide local et l’expulsion de tous ses bénévoles. Privée de base opérationnelle, en pleines tractations avec les douanes pour récupérer du matériel bloqué au port de Mersin, l’association a dû précipiter son retour en France à cause d’un problème mécanique avec sa voiture, qui l’empêchait de poursuivre son travail de terrain. Un mois après la catastrophe, John Diksa se prépare à repartir en Turquie pour poursuivre ses efforts d’aide au logement des réfugiés, «leur plus grand besoin actuel», tandis qu’Ezgi Karakus s’inquiète des «gros problèmes d’hygiène» causés par le manque d’eau dans les zones sinistrées. En Syrie, où des points de passage transfrontaliers avec la Turquie ont été ouverts temporairement par les autorités mi-février, Handicap International focalise désormais ses efforts sur l’appui psychologique et la réadaptation physique des rescapés. Avec un objectif clair, souligne Myriam Abord-Hugon : «Eviter que leurs blessures ne deviennent des handicaps permanents.»

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