Rendre «la mémoire» accessible

05/06/2023 mis à jour: 03:16
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Dans plusieurs pays, les archives documentaires sont menacées de dégradation par les aléas du temps ou de destruction par les incendies et les inondations. Seule la numérisation pourrait les préserver et les rendre accessibles à tous, sans risque d’endommager les documents originaux en les exposant physiquement. 

Dans cette perspective, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) a lancé, en 2017, le registre «Mémoire du monde». Depuis, l’engouement est palpable. Pour cette année, 56 pays ont rejoint ce processus, comptabilisant 494 collections documentaires issues de toutes les régions du monde. Sauvegardé sur divers matériaux, allant de la pierre au celluloïd, du parchemin au disque en métal, ce patrimoine emblématique à valeur universelle est maintenant conservé pour la postérité, à l’image des manuscrits persans illustrés et enluminés ou encore des archives architecturales d’Oscar Niemeyer. 
 

Dans cette mission évidemment onéreuse, l’agence onusienne apporte son soutien aux bibliothèques, archives et musées, en particulier en Afrique, dont la Côte d’Ivoire, le Mali et le Soudan. Une quarantaine de pays sont ainsi assistés dans l’élaboration des politiques publiques et de développement des capacités nécessaires pour réussir l’inventaire de leur patrimoine documentaire, sa protection et son accessibilité. 

Parmi les 64 collections ajoutées cette année, figurent les travaux complets du poète et philosophe soufi Jalaleddin Rumi, soumis collectivement par l’Allemagne, la Bulgarie, l’Ouzbékistan, l’Iran, le Tadjikistan et la Turquie ; les disques et documents sonores de l’EMI Archive Trust – plus de 100 000 enregistrements, couvrant la musique, les traditions urbaines et rurales et les créations orales de 1897 à 1914 ; ou encore les archives de la première réunion du Mouvement des non-alignés (MNA). Cette dernière soumission est faite par l’Algérie, conjointement avec des membres fondateurs, l’Egypte, l’Inde, l’Indonésie et la Serbie, représentant l’ex-Yougoslavie. 

Fondé en 1961 à Belgrade et institutionnalisé entre les conférences de Lusaka (1970) et d’Alger (1973), ce concept politique ayant émergé en pleine guerre froide a acté le refus d’adhérer à la logique d’affrontement Est-Ouest, privilégiant l’indépendance des pays du Sud dans le cadre de la décolonisation. Il est souvent associé à un mouvement de neutralité et de non-engagement dans les conflits internationaux. Sa position est réitérée dans le discours diplomatique de certains de ses membres à la faveur d’un contexte mondial empreint d’une confrontation sino-américaine et par l’effondrement des relations russo-occidentales depuis le 24 février 2022. 

Le MNA a inspiré, de par ses principes, certains courants, dont celui des altermondialistes. Aujourd’hui, il est de moins en moins visible. D’où l’intérêt de la numérisation de son patrimoine documentaire, qui vient à point nommé : préserver l’histoire de la fondation du mouvement, et assurer sa promotion auprès des jeunes générations, dont les connaissances à ce propos sont sommaires, voire inexistantes.

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