Par M’hamed Abaci
Expert financier
Sur la période des années 1980-90
Malheureusement, ces grandes ambitions d’un acquis, porteur de grandes perspectives socioéconomiques pour l’horizon 1980 (H80), pour passer de l’état de pays pétrolier à celui de pays industrialisé qui auraient dû se poursuivre et s’approfondire ne sont pas produites, sinon l’Algérie devait au moins avoir le rang aujourd’hui de la Turquie, mais hélas !
«Tout ce projet politique et socio-économique fut abandonné au début des années 1980», par l’introduction du fameux programme anti pénurie (PAP) en 1981 pour concrétiser pleinement le slogan «Pour une vie meilleure». La suppression du ministère du Plan qui comprenait en son sein une intelligentsia algérienne, ce qui a exclu toute perspective de développement industriel en amont comme en aval.
En effet, la crise économique et financière, celle de 1986, année marquée par la chute drastique du prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux et le débat, dont la teneur nous rappelle «la remise en cause du processus industriel par la fameuse restructuration organique (démembrements) des grandes entreprises publiques géantes en plusieurs entreprises de taille PME/PMI engagée en 1981», point de départ de la grande récession où notre force industrielle et économique nous a échappé, notamment l’économie algérienne est passée d’une économie sidérurgique, pétrochimique et industrielle aux secteurs du commerce (importation), de la finance et des services.
«Ainsi, le rythme des investissements dans l’industrie est tombé de 50% en 1967-1977 à 35% en 1980-1984. Le service de la dette est passé, entre 1980 et 1989, de 32% à 75% du PIB où la part de la production industrielle annuelle est passée de 18 à 25% du PIB à 6%.
Le PIB a chuté ou a été en stagnation, alors que la masse monétaire est passée, selon les statistiques, de 224 milliards de DA en 1988 à 800 milliards de DA en 1995, le taux de liquidités a connu une baisse sensible de 76,7% en 1988 à 45,9% en 1995.
Le découvert bancaire des entreprises publiques a pris des proportions inquiétantes. L’assainissement financier de ces dernières n’a servi, souvent, qu’à couvrir le passif, sans produire les effets escomptés sur l’activité productive et environ un millier d’entreprises prononcé à la liquidation.
En 1994, l’économie algérienne est soumise à un programme d’ajustement structurel avec le Fonds monétaire international (FMI) et l’acceptation, pour la première fois de son histoire, de rééchelonner «ses dettes extérieures évaluées à cette date un peu plus de 26 milliards de dollars». Ajoutons à cela, selon les statistiques, près de 300 000 de nos cerveaux et cadres de haut niveau auraient, en effet, quitté le pays au milieu des années 1980, pour s’installer à l’étranger.
Sur la période des années 2000 à 2024
L’Algérie poursuit une voie ambitieuse concrétisant de nombreuses réalisations et continuent de se renouveler jusqu’à aujourd’hui, pour son développement.
En effet, l’Algérie a repris, aujourd’hui, sa marche vers le progrès et le développement socio-économique, à travers, notamment le programme de soutien à la croissance et la relance économique hors hydrocarbures, visant l’encouragement des investissements locaux et étrangers dans divers domaines, stimulant le développement économique, la création d’emplois et l’amélioration de la qualité de vie des Algériens ; la réhabilitation et la modernisation du service public ; le soutien aux secteurs vitaux, tels que l’industrie, l’agriculture, le tourisme, l’énergie et l’habitat pour maintenir la dynamique de développement et reconstruction nationale.
A cet effet, l’Etat qui a consacré durant cette période entre 25 et 35% de son PIB à l’investissement public, dont notamment: le développement des infrastructures et des équipements collectifs ; le développement des infrastructures de l’hydraulique, dont barrages, transferts, stations d’épuration et de stations de dessalement de l’eau de mer ; des télécommunications ; du chemin de fer ; le transport urbain (avec notamment la réalisation métro d’Alger; de tramways à travers certaines villes du pays ; modernisation des infrastructures aéroportuaires, les Infrastructures de santé, dont polycliniques, hôpitaux et centres hospitalo-universitaires (CHU).
Les infrastructures, dont les secteurs de l’éducation, de l’administration, social, l’enseignement supérieur et recherches ; La mise en place d’un programme spécial au profit des zones d’ombres dépourvues d’un minimum d’infrastructures.
Ajoutons à cela le développement de la route transsaharienne jusqu’à la frontière avec le Niger, le confortement des infrastructures portuaires et la construction de ports, le renforcement et la réhabilitation de pistes aéroportuaires ; le réseau de l’autoroute Est-Ouest s’inscrit dans le projet de l’Unité Maghrébine, reliant Nouakchott à Tripoli et Tunis); réalisation de routes nouvelles, modernisation et réhabilitation du réseau routier et nos ports de pêche, voire la réhabilitation du barrage vert abandonné dans les années 1980.
Projets en cours de réalisation gisement géant de Gara Djebilet et ligne ferroviaire Tindouf-Béchar ; relier Alger à Tamanrasset par train ; le développement des Energies renouvelable ; la production de lait…
Notons enfin que «les logements réalisés se composent de 42% de logements ruraux et 58% de logements urbains».
Le secteur du BTPH constitue la meilleure amorce pour une généralisation de la relance économique en Algérie, mais essentiellement grâce à la dépense publique, de faire reculer fortement le chômage et de maintenir un taux de croissance entre 3 et 4% du PIB.
A noter, enfin, que notre pays a procédé au remboursement de sa dette extérieure par anticipation grâce au boom pétrolier des années 2000. Dette extérieure 2023 : 1,5% du PIB.
Cependant, on peut tout de même conclure :
Malgré l’aisance financière, dont allait bénéficier le pays de l’augmentation des prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux en 1982, 1984 et depuis 2000 à 2014 où les prix ont évolué avec un baril de pétrole entre 90 et 150 dollars, notre économie s’achève sur un constat loin des réalités des marchés et des évolutions mondiales, notamment demeure très fortement dépendante de la rente des hydrocarbures, qui représentent la principale source de revenus du pays.
Pour rappel, en novembre 2017, il a été décidé le recours massif à la planche à billets avec des émissions monétaires sans limite pour une durée de 5 ans. L’assèchement de l’épargne publique (fonds de régulation des recettes) et près de 50% de la masse monétaire est hors circuit bancaire où le poids de l’informel est énorme avec près de 60% de la consommation du marché.
Ce qui a fait peser une menace sérieuse sur les finances publiques et le secteur bancaire au cœur de toutes les préoccupations du gouvernement.
Aujourd’hui, il nous faudra «une croissance annuelle de 7% et plus par an et un baril de pétrole à plus de 90 dollars pour pouvoir faire face aux déficits budgétaires quasi-chroniques pour restaurer la maîtrise du pays sur sa propre économie, notamment ouvrir de grandes perspectives socio-économiques pour notre jeunesse», dont la création de 2 millions d’entreprises de taille PME/PMI et de pas moins de 700 000 emplois nouveaux par an pour améliorer le taux de chômage actuel estimé à 14%.
Surtout que l’on sait que l’on reste sur une croissance socio-économique dépendante excessivement de la dépense publique, notamment après 35 ans d’ouverture, le seul investisseur et le principal pourvoyeur de fonds demeure l’Etat.