En chantier colossal, un promoteur défaillant et des souscripteurs plongés dans une interminable attente. Telle est la trame d’un feuilleton qui, après plus de dix ans d’espoirs déçus, semble enfin toucher à son épilogue.
Le projet des 650 logements promotionnels aidés (LPA) à El Barka El Zarka, qui devait initialement redéfinir le paysage urbain de la commune d’El Bouni, sort enfin du marasme grâce à l’intervention décisive du ministère de l’habitat sous l’impulsion du wali d’Annaba, M. Abdelkader Djellaoui.
Lancé en 2012, ce programme ambitieux a été confié à la SARL Karatas, entreprise immobilière turque qui a rapidement fait face à des difficultés insurmontables. Sur les 34 immeubles prévus, représentant un total de 650 logements et 243 locaux commerciaux, à peine 32% des travaux ont été réalisés. Faute de moyens ou de gestion efficiente, Karatas s’est enlisé, incapacité flagrante de mener à bien ses engagements. Réunions sur réunions, mises en demeure et procédures judiciaires n’ont fait qu’allonger l’attente des souscripteurs, fatigués de voir leur rêve de logement s’évaporer.
En 2018, les autorités locales décident de sévir. Une action judiciaire est intentée pour récupérer le terrain et résilier le contrat avec le promoteur. Le jugement tombe en mars 2019 : Karatas est démis de ses fonctions, et l’Etat reprend possession du site. Mais l’affaire prend une tournure sinueuse lorsque l’entreprise fait appel, suspendant temporairement le jugement et espérant une relance miraculeuse du projet. Relancé une première fois en 2019, le projet reprend pour quelques mois avant de s’éteindre à nouveau, victime de la lenteur bureaucratique et d’une nouvelle inaction du promoteur.
Malgré une succession de réunions au plus haut niveau, le chantier demeure à l’arrêt. Entre janvier et mars 2022, le constat est accablant : les souscripteurs observent, impuissants, une stagnation totale. Alors que leurs espoirs s’étiolent, les mises en demeure s’accumulent, sans effet. Le 7 juin 2022, une nouvelle bataille judiciaire est engagée pour annuler définitivement l’acte de vente du terrain.
UNE INTERVENTION SALVATRICE
Le tribunal administratif, intransigeant, prononce la résiliation du contrat début 2023 mettant fin au feuilleton Karatas. Sous la pression des souscripteurs et des médias locaux, Abdelkader Djellaoui, wali d’Annaba fait appel au ministre de l’Habitat en août 2024 pour trouver une solution durable.
Ce dernier prend acte de l’état de délabrement financier et technique du projet et décide de confier la gestion du chantier aux organismes publics de l’Office de Promotion et de Gestion immobilière (OPGI) et l’Agence nationale d’Amélioration et de Développement du Logement (AADL). Les décisions sont prises rapidement. Une estimation des coûts est commandée.
L’évaluation, bien qu’exorbitante, soit trois milliards de dinars, lance la réorganisation complète du projet. Au cours de plusieurs réunions, des choix cruciaux sont posés : logements prêts à l’usage, logements semi-équipés ou une répartition progressive des phases de livraison. La solution finale voit l’attribution de 274 logements à l’OPGI et 376 à l’AADL. Le Fonds de Garantie et de Caution mutuelle de la Promotion immobilière (FGCMPI) est chargé de superviser la finalisation du chantier.
Aujourd’hui, l’espoir renaît pour les centaines de familles inscrites dans ce programme. Le 12 septembre 2024, une décision de la wilaya met officiellement fin à la collaboration avec Karatas et cède définitivement le projet aux mains des nouveaux promoteurs publics. Les souscripteurs, après plus d’une décennie d’incertitudes, aperçoivent enfin le bout du tunnel.
Ce projet, qui devait initialement témoigner du dynamisme de l’immobilier à Annaba, devient l’emblème des dysfonctionnements, mais aussi de la résilience d’un secteur qui se restructure. Sous la houlette du wali, un chantier autrefois figé reprend vie, promettant de rendre justice aux efforts des habitants et de l’Etat.
«Avec les premières livraisons prévues pour 2025, le projet des 650 logements promotionnels aidés (LPA) à El Barka El Zarka pourrait enfin, après plus d’une décennie d’attente, devenir une réalité tangible pour nous, des centaines de familles, dont le mérite revient, sans conteste, au wali d’Annaba et au ministère de l’habitat», estiment des souscripteurs à ce vieux projet, dont la joie est perceptible sur leur visage.